CyberÉthique https://cyberethique.fr/ Transhumanisme, vie privée, même combat ? <br> Réflexion sur l'éthique du numérique. http://www.rssboard.org/rss-specification python-feedgen Sat, 07 Jun 2025 08:23:47 +0000 N'avez-vous rien à cacher ? /article/2022-05-11_N'avez-vous%20rien%20%C3%A0%20cacher/ Votre intimité est-elle vraiment à l'abri ? Plongez dans les coulisses de la surveillance numérique et découvrez comment vos données sont exploitées. Nous sommes convaincus que prendre conscience de l'exploitation réelle de nos données est essentiel pour reprendre le contrôle de nos vies numériques. <p>Pourtant vous faites probablement partie de ces gens qui évitent de montrer le code de votre carte bancaire, ou plus naturellement, qui fermez la porte quand vous en avez besoin. Et c'est tout à fait naturel !</p> <p>L'intimité fait partie intégrante de l'homme. Elle se manifeste sous de nombreuses formes, au point que nous la protégeons au quotidien sans même nous en rendre compte. Cela va des habits, aux verrous sur les portes, en passant par toutes ces choses qu'on ne dit pas ou que l'on ne confie qu'aux personnes qui nous sont très proches.</p> <p>C'est somme toute logique, l'homme exprime toutes les réalités physiques ou philosophiques à travers des actes concrets. De la même manière, nous protégeons notre intimité dans les actes concrets. </p> <p>Mais avec l'arrivée des technologies, les frontières physiques qui nous sont si naturelles, s'effondrent.</p> <p>En effet, l'espionnage constant de TOUS nos comportements et paroles donne accès à bien plus d'informations qu'on ne pense. Protéger son intimité dans le monde technologique ne se limite plus à mettre un mot de passe. La protéger ne se limite plus non plus à garder pour soi certaines idées que nous ne voudrions pas partager à n'importe qui (si tant est que nous ne tombions pas dans le piège de leurs outils, conçus pour nous en faire dire beaucoup).</p> <p>En effet, quand nous utilisons des technologies qui nous observent, nous pensons souvent qu'elles ne récupèrent que ce que nous y mettons. Mais en réalité, elles récupèrent SURTOUT la manière dont nous les utilisons.</p> <p>Avec toutes ces données recueillies, <strong>les entreprises construisent des modèles numériques de notre personne avec une précision dépassant tout ce que vous pouvez imaginer</strong>. Et croyez-moi, sur ces modèles, vous n'êtes pas habillé. <strong>Votre intimité y est parfaitement enregistrée.</strong> Les modèles mettent en corrélation les évènements de vos journées avec vos tempéraments du moment afin de savoir très précisément ce que vous pensez et ce que vous ressentez. Aujourd'hui, les modèles sont si précis que <strong>n'importe quelle GAFAM est capable de prédire vos actions.</strong></p> <p>Or, si votre intimité n'appartient plus uniquement à vous, peut-on toujours parler d'intimité ? <strong>L'intimité désigne cet endroit où l'on est seul avec soi-même</strong>, pas seul avec les serveurs d'un quelconque GAFAM. <strong>En être privée, c'est être privée d'une partie de notre humanité : <em>l'intimité fait partie de notre nature humaine</em></strong>.</p> <p>Dans ce contexte, il est grand temps de protéger nos intimités et d'acquérir une maturité face à ces outils. Pour répondre à cela, deux solutions : se former et utiliser des outils respectueux de l'être humain !</p> /article/2022-05-11_N'avez-vous%20rien%20%C3%A0%20cacher/ Wed, 11 May 2022 00:00:00 +0200 Addiction aux écrans /article/2022-05-27_Addiction%20aux%20%C3%A9crans/ Les écrans façonnent notre quotidien de manière insoupçonnée. Découvrez comment les GAFAM exploitent nos mécanismes de récompense pour capter notre attention et altérer notre jugement. Une lecture essentielle dans le but de reprendre le contrôle et utiliser les outils numériques de manière avertie et responsable. <p>De nombreuses études tentent de montrer les conséquences des écrans sur l’homme. D'un côté, il y a ceux qui montrent des <strong>effets destructeurs</strong> (Dr Kardaras a montré une réduction du cortex frontal, ce qui réduirait nos capacités à prendre de bonnes décisions). De l'autre, ceux qui montrent des <strong>effets bénéfiques</strong> que les jeux vidéos pourraient développer. Dans cette apparente contradiction, il est raisonnable de penser que <strong>cela dépend de l'usage qu'on en fait</strong>. Il est tout à fait concevable qu'une personne jouant à un jeu d’orientation développe ses capacités à se repérer là où une personne utilisant son GPS au moindre déplacement, les réduirait. On peut donc distinguer deux manières d'utiliser les outils informatiques : une <strong>manière passive</strong>, où nous suivons juste ce qui s'affiche à l'écran. Et une <strong>manière constructive</strong>, où nous prenons le temps de maîtriser l'environnement qui évolue à nos yeux.</p> <p>Mais, objectivement, comment et pourquoi utilise-t-on autant nos écrans ? Google, YouTube, Facebook, Instagram et Twitter sont dans la liste des sites les plus visités de France. Or les GAFAM* ont parfaitement compris qu’en fonction de la manière dont vous utilisez leurs outils, ils peuvent modifier votre cerveau.</p> <p>À ce titre, ces entreprises recrutent des "magiciens". En effet, cette profession est la première à avoir compris le fonctionnement du cerveau. Les illusionnistes maîtrisent parfaitement l'art de modifier votre jugement pour vous faire voir un événement qui ne s'est pas réalisé. Avec les mêmes techniques, les réseaux sociaux savent très bien comment <strong>détourner vos biais cognitifs pour vous rendre passif devant votre écran</strong>.</p> <p>Tristan Harris, illusionniste, a dévoilé qu'il concevait les outils pour Google <strong>dans le seul but de captiver votre attention</strong>.</p> <p>L'un des moyens le plus connu est le <strong>scroll infini</strong> d'Instagram, capable de vous faire passer plusieurs dizaines de minutes à répéter le même mouvement de doigt. Mais pire encore, le <strong>système de notification</strong> sur nos téléphones : de l'encadré surgissant dès l'arrivée d'un message, à la petite LED qui se met à clignoter même en mode "ne pas déranger", en passant par la vibration dans la poche... Tout est là pour vous captiver. Ces interfaces sont construites dans <strong>le but de libérer une charge de dopamine</strong> dans votre corps. La dopamine est l'hormone du plaisir, elle <strong>influe directement sur notre comportement</strong> notamment sur la motivation et la prise de risque. De fait, une libération trop régulière de la dopamine peut finir par dérégler ce système.</p> <p><strong>L'usage d'outils numériques n'est donc pas anodin.</strong> Ces outils atteignent à notre dignité par le fait qu'ils utilisent notre fonctionnement biologique dans le but d'atteindre un objectif que nous-mêmes ne connaissons pas. À ce titre, <strong>notre liberté est faussée</strong> par une capacité de ces entreprises à s'immiscer au cœur même de notre être pour modifier nos capacités de jugement.</p> <p>Il est donc primordial d'utiliser ces outils avec la responsabilité et les précautions qui s'imposent, c’est-à-dire de <strong>les utiliser avec une véritable maturité</strong>.</p> <blockquote> <p>« nous avons créé des outils qui détruisent le tissu social [...] Nous menons nos vies autour de cette prétendue perfection, qui nous récompense avec des signaux à court terme : des cœurs, des likes, des pouces levés [...] Des boucles fonctionnant sur la dopamine [...] Sans vous en rendre compte, vous êtes programmés »</p> </blockquote> <p><em>Chamath Palihapitiya, ancien cadre chez Facebook</em></p> /article/2022-05-27_Addiction%20aux%20%C3%A9crans/ Fri, 27 May 2022 00:00:00 +0200 Les flux de conscience /article/2022-06-03_Les%20flux%20de%20conscience/ Les réseaux sociaux et les messageries instantanées captent notre attention et modifient nos interactions. Découvrez comment ces flux de conscience numériques influencent nos relations et notre capacité à réfléchir. Comprenez les enjeux de ces nouvelles formes de communication et leurs impacts sur notre liberté et notre intelligence. Une lecture essentielle pour mieux appréhender les biais psychologiques des technologies. <p>Nous savons que les réseaux sociaux cherchent à capter au maximum notre attention. Analysons le cas des messageries instantanées qui nous poussent tous les jours à réagir aux notifications qu'elles provoquent. Comment peut-on en arriver à mesurer, sur la base de la vitesse de réaction, le lien qui nous unit à nos amis ? Aux dépens même de l'affection qu'ils montrent en réel... <strong>La forme de ces conversations instantanées donne naissance à ce qu’on appelle le flux de conscience.</strong></p> <p>Qu'est-ce qu'un flux de conscience ? C'est une <strong>conversation qui a la forme d'un rouleau sans fin</strong> que l’on déroule au fur et à mesure que l’on pense <strong>sans trop savoir où l’on va</strong>. Il n’y a plus de barrière au partage, plus d’anticipation. <strong>Le message est envoyé avant même que son expéditeur ait pu réfléchir</strong> à ce qu’il écrit. « Je passe justement dans ta rue ça te dit de boire un verre » « Oups oublie j’avais oublié que j’avais un rendez-vous » « Ce sera pour une autre fois ce serait chouette de se voir » « Au fait j’espère que tu vas bien ».</p> <p><strong>Ce qui se cache derrière chacun de ces messages, c'est la triste attente d'une validation externe.</strong> Validations qui <strong>prennent la forme d'une autre suite de messages, d'une réaction</strong> (un simple émoticône ou un gif), ou de <strong>moyens spécialement mis en place</strong>. Nous pouvons penser aux <strong>flammes de snapchat</strong> qui vous imposent d'envoyer au moins un message par jour. Ou encore <strong>la pastille qui indique que le message a été lu</strong>. D’ailleurs, certains vont jusqu'à consulter les messages depuis la zone de notification, pour éviter de les marquer "comme lu", sinon ils se sentiraient obligés de répondre.</p> <p>La différence entre ces conversations numériques et les conversations réelles est qu'<strong>il n'est pas possible de les clôturer</strong>. Dans toutes les cultures, la fin d’une conversation, orale ou écrite, est marquée par un protocole social de clôture : « Salutations distinguées ! », « Je dois vraiment y aller, a+ », « Ce fut un plaisir ». <strong>L’utilité de ces formules est fondamentale pour permettre à chaque participant de passer à autre chose</strong>, de changer de contexte. Malheureusement, ces clôtures sont généralement inexistantes dans les groupes de discussion. <strong>Les discussions instantanées deviennent omniprésentes.</strong> Les notifications vous sautent aux yeux alors que vous saisissez votre téléphone pour regarder autre chose.</p> <p><strong>À force, nous perdons la conscience et la mémoire.</strong> Nous les délocalisons toutes les deux vers les serveurs des GAFAM qui ont pour but de capter notre attention !</p> <p><strong>Ces formes de conversations ne forgent pas l'intelligence ni la volonté.</strong> Or l'homme sans intelligence ni volonté <strong>retourne à l'état d'animal</strong>. Si le choix n’était qu’individuel, cela ne prêterait pas tellement à conséquence. Mais <strong>le choix est global, sociétal</strong>.</p> <p>Les solutions pour ne pas être piégé dans ces messageries, hormis de ne pas en avoir, consiste à <strong>apprendre à les utiliser avec précaution (prudence) et maturité</strong>. Il peut être intéressant dans ce contexte de reconsidérer la place des mails et des lettres, qui ont cet avantage de respecter la conscience de chacun. Car, <strong>si nous perdons notre conscience</strong>, notre mémoire et que nous brisons les espaces de réflexion, <strong>d’où viendront les prochaines grandes idées</strong>, celles qui nous porteront tous ? <strong>Comment resterons-nous libres</strong> face aux défis de demain ?</p> /article/2022-06-03_Les%20flux%20de%20conscience/ Fri, 03 Jun 2022 00:00:00 +0200 Abrutissement des comportements /article/2022-06-10_Abrutissement%20des%20comportements/ Les messageries instantanées poussent à un déversement continu de pensées, créant des conversations désordonnées et impulsives. Sans début ni fin, ces échanges rendent difficile la distinction entre l'important et l'accessoire. Les messages sont envoyés sous le coup de l'émotion, affectant notre manière d'écrire et privilégiant les émotions aux idées. Les émoticônes remplacent les mots, simplifiant encore plus l'expression des sentiments. Cette dynamique va à l'encontre des vertus de tempérance et de prudence, entraînant une perte de réflexion et de respect de l'intimité. Les réseaux sociaux accentuent ce phénomène en nous servant du contenu prédéfini, réduisant notre capacité à chercher et à raisonner par nous-mêmes. <p>Les messageries instantanées nous poussent à nous livrer de manière continue au travers des flux de conscience. Le problème qui en résulte est que <strong>ces conversations écrites ne sont plus structurées</strong>. Les conversations sont sans queue ni tête, et nous y déversons ce flux de conscience que nous avons. Quel est le problème à cela ?</p> <p>L'un des points fondamentaux est qu'il n'y a plus de début ni de fin dans ces conversations. De ce fait, <strong>nous perdons cette capacité à distinguer ce qui est important de ce qui ne l'est pas</strong>. Dans une conversation normale, le dernier moment pour échanger de l’information critique est au seuil de la porte, après c'est trop tard. Dans le cadre des messageries instantanées, tout devient important, tout devient urgent, et <strong>tout finit par être fait sous le coup de l'impulsion</strong>.</p> <p>C'est dans cette logique que nos conversations se font par séries de messages. En effet, <strong>ce qui est urgent n'est plus seulement l'information à transmettre que ce besoin d'évacuer une émotion sur le moment</strong>. On se met donc à écrire frénétiquement sur le clavier qui s'affiche, puis avant même d'avoir vérifié qu'on répondait à la question, le message est envoyé, puis reçu, puis lu...</p> <p>Finalement <strong>c'est notre manière d'écrire qui est affectée</strong>. Rapidement <strong>nous n'utilisons plus les mots pour ce qu'ils sont, pour le sens qui leur sont propres et justes</strong>, mais pour l’émotion qu’ils transmettent au moment de la rédaction. Nous avons perdu le goût du mot juste au profit d'un mélange gluant entre l'émotion et les lettres. Tout ça pour appuyer sur le bouton envoyer avant même de nous être relus, laissant au passage une faute tous les trois mots dans le meilleur des cas. Ce ne sont plus uniquement des idées que nous déversons dans ces messageries, <strong>ce sont des flux d'émotions</strong>. Et comme cela devenait compliqué d'envoyer des émotions à travers des mots, <strong>nous avons inventé les "émoticônes"</strong> (émotion-icône). De cette manière, <strong>il n'y a même plus à chercher les mots pour exprimer l'émotion</strong>, juste l'icône qui correspond au ressenti. Et plutôt que de l'envoyer sous forme d'un message, nous l'envoyons sous forme de "réactions".</p> <p>Il en ressort que <strong>nous allons complètement à l'encontre de la vertu de tempérance</strong>, censée nous amener à une régulation volontaire de nos pulsions de vie. <strong>Nous allons également à l'encontre de la vertu de prudence</strong> qui devrait nous pousser à choisir les mots justes et à discerner les idées qu'il est réellement nécessaire ou pas de transmettre.</p> <p>Plus qu'une simple conversation numérique, ces flux de consciences se transforment en un tas d'émotion sous couvert de <strong>"pensées" qui n'ont, à bien y regarder, plus grand-chose de consistant</strong>. À force, <strong>nous perdons notre capacité à respecter notre intimité</strong>. Nous nous dévoilons trop facilement dans ce déversement sans fin. Il est tellement plus facile de dévoiler ces sentiments à travers des réactions aux messages plutôt que d'une belle lettre bien construite, mûrit, réfléchit !</p> <p>D'un côté nous perdons notre intimité et notre volonté, de l'autre notre intelligence. <strong>Nous perdons le goût de la réflexion, de la recherche du beau, du bien et du juste.</strong> Nous préférons la réaction bête et facile, les clics sur les boutons. Il est trop compliqué de coucher un raisonnement sur papier. Au-delà des messageries instantanées, que dire de ces réseaux sociaux qui <strong>nous servent le contenu qu'ils veulent que nous voyions sur un plateau, plutôt que de nous laisser chercher nous-même ce dont on a réellement besoin</strong>.</p> /article/2022-06-10_Abrutissement%20des%20comportements/ Fri, 10 Jun 2022 00:00:00 +0200 Des réseaux sociaux au marxisme /article/2022-06-15_Des%20r%C3%A9seaux%20sociaux%20au%20marxisme/ Les réseaux sociaux et les messageries instantanées transforment nos habitudes de communication, souvent au détriment de notre réflexion et de notre intimité. Ces outils, conçus pour capter notre attention, nous poussent à réagir impulsivement, perdant ainsi notre capacité à structurer nos pensées et à respecter notre vie privée. Cette dynamique, proche de la philosophie marxiste, privilégie l'émotion sur la raison. Pour retrouver une utilisation équilibrée et consciente de ces technologies, il est crucial de commencer par comprendre les biais idéologiques de ces outils. <p style="float:left;margin-right:10px"><img alt="image de Mark Zuckerberg et Karl Marx" src="/article/2022-06-15_Des%20r%C3%A9seaux%20sociaux%20au%20marxisme//icon.webp" /></p> <p><strong>Les réseaux sociaux sont entrés pour beaucoup d’entre nous dans nos vies quotidiennes. Cependant, avons-nous tous bien conscience des ressorts idéologiques et des tournures d’esprit que ces mêmes réseaux nous font prendre ? Avons-nous tous bien conscience que leurs formes peuvent modifier notre manière de communiquer et de réfléchir ?</strong></p> <p>C’est ce qui va être développé ici afin de mettre en lumière certains aspects des réseaux sociaux et plus particulièrement des messageries instantanées. Le but n’est pas de vous dire d’arrêter d’utiliser toute forme de communication correspondant à ce qui est dénoncé, mais d’éclairer sur l’usage qui en est fait et ainsi vous donner des moyens de les utiliser de manière plus juste et mesurée.</p> <p>En lisant cet article, vous devriez comprendre comment la plupart des personnes préfèrent regarder des vidéos Youtube ou Tiktok, des images sur Instagram, et discuter via Facebook, plutôt que de lire des articles construits qui déroule un raisonnement complet. <strong>Pourquoi n’est-il plus dans nos habitudes de prendre le temps de lire les réflexions pour comprendre les enjeux du monde, alors même que l’urgence est de défendre nos idées ?</strong><span style="font-weight: normal;"> Combien iront jusqu’au bout de cet article…</span></p> <h2>Les flux de conscience</h2> <p>Nous savons que les réseaux sociaux cherchent à capter au maximum notre attention¹. Dans cette optique, analysons le fonctionnement des messageries instantanées qui nous poussent tous les jours à réagir aux notifications qu'elles provoquent. Comment en est-on arrivé à mesurer sur la base de la vitesse de réaction le lien qui nous unit à nos amis ? Parfois même aux dépens de l'affection qu'il montre en réel…</p> <p>La forme que prennent les conversations instantanées donne naissance à ce qu’on appelle le flux de conscience.</p> <p><strong>Qu'est-ce qu'un flux de conscience ?</strong></p> <p><strong>C'est une conversation qui a la forme d'un rouleau sans fin</strong> que l’on déroule au fur et à mesure que l’on pense <strong>sans trop savoir où l’on va</strong>. Il n’y a plus de barrière au partage, plus d’anticipation. Le message est envoyé avant même que son expéditeur ait pu réfléchir à ce qu’il écrit. « Je passe justement dans ta rue, ça te dit de boire un verre ? » « Oups, oublie, j’avais oublié que j’avais un rendez-vous » « Ce sera pour une autre fois, ce serait chouette de se voir » « Au fait, j’espère que tu vas bien ».</p> <p><strong>Ce qui se cache derrière chacun de ces messages, c'est la triste attente d'une validation externe.</strong> Validations qui peuvent prendre la forme d'un message de réponse (c’est la forme la plus légitime, mais parfois non nécessaire), d'<strong>une réaction</strong> (un simple émoticône), ou de moyens spécialement mis en place. Nous pouvons penser aux <strong>flammes de snapchat</strong> qui vous imposent d'envoyer au moins un message par jour à vos contacts. Ou encore, <strong>la pastille qui indique que le message a été lu</strong>, qui de fait vous impose de répondre rapidement, car ne pas répondre est souvent perçu comme grossier. Certains vont jusqu'à consulter les messages depuis la zone de notification, pour éviter de les marquer « comme lu ». Une manière de gagner un peu de temps avant d’être forcé de répondre.</p> <p>La différence entre ces conversations numériques par rapport aux conversations réelles est qu'<strong>il n'est pas possible de les clôturer</strong>. Dans toutes les cultures, la fin d’une conversation, orale ou écrite, est marquée par un protocole social de clôture : « Salutations distinguées ! », « Je dois vraiment y aller, a+ », « Ce fut un plaisir ». L’utilité de ces formules est <strong>fondamentale pour permettre à chaque participant de passer à autre chose</strong>, de changer de contexte. C’est également le dernier moment pour échanger de l’information critique.</p> <p>Malheureusement, ces clôtures sont généralement inexistantes dans les groupes de discussion. <strong>Les discussions instantanées sont omniprésentes</strong><span style="font-weight: normal;">.</span> Les notifications vous sautent aux yeux alors que vous saisissez votre téléphone pour regarder autre chose. Même en silencieux, la plupart des téléphones s’allument et illuminent la pièce lors de la réception d’un message. Une fois que le cerveau a vu qu’il y avait un message, impossible d’y échapper, de ne pas être distrait au moins quelques secondes.</p> <p><strong>Nous perdons la conscience et la mémoire</strong>. Nous les avons délocalisées toutes les deux vers les serveurs de grandes sociétés informatiques qui ont pour but de capter notre attention !</p> <p>Autour de nous, nous observons des gens courbés sur leur téléphone dans la rue, dans les maisons, dans les familles. Leurs doigts tapotent des messages alors qu’ils marchent sur le trottoir, qu’ils mangent, qu’ils tiennent leurs enfants par la main. Parfois, ils tiennent le téléphone horizontal face à leur bouche pour enregistrer un message audio qui ne sera pas toujours écouté. Au lieu de regarder le coucher de soleil, ils le prennent en photo et l’envoient aussitôt pour le commenter avec d’autres, ou partagent le selfie d’un moment en famille. Comme si un moment non partagé en ligne n’existait plus. <strong>Comme si le souvenir biologique seul ne suffisait plus</strong>.</p> <p>Toute notre vie est d’un côté partagée involontairement vers les GAFAM qui analysent toutes nos interactions pour nous mesurer avec perfection². De l’autre, <strong>lancé dans le flux de la conversation, nous partageons volontairement des informations, parfois aux dépens mêmes de notre intimité</strong><span style="font-weight: normal;">.</span> Nous partageons tout en oubliant de nous respecter nous-même.</p> <p><br> <br> Toutes <strong>ces conversations et partages incessants ne forgent pas l'intelligence et la volonté</strong>. Or l'homme sans intelligence ni volonté <strong>retourne à l'état d'animal</strong>. Dans l’histoire humaine, les intellectuels baignaient dans ce silence mental permanent. Les sollicitations étaient l’exception. Une fois chez eux, ils n’avaient d’autres ressources que de réfléchir et consulter leur bibliothèque.</p> <p><strong>Si le choix était individuel, cela ne prêterait pas tellement à conséquence. Mais le choix est global, sociétal.</strong></p> <p>La solution pour ne pas être piégé dans ces messageries, hormis de ne pas avoir de messagerie, est de <strong>mettre son téléphone en mode avion</strong> pour s’offrir quelques heures de répit. C’est également d’<strong>utiliser ces messageries avec juste mesure</strong> : discerner ce dont le correspondant a réellement besoin de savoir. C’est aussi de <strong>paramétrer les applications pour enlever les pièges</strong> qui vous poussent au partage sans fin (désactiver les pastilles qui marquent « comme lu » les messages, les indicateurs de saisies).</p> <p><strong>Car, si nous perdons notre conscience, notre mémoire et que nous brisons les espaces de réflexion, d’où viendront les prochaines grandes idées, celles qui nous porteront tous ? Comment resterons-nous libres face aux défis de demain ?</strong></p> <h2>L’abrutissement des comportements</h2> <p>Les messageries instantanées nous poussent à nous livrer de manière continue au travers des flux de conscience. Le problème qui en résulte est que <strong>ces conversations écrites ne sont plus structurées</strong>. Les conversations sont sans queue ni tête, et nous y déversons ce flux de conscience que nous avons. Quel est le problème à cela ?</p> <p>L'un des points de départ est qu'il n'y a plus de début ni de fin dans ces conversations. De ce fait, <strong>nous perdons cette capacité à distinguer ce qui est important de ce qui ne l'est pas</strong>. Dans une conversation normale, le dernier moment pour échanger de l’information critique est au seuil de la porte, après, c'est trop tard, nous passons à autre chose. Dans le cadre des messageries instantanées, tout devient important, tout devient urgent, <strong>et tout finit par être fait sous le coup de l'impulsion</strong>.</p> <p>C'est dans cette logique que nos conversations se font par séries de messages. En effet, <strong>ce qui est urgent n'est plus seulement l'information à transmettre mais ce besoin d'évacuer une émotion sur le moment</strong>. On se met donc à écrire frénétiquement sur le clavier qui s'affiche, puis avant même d'avoir vérifié qu'on répondait à la question, le message est envoyé, puis reçu, puis lu…</p> <p><span style="font-weight: normal;">Finalement, c'est notre manière d'écrire qui est affectée.</span> Rapidement, nous <strong>n'utilisons plus les mots pour ce qu'ils sont, pour le sens qui leur sont propres et justes, mais dans la précipitation de l'émotion au moment de la rédaction</strong>. Nous avons perdu le goût du mot juste au profit d'un mélange gluant entre l'émotion et les lettres. Tout ça pour appuyer sur le bouton envoyer avant même de nous être relus, laissant au passage une faute tous les trois mots dans le meilleur des cas.</p> <p>Ce ne sont plus uniquement des idées que nous déversons dans ces messageries, <strong>ce sont des flux d'émotions</strong>.</p> <p>Et comme cela devenait compliqué de mettre des mots sur les émotions, <strong>nous avons inventé les « émoticônes »</strong> (émotion-icône). De cette manière, <strong>il n'y a même plus à chercher les mots pour exprimer l'émotion</strong>, juste l'icône qui correspond le plus au ressenti. Et plutôt que de l'envoyer sous forme d'un message, nous l'envoyons sous forme d’une « réaction » en oubliant même parfois de répondre à la question qui était posée.</p> <p><br> <br> Plus que de simples conversations numériques, ces flux de consciences se transforment en un tas d'émotion sous couvert de <strong>« pensées » qui n'ont, à bien y regarder, plus grand-chose de consistant</strong>.</p> <p>À force, <strong>nous perdons notre capacité à respecter notre intimité</strong>. Nous nous dévoilons trop facilement dans ce déversement sans fin. Il est tellement plus facile de dévoiler ces sentiments à travers des réactions aux messages plutôt que d'une belle lettre bien construite, mûrie, réfléchie !</p> <p><strong>Nous préférons la réaction bête et facile</strong>, il est trop compliqué de coucher un raisonnement constructif sur papier. <strong>Nous préférons cliquer sur les boutons qui s’affichent plutôt que de réfléchir au but que nous voulons atteindre</strong>. <span style="font-weight: normal;">Microsoft a déployé beaucoup d’effort pour rendre Windows inutilisable sans la souris</span>, plutôt que de laisser les raccourcis clavier qui existaient. Il est en effet plus excitant pour le cerveau de bouger la souris jusqu’à la cible visée. <strong>Et que dire des réseaux sociaux qui nous servent sur un plateau le contenu</strong> qu'ils veulent que nous voyions, plutôt que de nous laisser chercher ce dont on a réellement besoin. <strong>Ce n’est plus « chercher et vous trouverez », mais « trouver et vous ne chercherez pas »</strong><span style="font-weight: normal;">.</span></p> <p><br> <br> <strong>Nous allons complètement à l'encontre de la vertu de tempérance</strong>, censée nous amener à une régulation volontaire de nos pulsions de vie. Nous suivons impulsivement ce que les outils numériques nous disent de faire.</p> <p><strong>Nous allons également à l'encontre de la vertu de prudence</strong> qui devrait nous pousser à choisir les mots justes et à discerner les idées qu'il est réellement nécessaire ou pas de transmettre. Mais nous utilisons nos téléphones comme s’ils faisaient partie de nous-même.</p> <p>D'un côté, nous perdons notre intimité et notre volonté, de l'autre notre intelligence. <strong>Nous perdons le goût de la réflexion, de la recherche du beau, du bien et du juste.</strong></p> <blockquote> <p>« <em>nous avons créé des outils qui détruisent le tissu social […] Nous menons nos vies autour de cette prétendue perfection, qui nous récompense avec des signaux à court terme : des cœurs, des likes, des pouces levés […] Des boucles fonctionnant sur la dopamine […] Sans vous en rendre compte, vous êtes programmés</em> ».</p> </blockquote> <p><em>Chamath Palihapitiya, ancien cadre chez Facebook</em></p> <h2>Réseaux sociaux et marxisme</h2> <h3>Introduction au marxisme</h3> <p>Le marxisme est une idéologie très particulière qui peut prendre de nombreuses formes. Il est donc difficile de la cerner et d'en donner une définition précise et juste.</p> <p>Le marxisme peut être introduit par cette phrase de Monseigneur Gaume : <strong>c'est la « <em>haine de tout ordre que l'homme n'a pas établi »</em></strong>. Bien que cette phrase soit incomplète, elle n’en contient pas moins l’essentiel. Richard Dupuy, franc-maçon, disait : « <em>La méthode maçonnique, c’est la remise en cause perpétuelle de ce qui est acquis</em> ». Or, nous savons que la franc-maçonnerie a une dévotion particulière à l’idéologie humaniste, que le marxisme chéri tant. Quant à Jaurès, il disait : <strong>« <em>Ce qu’il faut sauvegarder avant tout, […] c’est cette idée qu’il n’y a pas de vérité sacrée</em> ».</strong></p> <p><strong>Dans une telle philosophie, il devient alors essentiel de dissoudre tout ce qui peut être substance de vérité et d'ordre objectif. Ainsi le marxisme ne retient plus que l'aspect évolutif des choses.</strong></p> <p>La philosophie traditionnelle catholique donne la vérité comme étant immuable, et les choses ont un sens qui n'est pas modifiable. Oui est oui, non est non. Il existe donc le bien et le mal, les choses bonnes et les choses mauvaises, et l'un n'est pas l'autre.</p> <p>Dans le marxisme, ces évidences disparaissent pour une philosophie qui n’a aucun encrage. Par exemple, pour trancher sans porter le moindre jugement de valeur (valeur qui n’existe donc pas), une phrase telle que « vous n'êtes pas de votre temps » permet au marxiste de désapprouver quelque chose.</p> <p><br> <br> <strong>Dès lors, la vérité n'est plus : elle se fait.</strong> Combien croient encore à une vérité immuable, qui ne change pas ?</p> <p>Ainsi, faisant abstraction de tout ce qui est érigé et de tout ce qui est, <strong>le marxisme devient une philosophie où toute chose prend sens dans l'action : le mouvement</strong>. Sans "être" antécédent, et sans "être" pour terme, qui pourrait au moins permettre de juger ce mouvement. Bergson lui-même disait : « <em>Il n’y a pas de choses, il n’y a que des actions</em> ». Or saint Thomas d’Aquin a repris d’Aristote cette définition du mouvement : <strong>« être en mouvement, c'est tout ensemble être et n'être pas »</strong>. Le marxisme est donc à l'exact opposé de : « que ton oui soit oui, que ton non soit non ».</p> <p><strong>Le vrai marxiste est ainsi un homme qui ne croit à la vérité de rien, mais qu’intéressent uniquement la force, la transformation, la mise en œuvre de tout.</strong></p> <p>À ce titre, <strong>cette philosophie accueille la contradiction, et y prend même goût.</strong> Minkowski écrivit : « <em>Notre existence, en ce qu’elle a de mouvant et de vivant en elle, est traversée d’antonymies non-antonymiques, de contradictions non-contradictoires, d’oppositions non-oppositionnelles…</em> ». Nous comprenons ici pourquoi certains groupes arrivent à défendre les droits de la femme en même temps que l’islam.</p> <p><br> <br> <span style="font-weight: normal;">Dans le marxisme, </span><strong>les idées ne sont alors plus jugées par rapport à l'être qu’elles désignent</strong><span style="font-weight: normal;">,mais plutôt à l’expression plus ou moins spontanée de celui qui l'exprime,</span> ou au flux passionnel qu'elles peuvent déclencher et entretenir.</p> <p><strong>On ne parle plus aux intelligences, on parle aux tripes. On ne cherche pas à éclairer les esprits, on cherche à les « remuer ».</strong></p> <p>Et <strong>les mots eux-mêmes ne sont plus utilisés pour le sens qu'ils portent, mais pour la force qu'ils dégagent</strong> : une sorte de sens dynamique, non littéral.</p> <p><br></p> <h3>Réseaux sociaux et marxisme</h3> <p>Le lien entre les réseaux sociaux et le marxisme devient évident à ce stade.</p> <p>Les <strong>réseaux sociaux ont mis en place de nombreux moyens qui nous font nous exprimer par les émotions, plutôt que par des idées construites</strong> comme sur les lettres manuscrites par exemple. Les émoticônes, les limites à 500 caractères, les flux sans fins, les flammes, les réactions, les « j’aime », et tous les autres éléments qui aident à compléter chaque jour les modèles numériques qu'ils ont de nous, sont également un reflet d’une idéologie marxiste.</p> <p><strong>Le problème est qu'implicitement au moins nous tombons dans la façon de penser et de faire du marxisme</strong>. Sans maîtrise et conscience de ce que nous faisons avec ces outils numériques, le risque est, à long terme, de se laisser influencer par cette philosophie pourtant contraire à notre pensée. Il est donc capital d’utiliser les technologies avec précaution et juste mesure afin de ne pas tomber dans leurs travers idéologiques.</p> <blockquote> <p>« <em>L’effarent est qu’implicitement au moins, le tour d’esprit, la façon de penser d’un très grand nombre réalise ce que le marxisme se contente d’expliciter et de systématiser</em> »</p> </blockquote> <p><em>Jean Ousset, Marxisme et Révolution</em></p> <h2>Conclusion</h2> <p>Nous devons changer notre façon d’utiliser les messageries numériques. <strong>Il est nécessaire que nous prenions conscience des mécanismes qui se trouvent derrière ce qui s’affiche à nos écrans</strong>.</p> <p>Nous pouvons utiliser la technologie sous le coup des impulsions, ou les utiliser de manière vertueuse. C’est donc à nous de choisir ce que nous en faisons.</p> <p>Même si je ne dis pas que les messageries ont été conçues consciemment pour être marxiste, ce sont au moins les conséquences que nous observons. Nous avons ainsi notre part de responsabilité dans ce que nous en faisons.</p> <p>Il est également important d’<strong>utiliser les moyens appropriés au but que nous recherchons. Les réseaux sociaux ne sont PAS faits pour suivre l’actualité !</strong> Car ils ne sont pas faits pour y mettre des articles constructifs (nous pouvons préférer le flux RSS³).</p> <p><strong>De même les messageries doivent être configurées en fonction du besoin réel</strong>. Les indicateurs de lecture et saisie ne sont pas indispensables. Les notifications peuvent être réduites au minimum nécessaire.</p> <p><strong>Ce qui est dénoncé pour les messageries instantanées est également vrai pour la plupart des réseaux sociaux</strong>. Lorsque nous écrivons une réponse, sachons la faire en un seul message complet plutôt qu’une série qui tente de se compléter. Prenons le temps d’écrire avec des mots justes. Nous pouvons aussi vérifier que nous n’en disons pas trop, pas plus que nécessaire (est-il vraiment nécessaire que mon ami sache que je prends un apéritif dans le jardin en ce moment ? Cela peut-il attendre la prochaine fois que je le verrai ?).</p> <p><span style="font-weight: normal;">Et enfin, </span><strong>sachons retrouver le goût de faire travailler nos intelligences</strong>. Il n’a jamais été aussi facile d’accéder à autant de connaissances. Prenons le temps de lire les articles en entier pour en comprendre le sens, ce qui y est expliqué. Dépassons ce stade des 500 caractères sous une image ou d’une vidéo de quelques secondes. <strong>À ce stade, ce n’est plus de l’information, c’est de la manipulation volontaire.</strong></p> <p><strong>Gardons à l’esprit que les technologies sont un outil avant d’être un divertissement, malgré le fait que cette limite tende à disparaître</strong><span style="font-weight: normal;">. Beaucoup de logiciels sont conçus pour être jolis et agréables à utiliser, ne les choisissez pas pour cette unique raison, mais plutôt pour leur capacité à répondre au besoin tout en vous respectant (votre vie privée et votre liberté).</span></p> <p>Bref, <strong>sachons utiliser la technologie avec maturité et responsabilité !</strong></p> <hr> <h2>Sources</h2> <ol> <li><a href="https://www.lesalonbeige.fr/addiction-aux-ecrans/">https://www.lesalonbeige.fr/addiction-aux-ecrans/</a></li> <li><a href="https://www.lesalonbeige.fr/vous-navez-rien-a-cacher/">https://www.lesalonbeige.fr/vous-navez-rien-a-cacher/</a></li> <li><a href="https://vienumeriqueprivee.fr/suivre-lactualite-sans-compromettre-sa-vie-privee-grace-aux-flux-rss/">https://vienumeriqueprivee.fr/suivre-lactualite-sans-compromettre-sa-vie-privee-grace-aux-flux-rss/</a></li> </ol> <p><strong>Autres ressources utilisées :</strong></p> <ul> <li><a href="https://ploum.net/chapitre-4-les-messageries-instantanees/">https://ploum.net/chapitre-4-les-messageries-instantanees/</a></li> <li><a href="https://ploum.net/email-mon-amour/">https://ploum.net/email-mon-amour/</a></li> <li>« <em>Marxisme et révolution</em> », 1981, Jean Ousset</li> </ul> /article/2022-06-15_Des%20r%C3%A9seaux%20sociaux%20au%20marxisme/ Wed, 15 Jun 2022 00:00:00 +0200 Réseaux sociaux et marxisme /article/2022-06-17_R%C3%A9seaux%20sociaux%20et%20marxisme/ Découvrez comment les réseaux sociaux, avec leurs émoticônes, leurs "j'aime" et leurs flux incessants, reflètent sans le savoir une philosophie marxiste. Plutôt que de nourrir nos esprits, ces plateformes manipulent nos émotions, façonnant notre perception de la réalité. Comme le souligne Jean Ousset, nous risquons de nous conformer à une manière de penser qui nie l'immuabilité de la vérité. <p>Le marxisme est une idéologie très particulière qui peut prendre de nombreuses formes. Il est donc difficile de la cerner et d'en donner une définition précise et juste. Le marxisme peut être introduit par cette phrase de Monseigneur Gaume : <strong>c'est la "haine de tout ordre que l'homme n'a pas établi"</strong>. Dans une telle philosophie, il devient alors essentiel de <strong>dissoudre tout ce qui peut être substance de vérité</strong> et d'ordre objectif. Ainsi <strong>le marxisme ne retient plus que l'aspect évolutif</strong> des choses. La philosophie traditionnelle catholique donne la vérité comme étant immuable, et les choses ont un sens qui n'est pas modifiable. Oui est oui, non est non. Il existe donc le bien et le mal, les choses bonnes et les choses mauvaises, et l'un n'est pas l'autre. Dans le marxisme, ces évidences disparaissent pour une philosophie qui n’a aucun ancrage. Ainsi, pour trancher sans porter le moindre jugement de valeur (valeur qui n’existe donc pas), une phrase telle que "vous n'êtes pas de votre temps" permet au marxiste de désapprouver quelque chose.</p> <p><strong>Dès lors, la vérité n'est plus : elle se fait.</strong> Combien croient encore à une vérité immuable, qui ne change pas ?</p> <p>Ainsi, faisant abstraction de tout ce qui est érigé et de tout ce qui est, <strong>le marxisme devient une philosophie où toute chose prend sens dans l'action : le mouvement</strong>. Sans "être" antécédent, et sans "être" pour terme, qui pourrait au moins permettre de juger ce mouvement. Aristote disait : "<strong>être en mouvement, c'est tout ensemble être et n'être pas</strong>". Le marxisme est donc à l'exact opposé de : "que ton oui soit oui, que ton non soit non".</p> <p>Dans cette logique marxiste, <strong>les idées ne sont donc plus jugées par rapport à l'être mais plutôt à l'expression plus ou moins spontanée</strong> de celui qui s'exprime, ou au flux passionnel qu'elles peuvent déclencher et entretenir. <strong>On ne parle plus aux intelligences, on parle aux tripes.</strong> On ne cherche pas à éclairer les esprits, on cherche à les "remuer". Et <strong>les mots eux-mêmes ne sont plus utilisés pour l'être qu'ils désignent, mais pour la force qu'ils dégagent</strong> : une sorte de sens dynamique, non littéral.</p> <p>Le lien entre les réseaux sociaux et le marxisme devient évident à ce stade. Les réseaux sociaux ont mis en place de nombreux moyens qui nous font nous exprimer par les émotions, plutôt que par des idées construites comme sur les lettres manuscrites par exemple. Les émoticônes, les limites à 500 caractères, les flux sans fin, les flammes, les "j'aime", et tous les autres éléments qui aident à compléter chaque jour les modèles numériques qu'ils ont de nous, sont également un reflet d’une idéologie marxiste. <strong>Le problème est qu'implicitement au moins nous tombons dans la façon de penser et de faire du marxisme.</strong> Sans maîtrise et conscience de ce que nous faisons avec ces outils numériques, le risque est, à long terme, de se laisser influencer par cette philosophie pourtant contraire à notre pensée. Il est donc capital d’utiliser les technologies avec précaution et juste mesure afin de ne pas tomber dans leurs travers idéologiques.</p> <blockquote> <p>« L’effarant est qu’implicitement au moins, le tour d’esprit, la façon de penser d’un très grand nombre réalise ce que le marxisme se contente d’expliciter et de systématiser » Jean Ousset</p> </blockquote> /article/2022-06-17_R%C3%A9seaux%20sociaux%20et%20marxisme/ Fri, 17 Jun 2022 00:00:00 +0200 Évolution de la machine /article/2022-06-24_%C3%89volution%20de%20la%20machine/ L'évolution des machines, de la Rome antique à nos jours, est une histoire captivante. Des premières grues aux machines à tisser et calculateurs, ces inventions ont transformé notre quotidien. Les cartes perforées et les algorithmes ont joué un rôle crucial dans la création de machines de plus en plus complexes et configurables. Cette analyse vous permettra de mieux comprendre les avancées technologiques qui ont façonné notre monde moderne des ordinateurs. <p>Sur Wikipédia, la machine est définie comme étant un produit fini mécanique capable d'utiliser une source d'énergie pour <strong>effectuer par elle-même, sous la conduite ou non d'un opérateur, une ou plusieurs tâches spécifiques</strong>.</p> <p>Le terme « machine » prend source au temps de la Rome antique où des grues « mecane » étaient utilisées, ce qui donnera plus tard le mot « machina », puis « machine ».</p> <p>Les premières machines ont donc été conçues pour nous aider à <strong>réaliser des tâches humainement lourdes ou complexes</strong>. Cela pouvait être des leviers pour porter de grosses charges, ou des pressoirs pour faire du vin par exemple...</p> <p>Petit à petit, <strong>les machines se sont complexifiées pour faire des tâches de plus en plus précises, mais aussi pour être plus configurables</strong>.</p> <p>C'est typiquement l'évolution qu'a suivie la machine à tisser, pionnière dans ce domaine. Nous sommes passés d'une machine à tisser qui fabriquait un tissu simple, à des machines à tisser qui étaient capable de dessiner un motif, puis dans les années 1750, à des machines à tisser dont on indiquait les motifs à dessiner à l'aide de cartes perforées. Remarquez ici que l'<strong>on introduit une notion de "données" car l'homme enregistre les informations nécessaires pour la reproduction du motif sur un support</strong> : la carte perforée. La machine regardera comment son disposer les trous pour adapter son mouvement par la suite.</p> <p>Mais la machine à tisser bien que configurable ne pouvait que tisser. Une voiture ne pouvait que rouler. Et une calculatrice (1650) ne pouvait faire que des additions et des soustractions.</p> <p>Or l'homme cherchait mieux que ces machines. Il cherchait à créer une machine générale, qui puisse résoudre tous les problèmes. Plus précisément, <strong>le but était d'avoir une machine qui puisse résoudre un problème en lui indiquant la suite d'actions à suivre</strong> (via carte perforée notamment), <strong>c’est-à-dire suivre un algorithme</strong>. Mais aucune machine n’était alors capable de faire fonctionner des algorithmes.</p> <p>Malgré la magnifique évolution des machines à calculer qui, dans les années 1915 (machine alors électromécanique), étaient déjà capables de faire des statistiques sur de grands nombres de données, leurs fonctions restaient définies au moment de la conception de ces machines. <strong>Une fois la machine démarrée, elle suivait immanquablement l'enchaînement électrique et mécanique qui était définis à sa conception.</strong></p> <p>Un seul s'est distingué à cette époque : Charles Babbage (1791-1871). Il travailla une bonne partie de sa vie à concevoir ce qui est aujourd'hui l'<strong>ancêtre de l'ordinateur : une machine mécanique dont les instructions allaient être données au fur et à mesure de leur exécution</strong> sur des cartes perforées. Il avait donc prévu une zone dédiée aux calculs, des lecteurs de cartes perforées pour faire entrer des données et des instructions (qui indiquent ce qu’il faut faire avec les données), et une imprimante pour afficher les résultats. Il ne put malheureusement jamais la terminer de son vivant. Son fils en termina une version partielle dans les années 1920. Et elle fut complètement terminée pour la première fois en 2002...</p> <p>La maîtrise grandissante de l’électricité à cette époque révolutionna la conception des machines en mêlant pièces mécaniques et courant électrique, notamment grâce aux inventions de Nikola Tesla. Rapidement <strong>les mouvements mécaniques des machines à calculer furent remplacés par des courants électriques</strong>. Les travaux sur les ordinateurs prirent aussi cette direction, <strong>jusqu'à devenir ce qu'elles sont aujourd'hui : des machines électroniques</strong>.</p> <p>Ce qu'il faut retenir de ces nouvelles machines et de la révolution qu’elles apportent, c'est que <strong>leurs fonctions ne sont plus uniquement définies par leurs propriétés physiques, mais elles sont définies par deux choses : leur conception physique</strong> (électronique), <strong>et les données</strong> (les 0 et les 1 enregistrés sur des supports physiques : cartes perforées à l’époque, disque dur aujourd’hui).</p> /article/2022-06-24_%C3%89volution%20de%20la%20machine/ Fri, 24 Jun 2022 00:00:00 +0200 Fonctionnement de l’ordinateur /article/2022-06-29_Fonctionnement%20de%20l%E2%80%99ordinateur/ L'ordinateur, machine à calculer par excellence, manipule des suites de 0 et 1 pour exécuter des instructions. Composé d'un processeur pour les calculs, d'une mémoire de masse pour stocker les données et d'un système d'exploitation pour gérer les ressources, il permet une interaction fluide via des périphériques comme le clavier et la souris. Une harmonie parfaite entre matériel et logiciel pour une machine optimale, véritable chef-d'oeuvre des machines que l'homme a construit. <p>Comme évoqué la dernière fois, un ordinateur suit un fonctionnement décrit par ses propriétés physiques et les informations que sont les instructions que doit exécuter le matériel. L'ordinateur est avant tout une <strong>machine à faire des calculs</strong>. Elle passe sa vie à prendre des données qui sont une suite de 0 et 1 (ce sont les données entrantes), et en fonction des opérations qui doivent être appliquées à ces données (les instructions), elle va modifier l'ordre de ces 0 et 1 pour fournir un résultat. D'où le terme "ordinateur", <strong>du latin "ordinator" : mettre en ordre</strong>.</p> <p>Commençons par les <strong>propriétés matérielles de l’ordinateur</strong> :</p> <ul> <li>L’ordinateur est composé d’une <strong>zone de calcul</strong> : c’est le processeur et/ou carte graphique. Cette zone prend des données et y applique des calculs en suivant une liste d’instruction.</li> <li>Il faut aussi une <strong>zone où sont stockées les instructions</strong> (car elles sont des données) : c’est la mémoire de masse (disque dur, ssd). La plupart du temps, nous utilisons le même disque dur pour enregistrer nos données (fichiers/images/vidéos/etc.).</li> <li>Enfin, il faut des <strong>périphériques</strong> afin que l’homme puisse interagir avec le matériel (clavier, souris, écran, clé USB, etc).</li> </ul> <p>Maintenant, <strong>décrivons logiciellement l’ordinateur</strong> : Comment faire marcher un logiciel sur un tel matériel ? Étant donné la diversité du matériel, et la volonté d’offrir un maximum de possibilités à la machine, <strong>il nous faut une sorte de « super-logiciel » spécialisé dans la gestion du matériel : c’est le système d’exploitation</strong>. Le système d’exploitation est le seul logiciel à être capable d’aller lire les données directement sur la mémoire de masse, de les passer au processeur pour qu’il puisse faire des calculs, et de prendre en charge les périphériques pour y produire les résultats. Grâce au système d’exploitation, <strong>les logiciels n’ont pas à gérer directement le matériel, mais ils demandent au système d’exploitation ce dont ils ont besoin</strong>. Dans le cas contraire le problème est très simple : comment faire fonctionner deux logiciels en même temps sans qu’ils ne se marchent sur les pieds ? <strong>Le système d’exploitation gère donc les ressources matérielles dont chaque logiciel a besoin de manière cohérente et harmonieuse.</strong></p> <h2>Schéma explicatif</h2> <p><img alt="schéma simplifié du fonctionnement d'un ordinateur" src="/article/2022-06-29_Fonctionnement%20de%20l%E2%80%99ordinateur//Fonctionnement de l’ordinateur.webp" /></p> <p>Quelques <strong>explications sur le schéma</strong> : *<strong>Mémoire RAM :</strong> il s’agit d’une mémoire qui permet « juste » d’<strong>accélérer considérablement l’ordinateur</strong>. Elle joue le rôle d’intermédiaire entre le processeur et la mémoire de masse où se trouvent les données à calculer. Sans RAM, déplacer la souris d’un bout à l’autre de l’écran prendrait plusieurs minutes.</p> <p><strong>Démarrage de l’ordinateur :</strong> La mémoire de masse est matérielle, elle est donc gérée par le système d’exploitation, qui est lui-même sur cette mémoire. Pour démarrer l’ordinateur, <strong>il est donc nécessaire de passer par des systèmes intermédiaires</strong> capable de lire la mémoire de masse et donc le système d’exploitation, puis de lui passer la main sur le matériel. Ce système intermédiaire va simplement <strong>copier le système d’exploitation depuis la mémoire de masse vers la RAM</strong> avant de l’exécuter en lui laissant le contrôle du matériel. De même, <strong>lorsque vous ouvrez un logiciel, il est d’abord copié en RAM avant de s’afficher et de vous laisser l’utiliser</strong>. Ce n’est que quand vous le fermez que les modifications sont écrites sur le disque dur. <em>C’est pour cette raison qu’il faut enregistrer régulièrement vos documents écrits : si le logiciel (world/libreoffice) plante et qu’il est vidé de la mémoire RAM, vos modifications n’ont pas été écrites sur le disque dur et sont donc perdu.</em></p> /article/2022-06-29_Fonctionnement%20de%20l%E2%80%99ordinateur/ Wed, 29 Jun 2022 00:00:00 +0200 Fonctionnement des réseaux /article/2022-07-22_Fonctionnement%20des%20r%C3%A9seaux/ Découvrez comment un réseau connecte vos équipements pour échanger des informations ! Plongez dans le fonctionnement des terminaux et des équipements réseaux qui rendent possible chaque échange de données. Comprenez le rôle des adresses IP, des navigateurs et des URL dans la communication précise et efficace. <p>Qu'est-ce qu'<strong>un réseau : c'est un ensemble d'équipements reliés entre eux pour échanger des informations.</strong></p> <p>Plus concrètement, <strong>les réseaux sont mis en œuvre par plusieurs types d'équipement</strong> et de moyens de communication. - <strong>Les terminaux (ordinateurs, téléphones, etc)</strong>. Pour communiquer, ces équipements utilisent un périphérique en particulier qui leur permet d'envoyer et de recevoir les données : c'est <strong>la carte réseau</strong>. Quand le clavier permet de recevoir des données grâce à l'interaction de l'homme, la carte réseau permet de recevoir et envoyer des données par ondes ou par câble. Ces données sont donc traitées par le système d'exploitation.</p> <ul> <li><strong>Les équipements réseaux (box, etc)</strong> : ils ne servent qu’à <strong>transmettre les messages d'équipement en équipement jusqu'au destinataire final</strong>. Ces équipements communiquent entre eux via différents supports tels que des fils en cuivre, des fibres optiques, ou des ondes radio (wifi).</li> </ul> <p>Une fois que les équipements sont branchés et peuvent communiquer, nous pouvons parler de réseau. De cette manière, <strong>une box démarrée permet de mettre à disposition un réseau qui lui est propre (« réseau local »)</strong> à l'aide des prises RJ45 et de son réseau wifi. C'est-à-dire que <strong>la box donne aux équipements qui s'y connectent le moyen de communiquer entre eux</strong>. La box ne sert donc qu'à transmettre les informations d'un appareil à d'autres.</p> <p><strong>Pour distinguer chacun des appareils qui sont connectés, la box va attribuer une « adresse ip »</strong> unique à chaque appareil au moment de sa connexion. Cette adresse ip joue un peu le rôle d'adresse postale : elle permet de savoir où contacter un ordinateur en particulier. Cette adresse ip prend la forme d'une série de 4 nombres séparés par des points (bientôt une série de 8 nombres séparés par des ":").</p> <p>Par défaut, quand vous connectez un ordinateur à la box, <strong>aucune communication ne peut être établie si ce n'est l'ordinateur qui la commence. C'est un « client ».</strong> Vous pouvez donc aller sur Internet car c'est vous qui faites la demande d'accès à un site qui vous répondra ensuite, et non le site qui vous envoie les données en premier.</p> <p>Le client demande des ressources à d'autres ordinateurs qu'on appelle « serveur ». <strong>Le serveur offre un service.</strong> Il attend donc qu'un client commence à échanger pour lui donner ce qu'il demande.</p> <p><strong>Prenons un exemple très simple : partager une photo de son téléphone directement vers un ordinateur.</strong></p> <p>Pour cela, nous allons partager la photo avec l'application "Share to Computer" qui permet de donner accès à des fichiers du téléphone sur le réseau local.</p> <p>L'application "<strong>Share to Computer</strong>" va ouvrir une porte de façon à ce que d'autres équipements puissent demander au téléphone les fichiers que vous avez choisis de partager. Cette application <strong>permet à votre téléphone de devenir un serveur</strong>. Le service qui est offert est très simple : envoyer le fichier que vous avez sélectionné quand un client vous le demande.</p> <p><strong>Puisque c’est sur le réseau local, seuls les équipements connectés à la même box pourront y accéder (sauf configuration particulière de votre box).</strong></p> <p>Lorsque la photo est en cours de partage, l'application indique un url. <strong>Cet url contient tout ce qu'il faut pour qu’un client puisse contacter le serveur</strong>, et notamment l'adresse ip (juste après le "://", et avant le ":" sur l'application).</p> <p>Pour qu'un client puisse demander et récupérer ce fichier, <strong>il faut utiliser des logiciels capables d'initier la communication avec le serveur. Le plus souvent nous utilisons un « navigateur »</strong>, les plus connus étant Chrome et Firefox. L'avantage des navigateurs, c'est qu'ils sont intuitifs et faciles d'utilisation.</p> <p>Ici, <strong>vous pouvez donc saisir l'url affichée dans "Share to Computer" dans le navigateur</strong> d'un ordinateur connecté à la même box. De cette manière, une <strong>série de messages sera envoyée à la box qui, grâce à l'adresse ip, saura les transmettre au téléphone</strong>. Dans ces messages sera inscrit l'adresse ip de l'ordinateur. Grâce à cela, <strong>le serveur (ici, le téléphone) saura vous répondre</strong> en vous envoyant le fichier demandé.</p> <p>Si vous avez partagé plusieurs fichiers, le client ne recevra pas tous les fichiers, mais seulement un fichier par défaut créé automatiquement (sans que vous ne le voyiez) par l'application, et qui contient la liste des fichiers que vous avez rendus disponibles. En effet, <strong>vous devez écrire explicitement le nom du fichier voulu dans l'url, sinon le fichier par défaut vous est envoyé</strong>. Pour vous éviter de le faire à la main, nous avons inventé l'hyperlien. Il suffit donc de cliquer sur le lien pour que le navigateur demande le fichier qui lui est associé. Et puisque l'équipement qui offre le service marche comme un ordinateur, si le fichier se trouve dans un dossier, il faudra indiquer tous les noms des dossiers jusqu'au nom du fichier dans l'url si nécessaire.</p> <p>Une fois l'url entré, la communication est établie entre le client et le serveur par l'intermédiaire de la box. Vous verrez s'afficher la photo à l'écran du client.</p> <p>Tout ça pour ça...</p> <h2>Schéma simplifié</h2> <p><img alt="Schéma simplifié du fonctionnement d'un réseau local" src="/article/2022-07-22_Fonctionnement%20des%20r%C3%A9seaux//Fonctionnement des réseaux - schéma.webp" /></p> /article/2022-07-22_Fonctionnement%20des%20r%C3%A9seaux/ Fri, 22 Jul 2022 00:00:00 +0200 Fonctionnement d’internet /article/2022-08-11_Fonctionnement%20d%E2%80%99internet/ Découvrez les coulisses d'Internet et son fonctionnement décentralisé ! Plongez dans l'univers des réseaux publics et privés, des protocoles standardisés et des infrastructures complexes qui rendent possible chaque clic. Comprenez le rôle crucial des adresses IP, des box et des serveurs dans la transmission des données. <p><strong>Internet est un réseau de réseaux, décentralisé (sans entité centrale).</strong> Il est composé de millions de réseaux aussi bien publics que privés, qui peuvent eux-mêmes être regroupés en réseaux autonomes. L'information est transmise grâce à un ensemble standardisé de protocoles de transfert de données, qui permet des applications variées comme le courrier électronique, le "Web", la messagerie instantanée, etc.</p> <p><strong>Internet est donc "juste" la connexion d'un grand nombre de réseau entre eux.</strong></p> <p>Or nous savons maintenant comment fonctionne un réseau autonome tel que celui offert par une box. <strong>La différence entre un service offert sur Internet et celui offert sur le "réseau local", c'est que le serveur</strong> (ordinateur qui offre le service) <strong>est sur le réseau local de quelqu’un d’autre.</strong> Vos demandes sortent donc à l'extérieur du réseau de votre box, en passant par Internet.</p> <p>En fait, si la box ne trouve pas immédiatement le service que vous demandez sur son réseau, elle va simplement <strong>transmettre la demande à une autre box</strong>, qui fera de même. Et ce, ainsi de suite <strong>jusqu'à ce que la demande arrive à la box du destinataire</strong>, qui la transmettra au serveur, qui pourra enfin vous répondre.</p> <p>Mais, c'est très légèrement plus compliqué... <strong>Pour ne pas surcharger les réseaux, de nombreuses optimisations sont nécessaires</strong>. C'est pour cela que vous souscrivez à une offre chez un opérateur. L'<strong>opérateur gère une infrastructure complexe</strong> qui permet de transmettre le plus directement possible vos demandes aux destinataires. Ainsi vos demandes ne passent pas via des box prises au hasard, mais via un chemin très précis qui est défini par votre opérateur. Ce chemin part de la fibre/ADSL/VDSL chez vous, jusqu’à des équipements très performants de votre opérateur.</p> <h2>Schéma simplifié</h2> <p><img alt="Schéma simplifié du fonctionnement d'internet" src="/article/2022-08-11_Fonctionnement%20d%E2%80%99internet//Fonctionnement d’Internet - schéma.webp" /></p> <p>En résumé, <strong>Internet c'est l'enchaînement suivant</strong> : votre ordinateur transmet une demande à la box. Si la box ne connaît pas directement le destinataire, elle transmet la requête à votre opérateur. Votre opérateur la transmet à l'opérateur du destinataire. Son opérateur la transmet à sa box. Sa box la transmet à l'ordinateur qui offre le service. Puis le serveur émet la réponse qui fait tout le chemin inverse.</p> <p>Cependant, pour contacter un service dans l’exemple sur le réseau local, <strong>nous avions indiqué explicitement l'adresse du destinataire en donnant son "adresse ip"</strong>. De même, pour aller sur un service via Internet, nous utilisons sans nous en rendre compte ces adresses ip. <strong>Elles sont cachées derrière les "noms de domaine".</strong> Lorsqu’on va sur "wikipedia.org", en réalité, la box va convertir "wikipedia.org" en la suite de nombres "185.15.58.224" qui correspond à l'adresse ip du destinataire. Pour ce faire, <strong>elle utilise un annuaire DNS</strong> (Service de Nom de Domaine).</p> <p>Nous utilisons les noms de domaine pour 2 raisons. La première, évidente, est qu'il est trop difficile de retenir une suite de 4 nombres pour chaque service. La seconde est que cette adresse ip peut changer plus ou moins régulièrement. Contrairement à "wikipedia.org" qui ne changera pas involontairement.</p> <p>Ainsi <strong>quand nous allons sur Internet, tout se passe de la même manière que sur notre réseau local, à 2 différences près</strong> : - Au lieu de passer par un seul équipement réseau (la box), <strong>nous passons par de nombreux équipements grâce aux opérateurs</strong>. - Au lieu de contacter un service que nous mettons nous-mêmes à disposition, <strong>nous contactons un service que quelqu’un d’autre met à disposition sur son réseau local</strong>.</p> <p><em>Petite précision sur la box : la box contient une suite d’équipements réseau. Elle embarque notamment un routeur, un serveur dhcp, un switch et un pare-feu. Ce dernier empêche le public d’Internet de voir le trafic réseau qui passe chez vous. Les opérateurs se basent sur ces mêmes technologies (routeurs, switches, pare-feu, etc.) mais de manière beaucoup plus robuste et plus configurable. De fait, il est théoriquement possible de faire votre propre box à l'aide de "routeurs", "switches", etc.</em></p> /article/2022-08-11_Fonctionnement%20d%E2%80%99internet/ Thu, 11 Aug 2022 00:00:00 +0200 Qui en veut à nos données /article/2022-08-26_Qui%20en%20veut%20%C3%A0%20nos%20donn%C3%A9es/ Découvrez qui convoite vos données personnelles et pourquoi ! Entre groupes de pirates, entreprises privées et acteurs étatiques, explorez les menaces cachées derrière chaque clic. Apprenez à vous protéger efficacement et comprenez les enjeux cruciaux de la sécurité numérique. <p>Beaucoup de personnes cherchent à protéger leurs données personnelles tout en utilisant aveuglément des outils numériques. Or la question à se poser avant d'utiliser un outil "sécurisé" est : <strong>contre qui et contre quoi je veux me protéger ?</strong> Il existe 3 types d'acteurs dont on pourrait vouloir se protéger : <strong>les groupes de pirates, les entreprises privées ou des acteurs étatiques.</strong> <strong>Or ces trois acteurs ne représentent pas les mêmes formes de menace, et les réponses à apporter pour chacun sont très différentes.</strong></p> <ul> <li><strong>Les groupes de pirates</strong></li> </ul> <p>Souvent les groupes de pirates sont juste des groupes de personnes malveillantes ayant pour but de revendre vos données personnelles, vous soutirer de l'argent, <strong>chercher des contreparties</strong> ou <strong>se venger</strong>. Mais les intentions sont rarement plus profondes que cela. De fait les risques encourus par un piratage nous obligent à nous protéger de ces groupes. Nos moyens vis-à-vis d'eux vont être d'<strong>utiliser les outils numériques avec prudence et maîtrise</strong>. Et si nécessaire, d'utiliser des logiciels supplémentaires pour empêcher des intrusions malveillantes sur nos appareils.</p> <ul> <li><strong>Les entreprises privées</strong></li> </ul> <p><strong>Les entreprises ont des intérêts économiques.</strong> Pour ce faire, <strong>elles vendent des services basés sur vos données personnelles</strong>. Nous pensons bien souvent aux <strong>publicités ciblées</strong> : puisque ces entreprises vous connaissent infiniment bien, elles peuvent cibler les publicités avec précision et efficacité. De fait, <strong>le service réel qui est fourni sur ces données n'est pas la pub, mais bien le pouvoir</strong>. Car en contrôlant ce que vous voyez sur leurs plateformes, <strong>elles peuvent modifier votre manière de penser</strong> (cf "<em>Derrière nos écrans de fumée</em>"). Elles sont donc amenés à vendre des services à des états pour influencer des populations entières. De tels services ne peuvent exister qu’en accumulant un très grand nombre de données sur chaque personne. Il faut bien évidemment connaître les goûts, les préférences. Mais <strong>ce qu'ils cherchent surtout, c'est connaître vos émotions du moment</strong>, comprendre comment vous allez recevoir les informations qu'ils vont vous montrer. Se protéger de ce type de service va être beaucoup plus compliqué. <strong>Le plus simple est de ne pas les utiliser</strong>, car l'espionnage se fait dans l'usage même de leurs outils. Cependant, il existe aussi de nombreux outils pour limiter les dégâts quand nous les utilisons, par exemple en empêchant les données de remonter jusqu'à leurs serveurs, ou en brouillant leurs origines.</p> <ul> <li><strong>Les acteurs étatiques</strong></li> </ul> <p>Il faut être juste vis-à-vis de l'usage des données par l'État. En effet, <strong>il peut être légitime pour un État d'analyser ou de contrôler les données de la population</strong> dans le contexte des nouveaux conflits tels que le terrorisme et les guerres économiques. Cependant, <strong>il faut que les analyses soient strictement encadrées pour protéger la population et non la contrôler</strong>. Le glissement entre protéger et contrôler est rapide, et la frontière entre les deux est floue. Il faut donc être très prudent. Je pense qu'il y a deux éléments qui montrent quand ce glissement s'opère. Le premier peut s'observer lorsque <strong>toute la population devient présumée coupable</strong>. Par exemple, toute la population est amenée à subir les mêmes traitements de données, sans distinction de niveau de menace. Le second élément serait <strong>le conditionnement de nos vies à nos données</strong>. Par exemple, en nous bloquant automatiquement l'accès à des services ou biens sans passer par un jugement. <strong>L'État peut accéder à toutes vos données</strong>, en les demandant à des entreprises privées d’une part, ou en observant les données qui transitent sur les infrastructures du pays d’autre part. <strong>Se protéger de ce type de menace est beaucoup plus compliqué.</strong> Cela nécessitera de <strong>se protéger des 2 acteurs précédents</strong>, mais aussi d'<strong>utiliser des moyens d'anonymisation</strong>. Car les capacités d'un État à pouvoir connaître les données sont puissantes et très précises.</p> /article/2022-08-26_Qui%20en%20veut%20%C3%A0%20nos%20donn%C3%A9es/ Fri, 26 Aug 2022 00:00:00 +0200 Rachat de Twitter par Elon Musk /article/2022-10-29_Rachat%20de%20Twitter%20par%20Elon%20Musk/ Découvrez les véritables enjeux derrière le rachat de Twitter par Elon Musk ! Au-delà des débats publics et des cris de victoire, plongez dans une analyse approfondie des motivations du milliardaire. Entre liberté d'expression et ambitions transhumanistes, comprenez pourquoi ce rachat pourrait transformer notre quotidien. <p>Cela fait 7 mois qu'Elon Musk fait tous les coups d'éclat possibles sur le rachat de Twitter.</p> <p>Dans le débat public : deux sons de cloches par rapport à ce rachat, personne n'apporte d'argument constructif pour savoir si c'est une bonne chose ou non. Des personnes souvent à gauche qui crient au scandale, et d'autres souvent à droite qui scandent "l'oiseau est libéré" après des années de censure et de bannissement.</p> <p>Mais en réalité, <strong>est-il raisonnable de penser qu'Elon Musk n'a fait ça que pour le plaisir de la liberté ?</strong></p> <p>Il n'a échappé à personne qu'Elon Musk est fondateur ou propriétaire des entreprises suivantes : SpaceX, Tesla, Paypal, OpenAI, Neuralink... Ainsi, le milliardaire détient l'espace, les déplacements, la gestion de monnaie, mais aussi les intelligences artificielles, et les plus grandes avancées en matière de technologie transhumaniste.</p> <p><strong>Est-il donc toujours raisonnable de penser qu'Elon Musk a racheté Twitter dans le seul but de "libérer l'oiseau" ?</strong></p> <p>Chez nous, catholiques, la grande majorité ont crié victoire. Mais le problème est toujours le même : nous nous obstinons, sans comprendre les enjeux éthiques, à rester sur les mêmes plateformes numériques (Youtube, Facebook, Twitter) plutôt que de chercher une solution à long terme qui respecte l'être humain. Nous avons eu de nombreuses occasions d’aller vers ces autres plateformes, mais nous qui avons choisi de ne pas le faire, par simplicité, par manque de volonté.</p> <p>Nous avons donc cherché à rester sur Twitter, et aujourd'hui nous crions victoire, alors que nous oublions le principal : <strong>Elon Musk est l'un des plus grands transhumanistes</strong> de cette Terre. "<em>La mort de la mort, l'augmentation des capacités humaines, la création de la vie en éprouvette et l'utérus artificiel, la fabrication d'IA et la colonisation du cosmos sont les objectifs de ce mouvement qui promeut l'homme 2.0</em>".</p> <p>Ses projets sont d'envoyer en masse coloniser Mars avec SpaceX, de <strong>modifier l'homme pour créer des cyborgs</strong> grâce aux technologies développées par <em>Neuralink</em> d'ici cinq ans !</p> <p><strong>Que manquait-il à Musk ? Twitter !</strong> C'est-à-dire le contrôle de ce que voient les gens, les interactions entre les utilisateurs, le libertarisme absolu (chacun est ce qu'il veut devenir).</p> <p>Nous savons déjà que le projet d'Elon Musk avec Twitter est de créer une « application universelle ». C'est-à-dire, une application qui répond à tout et qui nous assiste dans tout. Finalement, c'est à la hauteur de tous les projets qu'il a eus jusqu'ici : cette application sera la grande porte d'entrée du transhumanisme dans notre quotidien.</p> <p><strong>Cessons donc de crier à la liberté !</strong> Car nous n'avons pas la même définition de liberté. Sachons tirer humblement les leçons, et cherchons à comprendre les technologies que nous utilisons pour en avoir un usage qui respecte la dignité de l’homme !</p> <blockquote> <p>Le rachat de Twitter par Elon Musk est une victoire des transhumanistes. Twitter + neuralink + NFT + Metaverse + OpenAI C’EST UNE BOMBE TRANSHUMANISTE</p> </blockquote> <p><a href="https://nitter.net/dr_l_alexandre/status/1586290205018836992">Docteur Laurent Alexandre</a></p> /article/2022-10-29_Rachat%20de%20Twitter%20par%20Elon%20Musk/ Sat, 29 Oct 2022 00:00:00 +0200 ChatGPT /article/2023-01-20_ChatGPT/ L'arrivée de ChatGPT, une IA capable de générer du texte automatiquement, soulève des questions éthiques sur la distinction entre contenu humain et généré. Basé sur GPT-3.5, ChatGPT simplifie l'accès à l'IA via une interface conversationnelle, transformant notre rapport aux technologies. Cependant, la délégation excessive de tâches aux machines risque de diminuer l'interaction humaine et de compromettre notre humanité. Il est crucial de comprendre les limites de l'IA et d'utiliser la technologie avec maturité pour préserver notre nature humaine. <p><em>L'arrivée de ChatGPT, un programme informatique capable de générer des textes automatiquement, soulève des questionnements éthiques. En effet, en imitant de manière réaliste l'intelligence humaine, il peut rendre difficile la distinction entre ce qui est généré automatiquement et ce qui est écrit par un humain. Cela peut avoir un impact sur les relations humaines et remet en question la nature même de la communication et de l'expression. Il est donc important de réfléchir aux conséquences éthiques de son utilisation.</em></p> <p>Telle est l'introduction rédigée par ChatGPT après quelques questions sur le danger qu'elle représente... À deux doigts de lui dire merci comme à un ami, qui aurait cru il y a un an que les intelligences artificielles ont atteint ce niveau ? Mieux encore, qu'il suffirait de moins d'un mois pour qu'avec enthousiasme, elle soit massivement utilisée ? En revanche, il eut été facile de prédire qu'avec un tel outil la paresse des humains pourrait enfin prendre toute la place qu'on lui laisse.</p> <p><strong>ChatGPT a été rendu public fin novembre 2022, et n'a en réalité rien de révolutionnaire.</strong> En effet, <strong>il est basée sur GPT-3</strong>, qui est un modèle de traitement naturel de langage (IA spécialisée dans le traitement de texte) sorti en 2020. Pour information, GPT-3 était déjà capable de rechercher de l'information, traduire, résumer, reformuler, rédiger des textes et même faire un peu de programmation. Les capacités de ChatGPT sont à quelques différences près, équivalentes à GPT-3. <strong>La principale différence est dans la manière d'utiliser l'IA.</strong> ChatGPT a été optimisé pour fonctionner sous la forme de conversation, et son interface (graphique) permet à tout le monde de l'utiliser facilement, contrairement à GPT-3 qui nécessitait quelques lignes de code.</p> <p>Bien que la principale différence réside dans l'interface, <strong>cette simple amélioration est en train d'opérer des changements majeurs dans notre rapport aux technologies, et dans le rapport qu'ont les humains au réel</strong>. Quelques semaines après la mise à disposition de cet outil, les étudiants, les professionnels et les particuliers se sont mis à l'utiliser. Au début c'était pour s'amuser, pour voir si ça marche vraiment. En réalité, c'est un outil bien différent des autres.</p> <p>Avant, pour trouver une information, il fallait chercher. Avec cet outil, il n'y a plus à chercher, on trouve immédiatement. Avant, pour écrire un texte, pour mettre sa pensée sur une feuille, <strong>il fallait réfléchir, chercher et trouver les mots. Maintenant, on écrit vaguement ce qu'il faut faire</strong>, puis on dit ce qu'il faut corriger, sans même plus chercher à le faire nous-même.</p> <p>Si nous continuons à terme dans <strong>cette folie qu'est la délégation de nos intelligences et volontés aux machines</strong>, le monde interagira de moins en moins par des humains, mais par des machines. Imaginez un monde où si vous devez recruter quelqu'un, ni son CV ni sa lettre demotivation n'ont été rédigés par cette personne, que les devoirs de vos élèves ne sont pas non plus le fruit de leur apprentissage et réflexion, que le logiciel que vous exécutez n'est pas le travail d'un développeur, ou encore que les articles de presse que vous lisez n'ont rien d'une réflexion venant d'un être humain. C'est pourtant ce qui est en train d'arriver si personne ne se donne de limite dans l'usage des technologies.</p> <p><strong>On croit que ce ne sont que des machines.</strong> De fait, avons-nous bien conscience de ce qui est à l'origine de ces intelligences artificielles, et comment elles fonctionnent ? Qui est vraiment conscient en l'utilisant que ce ne sont que des probabilités mathématiques savamment utilisées qui sont à l'origine des résultats ? Et quand bien même la réponse de <strong>cette IA donne l'impression d'être le fruit d'une réflexion humaine, en réalité, jamais aucune conscience n'aura été derrière ce résultat.</strong></p> <p><strong>Or, c'est bien ce qui distingue l'homme de la machine</strong> (et des animaux), et qui lui donne une place prépondérante dans la création. <strong>Ce qui est propre à l'homme, c'est son intelligence et sa volonté.</strong> Si nous les laissons entre les mains d'une machine par simple paresse, <strong>c'est bien notre nature même que nous arrêtons d'accomplir, c'est notre humanité que nous perdons</strong>. Ne nous laissons pas perdre dans l'excitation d'une nouvelle technologie et <strong>sachons avec la plus grande force respecter notre nature en l’accomplissant vers sa fin</strong>. La technologie demande une vraie maturité pour l’utiliser sainement.</p> /article/2023-01-20_ChatGPT/ Fri, 20 Jan 2023 00:00:00 +0100 Adoption des technologies /article/2023-07-10_Adoption%20des%20technologies/ Découvrez pourquoi les technologies comme ChatGPT et Threads sont adoptées à une vitesse record ! Entre l'ascension exponentielle des innovations, les avantages techniques des grandes entreprises et l'imprudence des utilisateurs, cette analyse met en lumière plusieurs aspects révélateurs. <p>Il a fallu 10 mois à Facebook pour atteindre 1 million d'utilisateurs ;</p> <p>Il a fallu 5 jours pour ChatGPT... Et 2 mois pour qu’il atteigne 100 millions d'utilisateurs.</p> <p>Threads a mis 5 jours pour atteindre les 100 millions d'utilisateurs...</p> <p>Cette accélération de l’adoption des technologies s'explique par la convergence de plusieurs phénomènes.</p> <p>Tout d'abord, <strong>l'ascension exponentielle des technologies</strong>. Les technologies adoptées précédemment aident à l'adoption des technologies suivantes. Par exemple, pour prendre connaissance de l'existence des réseaux sociaux et de leurs fonctionnalités, il fallut passer par des voies plus lentes telles que les journaux ou le bouche-à-oreille. Dans le cas présent, ChatGPT peut profiter des réseaux sociaux existants pour se faire connaître d’un très grand nombre de personnes en quelques jours seulement. Ainsi, la masse prenant connaissance de son existence par l’intermédiaire des réseaux sociaux est finalement amenée à l'essayer.</p> <p><strong>Il s'agit donc d'un phénomène d'accélération relativement naturel.</strong></p> <p>Le second phénomène, purement technique, est <strong>le fait que les nouvelles technologies soient développées par des entreprises auxquelles un grand nombre d'utilisateurs ont déjà souscrit</strong>. Cela n'est pas le cas de <em>ChatGPT</em> où seuls les passionnés d'IA avaient déjà un compte chez <em>OpenAI</em>. Mais dans le cas de Threads, développé par <em>Facebook</em>, il est possible d’utiliser le même compte qu'<em>Instagram</em> (développé par la même entreprise). De cette manière, l'adoption du nouveau réseau social est simplifiée par un avantage uniquement technique. Lorsque l'utilisateur arrive sur son nouveau compte, il a l'impression d'y avoir toujours été en retrouvant notamment le même nom d'utilisateur, ainsi que les comptes qu'il suivait sur l'autre réseau social.</p> <p><strong>Il s'agit ici d'un phénomène artificiel et commercial qui pousse l'utilisateur à adopter une nouvelle plateforme par pure simplicité.</strong></p> <p><strong>Le dernier phénomène lève de son côté un problème beaucoup plus profond : celui de l'imprudence.</strong></p> <p>C'est cette attitude de plus en plus systématique qui consiste pour l'utilisateur à <strong>adopter une technologie sans se poser la question ni de son utilité, ni de sa nécessité, ni de ses travers</strong>. Les personnes n'adoptent plus tant les technologies pour les services qu'elles rendront que pour le changement qu'elles impliquent, la nouveauté à découvrir. Cette nouveauté à découvrir est dans un premier temps dans l'application en elle-même et dans un second temps dans le contenu massif créé que l'utilisateur découvrira à chaque ouverture de l'application.</p> <p><strong>Cette prudence qui devrait nous amener à mesurer l'utilité des nouvelles technologies ainsi que leurs impacts disparaît au profit d'un usage plus impulsif.</strong> Ceci est d'autant plus vrai qu'il s'agit ici du service « <em>Threads</em> » qui consiste, comme Twitter, à envoyer des messages limités à 280 caractères. Ce service ne permet donc pas d'exprimer une idée de manière complète, la pensée devant être résumée en seulement 280 petits caractères. Ce n'est pas pour rien que l'entreprise s'appelle Twitter : <em>gazouillis</em>. Les utilisateurs ne sont plus là pour s'instruire, mais pour réagir, pour <em>piailler</em>... Difficile de justifier l’utilité de ces applications au regard des dangers qu’elles apportent.</p> <p><strong>L'adoption massive et très rapide de ChatGPT, et aujourd'hui de Threads, est révélateur d'une société qui tend à ne plus construire de réflexion, à ne plus prendre le temps de l'expression, et sombre dans l'instantanéité et le changement perpétuel.</strong></p> /article/2023-07-10_Adoption%20des%20technologies/ Mon, 10 Jul 2023 00:00:00 +0200 Moralité de la puce sous cutanée /article/2023-09-06_Moralit%C3%A9%20de%20la%20puce%20sous%20cutan%C3%A9e/ Explorez les défis éthiques et technologiques posés par la puce RFID sous-cutanée ! Entre menaces pour les libertés individuelles et fusion de l'humain avec la machine, découvrez une analyse détaillée des conséquences de cette technologie. <p><strong>Un article de France TV Info relance le débat sur la puce RFID implantée dans la main. Elle pose évidemment de nombreuses questions éthiques.</strong></p> <p>Plusieurs associations de défense des droits de l'homme et la CNIL la considèrent comme une <strong>atteinte aux libertés individuelles</strong>, à la vie privée et à la protection des données.</p> <p>En cette même période, l’Europe est en train de <strong>déployer l’<em>identité numérique</em></strong>. Alors même qu'elle était en phase de test, elle a été rendue obligatoire pour utiliser le compte CPF, contre toutes les promesses faites plus tôt. La France travaille également à <strong>fusionner la carte d'identité et la carte vitale</strong>. En même temps, l'<strong>euro-numérique Cash+</strong>, encore en phase d'étude par l’Europe, tend à proposer un nouveau moyen d'échange de monnaie pour <strong>remplacer l'argent liquide</strong>.</p> <p>L'article de <em>France Info</em> propose de fusionner la carte bancaire et le corps biologique avec une puce implantée. Ne serait-il pas logique aussi d’y ajouter la carte d’identité et la carte vitale ? Probablement. Même si ce n'est pas encore explicitement dans le débat.</p> <p><strong>Le problème de cette technologie est double</strong> : d'une part <strong>technique</strong>, parce qu'il pose question quant à sa mise en œuvre. D'autre part <strong>idéologique</strong>, sur les raisons qui motivent de telles implantations.</p> <ul> <li><strong>Le problème technique :</strong></li> </ul> <p>Comme le souligne brièvement un article de <em>01Net</em>, <strong>l'implant pose deux problèmes : la sécurité et la vie privée</strong>. Pour le premier, c'est en réalité une question qui se pose sur toutes technologies, implantée ou non. Des solutions seront sûrement trouvées dans le temps.</p> <p>Le second problème est quant à lui plus complexe. Car c'est la conception même de la technologie qui est remis en cause. Par nature, une puce RFID ne peut pas émettre de signaux à plus d’un ou deux mètres. Ainsi, en pleine forêt, l’homme serait protégé de tout suivi géographique (hormis avec un smartphone non protégé). Il n’en reste pas moins qu’avec une dizaine d’identifications par jour (par exemple dans les bus, commerces, usage de la puce, etc.), le suivi reste extrêmement précis. <strong>Nous pouvons raisonnablement estimer ce suivi à un « pointage » par heure. Ce qui est suffisant pour comprendre le comportement des personnes.</strong></p> <p>En résumé, si la puce sert de carte d’identité, de carte bancaire et de carte vitale, elle permettra en même temps de suivre précisément tous les <strong>achats</strong>, les <strong>déplacements et actions</strong> de la personne, et d’y <strong>corréler son dossier médical</strong>. Ainsi, <strong>la vie privée n’est plus protégée</strong> que par la confiance totale que nous devrons donner aux différentes institutions. Car, si ces questions se posent déjà avec le smartphone, il y avait encore la possibilité de configurer celui-ci comme nous le souhaitions. Il existait toujours la possibilité de se détacher physiquement de son smartphone, de le prêter, de se différencier de lui. <strong>La puce sous-cutanée ne permettra pas de se détacher de ces suivis.</strong></p> <ul> <li><strong>Le problème idéologique :</strong></li> </ul> <p>La vie privée est un problème de fond que soulève la mise en place technique de la puce sous-cutanée. Par ailleurs, <strong>il y a un problème idéologique, qui révèle les fondements désastreux de nos sociétés</strong>.</p> <p>Car <strong>la puce sous-cutanée, c’est également le début de la fusion de l’homme et de la machine</strong>. Le but n’est pas d’utiliser une technologie pour guérir une maladie, mais bien d’augmenter les capacités humaines. Ce n’est pas seulement un « artifice » dont on peut se servir et se séparer comme on le souhaite. Korben, un blogueur dans le domaine de l’informatique, écrivait déjà en 2006 « <em>Ce n’est pas la machine qui s’adapte à l’homme mais l’homme qui s’adapte à la machine en acceptant une puce électronique en lui.</em> »</p> <p>De fait, <strong>la puce sous cutanée est une nouvelle fonction intégrée au corps humain</strong>, intégré aux individus, leur <strong>permettant de payer</strong>.</p> <p>C’est aussi un moyen de prouver à des entités privées ou publiques que l’utilisateur est bien lui-même : de s’authentifier. Ce qui ne se comprend qu’à la lumière de la numérisation de tous les services administratifs. Ainsi, la puce sous cutanée <strong>connecte d’une certaine manière l’individu physique à la machine</strong>. Une personne évoluera tant sur Internet, identifié par sa puce, que dans le réel, avec cette même technologie.</p> <p><strong>En somme, il y a dans l’idée même de puce sous cutanée une logique transhumaniste à l’œuvre. Pour cette raison, son usage n’est moralement pas recevable par l’Église catholique.</strong></p> <hr /> <p><strong>Sources :</strong></p> <p><a href="https://www.francetvinfo.fr/replay-radio/aujourd-hui-c-est-demain/puce-sous-cutanee-nos-cles-ou-notre-carte-bancaire-toujours-a-portee-de-main-avec-un-implant-electronique-dans-la-paume_6030185.html">https://www.francetvinfo.fr/replay-radio/aujourd-hui-c-est-demain/puce-sous-cutanee-nos-cles-ou-notre-carte-bancaire-toujours-a-portee-de-main-avec-un-implant-electronique-dans-la-paume_6030185.html</a></p> <p><a href="https://france-identite.gouv.fr/">https://france-identite.gouv.fr/</a></p> <p><a href="https://www.lemonde.fr/politique/article/2023/06/01/fusion-carte-vitale-carte-d-identite-l-assurance-maladie-emet-de-tres-fortes-reserves_6175763_823448.html">https://www.lemonde.fr/politique/article/2023/06/01/fusion-carte-vitale-carte-d-identite-l-assurance-maladie-emet-de-tres-fortes-reserves_6175763_823448.html</a></p> <p><a href="https://www.ecb.europa.eu/paym/digital_euro/html/index.fr.html">https://www.ecb.europa.eu/paym/digital_euro/html/index.fr.html</a></p> <p><a href="https://www.01net.com/actualites/5-infos-sur-cash-le-remplacant-de-leuro.html">https://www.01net.com/actualites/5-infos-sur-cash-le-remplacant-de-leuro.html</a></p> <p><a href="https://www.01net.com/actualites/bientot-tous-equipes-de-puces-sous-la-peau-pour-payer-ouvrir-sa-voiture-etc.html">https://www.01net.com/actualites/bientot-tous-equipes-de-puces-sous-la-peau-pour-payer-ouvrir-sa-voiture-etc.html</a></p> <p><a href="https://korben.info/comment-detruire-une-puce-rfid.html">https://korben.info/comment-detruire-une-puce-rfid.html</a></p> /article/2023-09-06_Moralit%C3%A9%20de%20la%20puce%20sous%20cutan%C3%A9e/ Wed, 06 Sep 2023 00:00:00 +0200 Fakenews, réseaux sociaux, vérité, quel est le problème ? /article/2024-03-04_Fakenews,%20r%C3%A9seaux%20sociaux,%20v%C3%A9rit%C3%A9,%20quel%20est%20le%20probl%C3%A8me/ La manipulation de l'information via les réseaux sociaux et les ingérences étrangères pose un défi majeur à la vérité. La Viginum, service français de vigilance contre ces menaces, est souvent critiquée pour ses actions de <em>censure</em>. La distinction entre influence et manipulation est alors cruciale. Les réseaux sociaux, en ciblant précisément les utilisateurs, favorisent la manipulation. Pour contrer cela, il est essentiel de promouvoir des sources d'information qualitative. La vérité objective doit être recherchée et défendue, en évitant les pièges de la post-vérité et en encourageant la réflexion critique. <p>Récemment, une <a href="https://www.tocsin-media.fr/stop-censure-transcript/">pétition</a> a été publiée pour dénoncer l'existence de la Viginum. La "<em>VIGINUM est le service technique et opérationnel de l'État chargé de la vigilance et de protection contre les ingérences numériques étrangères.</em>"¹</p> <p>Le journaliste dénonce notamment des projets de lois qui visent à « <span style="font-weight: normal;">mettre au pas les réseaux sociaux </span>contre les soi-disantes "fake news" ». Selon lui, le pire est la fermeture d’une vingtaine de comptes Telegram russes.</p> <p>Doit-on mettre sur le même plan la censure d’un média tel que CNews et la censure des réseaux sociaux ? Autrement dit, doit-on donner autant la parole à des instances journalistiques qu’à des utilisateurs de réseaux sociaux ? Enfin, <strong>est-il légitime de se protéger contre les ingérences étrangères ?</strong></p> <p>La problématique soulevée est complexe. Il est important de se poser, de prendre du recul et d’élever le débat pour bien définir ce que nous voulons défendre, les principes auxquels nous voulons rester attaché, sans se prendre dans les filets des menaces réelles qui pèsent sur le pouvoir médiatique contemporain.</p> <p><br> <br> Il y a en effet, aujourd'hui, une véritable guerre de l'information qui se mène au niveau mondial, impliquant toutes les grandes puissances ayant des capacités numériques importantes. "<em>La guerre de l’information au sein du cyberespace fait dorénavant partie intégrante de toute stratégie militaire. La lutte informatique d’influence (L2I) désigne les opérations militaires conduites dans la couche informationnelle du cyberespace pour détecter, caractériser et contrer les attaques, appuyer la StratCom, renseigner ou faire de la déception, de façon autonome ou en combinaison avec d’autres opérations.</em>"²</p> <p><strong>La guerre d'influence est donc une guerre militaire qui s'opère sur Internet. Le concept est simple : se battre pour proposer de l'information à certaines populations pour être à la fois plus visible et plus impactant. En d’autres termes, maximiser l’impact de l’information véhiculée afin que l’adhésion du lecteur à l’idée présentée soit maximisée.</strong></p> <p><br> <br> Pour être efficace, les services militaires (ou apparentés) peuvent compter sur les <strong>algorithmes de recommandation</strong> des GAFAM, et autres réseaux sociaux intrusifs. Ces réseaux sociaux espionnent depuis des années leurs utilisateurs, ce qui leur permet de construire des modèles précis des personnalités de chaque utilisateur. De ce fait, le ciblage de l'information peut être extrêmement précis et efficace.</p> <p>Mais la lutte d'influence ne s'arrête pas là. Elle va aujourd'hui beaucoup plus loin en développant des <em>frappes chirurgicales</em>. Le but est de cibler à un très petit nombre de personnes des informations créées spécifiquement pour ce petit groupe, de telle sorte que son impact soit maximal. Pour cela, les « fabricants de contenu » peuvent s'appuyer sur l'IA, et automatiser les tâches de génération de contenu et d’envoi (et donc ciblage) des messages. <strong>Le but : manipuler les personnes pour leur faire changer d'avis, le plus rapidement et efficacement possible.</strong></p> <p><br> <br> <strong>Y a-t-il un problème lié aux ingérences étrangères ?</strong> <strong>Oui.</strong> Car ils cherchent à nous manipuler. Il semble très juste de combattre ces mouvements informationnels.</p> <p><br> <br> Mais en réalité, le problème est double. <strong>Il y a un problème soulevé par les manipulations étrangères, mais aussi le problème soulevé par le fonctionnement même des réseaux sociaux.</strong></p> <p>Si la manipulation marche aussi bien, c'est bien parce que les populations utilisent ces outils intrusifs comme moyen de s'informer. Or, un outil qui cible les informations et qui est capable de manipuler est-il un bon outil pour s'informer ? Bien sûr que non.</p> <p><br> <br> Ainsi, la situation a beaucoup changé entre la propagande des années 1930 et celle d'aujourd'hui. Avant, la propagande n'était pas ciblée, elle n'était pas instantanée, elle ne se propageait pas par les réactions des utilisateurs. Et surtout, la propagande ne ciblait pas des individus et ne manipulait pas. Elle influençait, tout au plus.</p> <p>La <strong>différence entre la manipulation et l'influence</strong> est complexe. D'un côté, il semble que l'influence consiste à proclamer un discours dans le but de convaincre la personne. Tandis que la manipulation consiste à proclamer un discours de façon à l'imposer insidieusement à l'auditeur. Ainsi, dans le premier cas, c'est la personne qui choisit d'adhérer à l'idée exposée, d'abord par un travail de l'intelligence, puis de la volonté (adhésion à l'idée). Tandis que dans la manipulation, la personne choisit de suivre un mouvement parce que quelqu'un d'autre a su jouer sur des leviers psychologiques et cognitifs pour lui imposer ce changement. Ainsi, le discours ne cherche pas à s'adresser à l'intelligence, mais à la volonté.</p> <p><strong>En d'autres termes, l'influence est le résultat d'un discours dont l'intention est d'éclairer l'intelligence, et la manipulation est le résultat d'un discours dont l'intention est de modifier la volonté.</strong></p> <p><br> <br> Ainsi, l'influence est quelque chose de naturel. Nous sommes influencés par tout, de l'environnement où nous vivons aux discussions que nous avons avec la famille et les amis. Mais la manipulation est quelque chose de contre nature.</p> <p>De ce fait, les réseaux sociaux qui reposent sur une forme de manipulation de masse sont mauvais. Nous ne devons pas utiliser ces outils comme moyens de suivre l'actualité.</p> <p><strong>Si nous voulons trouver un moyen simple de suivre l'actualité, il existe des moyens adaptés à cette fin : les flux RSS.</strong> Les agrégateurs de flux RSS (comme FlymDesSync, <a href="https://vienumeriqueprivee.fr/suivre-lactualite-sans-compromettre-sa-vie-privee-grace-aux-flux-rss/">Feeder</a>, NewsFlash) vous permettent de suivre n'importe quel blog compatible (la quasi-totalité). Il n'y a aucun pistage, ni aucun ciblage. Et l'information qu'on y trouve est bien plus souvent développée, argumentée, constructive. De nombreux experts ont leur propre blog et publient leurs réflexions liées à leur domaine de compétence. Ce que ne fait absolument pas – ni ne permet – <em>eXitter³</em>.</p> <p><br> <br> <strong>Mais le problème de fond que soulève l’action de la Viginum, ce ne sont pas les réseaux sociaux ni la manipulation étrangère</strong><span style="font-weight: normal;"> – ce sont d’autres problèmes</span><strong>… Le problème, c'est la vérité !</strong></p> <p>Dans les circonstances actuelles, nous ne devrions <strong>jamais</strong> parler des questions de manipulation et de censure sans évoquer la question de la vérité.</p> <p>Vouloir s'opposer à la Viginum parce qu'elle veut défendre la France contre les manipulations étrangères est une mauvaise posture, car cette action est légitime. Il n'est pas possible de justifier son opposition à la Viginum par la suppression des comptes Telegram de réseaux de manipulation russes⁴. Des études ont été faites au préalable et ont montré que ces réseaux se basaient sur des blogs ou des chaînes qui publiaient des articles générés automatiquement (jusqu'à plusieurs centaines d'articles par jour, parfois avec des erreurs de traduction). De plus, des informations techniques permettaient de localiser les serveurs et d’observer que les différentes sources étaient en réalité gérées par la même entité. Ainsi, la clôture des comptes Telegram semble très légitime.</p> <p>De plus, dans le contexte actuel, il faut voir le cyberespace, matérialisé par les réseaux sociaux, comme un terrain de guerre où les cibles sont nos cerveaux. De ce fait, nous sommes entrés dans un monde extrêmement complexe où le pouvoir doit légitimement nous défendre, y compris dans le champ psychologique et cognitif.</p> <p>Il semble donc juste de s'opposer à cette désinformation étrangère. Ainsi, il n'y a pas de raison de s'opposer à une instance gouvernementale qui se chargerait de combattre dans le cyberespace les manipulations.</p> <p><br> <br> Le problème soulevé par Guy de la Fortelle – auteur de la pétition – sur la Viginum est par conséquent plus difficile à cerner qu’une simple opposition à son existence. Car une partie de l’action de la Viginum est légitime (notamment la clôture des comptes Telegram russes). Mais <strong>le problème, ce sont les dérives – évidentes – qui tendent à interdire les opinions non conformes à la vérité définie par le pouvoir en place.</strong></p> <p>Il faut en effet une sacrée dose d'humilité et d'honnêteté pour savoir respecter une opposition forte, sans chercher à la manipuler – malgré l’accessibilité des moyens. Or le pouvoir en place ne semble pas avoir ces qualités.</p> <p>Dans cette situation, <strong>il n'y a en réalité qu'une seule victime : la vérité</strong>. Que ce soit côté russe ou côté occidental, le problème, c'est que ni l'un ni l'autre ne cherche – ni ne défend – la vérité objective. C'est-à-dire, ce qui est conforme à la réalité.</p> <p><br> <strong>Nous devons nous battre pour avoir le droit de chercher et de connaître la vérité objective… qui n'est ni chez les Russes, ni chez les occidentaux, ni dans la droite, ni dans la gauche, ni chez les climato-sceptiques, ni les climato-alarmistes, ni dans le complotisme, ni dans la parole officielle. Ce qui est commun à tous ces groupes, c'est la manière dont l'information est proposée : le sujet est clivant, et les arguments, peu développés, cherchent davantage à s'opposer qu’à exposer des raisonnements. Rien d'étonnant quand le but n’est pas de défendre la vérité ! On ne cherche pas à savoir ce qui Est, mais à être dans l'opposition !⁵</strong></p> <p><br> <br> Par exemple, analysons l’affaire des Macron Leaks évoquée dans la pétition. L'affaire, comme tous les événements depuis des années maintenant, a été traitée de la même manière : d'un côté, des robots et des utilisateurs diffusent l’information massivement ; de l’autre les médias esquivent le vrai débat. Dans le premier cas, les robots excluent totalement le jugement humain censé discerner le vrai du faux. Pour les utilisateurs, l’interface est conçue pour qu’ils réagissent plutôt que pour fournir un effort intellectuel pour se former, et limite ainsi le temps pris pour discerner le vrai du faux. De l'autre, les médias ne détaillent pas le contenu, mais les méthodes utilisées pour véhiculer l'information.</p> <p>Que ce soit d'un côté comme de l'autre, qui des deux a agi par adhésion à la vérité ? Le robot ? L’utilisateur qui repartage après avoir (au mieux) lu le tweet (c’est-à-dire moins de 400 caractères), mais sans avoir pris connaissance d’une analyse complète, développée et argumentée des mails dévoilés ? Ou les médias qui ont subtilement esquivé la question de fond : quels sont les problèmes soulevés par le contenu des mails du <em>Macron Leaks</em> ?</p> <p>Certains d’entre nous pensent que les Russes manipulent moins l’information que les occidentaux à notre époque… Mais ce serait oublier l'héritage de l'URSS que Poutine a reçu, lui-même ex-colonel du KGB ! Il serait naïf de croire qu'il ait abandonné ces pratiques. La « guerre d'influence » est née en Russie, dès la fin du 19ème siècle, et a été développée et perfectionnée par les Soviétiques dès leur arrivée au pouvoir. De ce fait, les Russes sont les pionniers dans le domaine de la manipulation, de la compréhension des ressorts cognitifs et dans l'usage de leviers psychologiques. Il serait donc factuellement faux de croire que les Russes manipulent moins ou qu’ils sont plus honnêtes, cela nécessiterait des études très approfondies ou être au cœur de leurs réseaux de décision, au contact de la réalité.</p> <p>Seulement, dans le monde actuel, les Russes ne sont plus les seuls à être experts dans le domaine. Les GAFAM se sont énormément développés dans ce domaine de compétence depuis leur création. Les États également ont beaucoup appris dans l'usage des moyens de communication (on peut se souvenir des accords de <em>Blum-Byrnes</em> pour la diffusion des films américains en France après la seconde guerre mondiale).</p> <p><br> <br> <strong>La situation actuelle nous amène à une triste réalité : nous sommes dans l'ère de la post-vérité. La post-vérité, c’est l’indifférence des personnes face à la vérité objective.</strong> Dans l’exemple précédent, il est évident que la majorité des personnes ont réagi plus qu’elles n’ont fait un travail pour comprendre la vérité.</p> <p><strong>Face à cela, nous devons tenir une seule position : rechercher et s'attacher à la vérité objective !</strong></p> <p>Nous devons retrouver la vérité non dans l'opposition, en adhérant à ce qui s'oppose à autre chose, mais uniquement en adhérant à ce qui est conforme à la réalité.</p> <p><strong>La vérité est subtile, nous la trouverons bien plus dans les livres que dans les réseaux sociaux. Et surtout, nous ne pouvons la trouver que dans le temps de la réflexion !</strong></p> <p>Le débat n'est pas de savoir si on peut dire tout ce que l'on veut ou non, si la liberté d'expression peut être légitimement encadrée. Et de ce fait, ce que nous avons le droit de dire ou non, de lire ou non. Si notre argumentaire repose sur le libertarisme de l’expression, alors pourquoi voudrions-nous interdire la pornographie ?</p> <p>Le vrai débat, c'est d'avoir le droit de réfléchir, de chercher et d'adhérer à la vérité objective. Cela implique une juste diversité d'opinion dans les médias et les sources journalistiques, mais aussi d’interdire les réseaux d’information manipulateurs pour défendre les médias qui ont pour objectif d'informer avec honnêteté – malgré les erreurs du métier et la diversité des points de vue.</p> <p><br> <br> <strong>Ce que nous devons donc attendre de la Viginum, c'est qu'elle combatte tous les réseaux de manipulation qui existent, qu'ils soient russes, américains, chinois, indiens, israéliens, allemands, anglais,… et même français. Qu’ils agissent sur les réseaux sociaux, dans les médias officiels et même dans les pouvoirs en place (entreprise, politique, État).</strong></p> <p><strong>Nous ne voulons pas de manipulation, quelle qu'elle soit.</strong> Nous avons défini ce terme plus tôt – conformément à notre attachement à la vérité. Ainsi, si le but d’une chaîne d’information est bien d'informer et non de manipuler, il est totalement injuste de s'y attaquer. De même, si un État tente de réguler les médias dans le but de manipuler sa propre population, celui-ci doit être condamné.</p> <p><strong>En somme, nous ne devons pas demander à ce qu’aucune source de manipulation soit combattue, car elles sont aujourd’hui dangereuses pour les individus qui y sont exposés, dues aux avancées en guerre cognitive. Mais nous devons demander et nous assurer que la Viginum et toutes les instances de régulation médiatique de l’État soient fait dans l’unique but de défendre la recherche et l’accès à la vérité</strong><span style="font-weight: normal;">, en défendant la pluralité des points de vue dès lors que leur diffusion se fait dans un cadre honnête, à titre informatif seulement (et non de manipulation)</span><strong>.</strong></p> <p><br> <br> <strong>Concrètement, ce que nous pouvons faire à notre niveau :</strong></p> <ul> <li><strong>quitter les réseaux sociaux :</strong> le but est d'éviter de se faire manipuler par les groupes dits « d’influence », nous y sommes malheureusement tous confrontés. De très nombreux blogs vous permettront de vous informer constructivement et exhaustivement.</li> <li><strong>chercher la vérité :</strong> se former, plus que s'informer ! C'est elle qui est le centre de nos maux !</li> <li><strong>mener le bon combat :</strong> ne pas s'opposer par principe, mais bien par conviction après un réel exercice de l’intelligence pour discerner si l’opposition est justifiée ou non. En d’autres termes, défendre nos médias proposant des points de vue différents par attachement à la vérité, et non par opposition à une censure légitime.</li> </ul> <hr /> <p>¹ <a href="https://fr.wikipedia.org/wiki/VIGINUM">https://fr.wikipedia.org/wiki/VIGINUM</a><br> ² <a href="https://www.defense.gouv.fr/comcyber/nos-operations/lutte-informatique-dinfluence-l2i">https://www.defense.gouv.fr/comcyber/nos-operations/lutte-informatique-dinfluence-l2i</a><br> ³ Contraction de "X (ex Twitter)". À prononcer [<em>exciteur</em>].<br> ⁴ <a href="https://www.sgdsn.gouv.fr/files/files/20240212_NP_SGDSN_VIGINUM_RAPPORT-RESEAU-PORTAL-KOMBAT_VF.pdf">https://www.sgdsn.gouv.fr/files/files/20240212_NP_SGDSN_VIGINUM_RAPPORT-RESEAU-PORTAL-KOMBAT_VF.pdf</a><br> ⁵ Cf Jean Ousset, <em>Marxisme et révolution – En finir avec le marxisme</em>.</p><br> /article/2024-03-04_Fakenews,%20r%C3%A9seaux%20sociaux,%20v%C3%A9rit%C3%A9,%20quel%20est%20le%20probl%C3%A8me/ Mon, 04 Mar 2024 00:00:00 +0100 Bonne année 2025 ! /article/2025-01-03_Bonne%20ann%C3%A9e%202025%20!/ Joyeux année 2025 ! Cette année promet d'être riche en événements technologiques, notamment avec de nombreuses avancées en IA et un possible dépassement de l'être humain. Ces progrès soulèvent des questions philosophiques et morales cruciales pour l'humanité auxquelles nous essaierons de répondre. <p>Cette année va être riche en évènements, comme le fut <strong>2024, qui restera probablement gravée dans les mémoires</strong> comme un tournant de l'histoire des inventions humaines... Notamment avec l'arrivée des derniers modèles d'IA, multimodaux d'abord, mais surtout o1. Pour la première fois, un modèle est capable de mener des raisonnements par étapes, comme l'homme, avec une précision inégalée. <strong>Le modèle o1 dépasse 90% des êtres humains</strong> avec un QI à 120 points là où GPT4 n'était "qu'à" 85 points.</p> <p><strong>La révolution en train de se dérouler sous nos yeux est simplement ahurissante, et trop peu de personnes comprennent la profondeur des enjeux.</strong> Cette phrase de Dan Hendrycks¹ est pourtant révélatrice : « Le modèle [o1] surpasse déjà la plupart du temps les scientifiques titulaires d'un doctorat »...</p> <p>En cette année 2025, il semble probable que le tournant le plus important sera le déploiement à grande échelle de modèles capables de raisonner (en plus de l'élargissement des fenêtres contextuelles, et l'arrivée de l'auto-exécution²). Le modèle o3 annoncé fin décembre montre les contours de ce qui se prépare. o1 était une grande avancée, o3 semble être un pas de géant supplémentaire. Il ne reste "plus qu'à" optimiser et réduire les coûts des calculs, et <strong>l'IA dépassera l'être humain, nous rapprochant un peu plus de ce qu'on appelle l'IA générale</strong>, mais aussi de la singularité technologique souhaitée par les transhumanistes.</p> <p>Ces nouveaux modèles en préparation risquent de bouleverser notre vision de la machine. <strong>La frontière entre l'homme et la machine se rétrécira</strong> davantage sur ce qui faisait notre spécificité : l'intelligence. L'agilité de l'IA arrivera avec son intégration dans les robots...</p> <p>Tout cela nous met, plus que jamais dans l'histoire, face à <strong>des questions fondamentales de la plus haute importance</strong>. Les enjeux n'ont peut-être jamais été aussi importants de toute l'histoire de l'humanité. <strong>On ne craint pas moins que la destruction de l'humanité dans les prochaines décennies !</strong> Si cela n'arrive pas, il reste à craindre que <strong>de plus en plus de personnes confondent la capacité à raisonner avec la capacité à comprendre. Cette confusion entraînera un grand nombre à adorer la machine</strong>, et à enterrer un peu plus l'idée d'adorer notre Dieu créateur. <strong>Nous entrons en même temps dans l'ère de la postvérité</strong>, un monde où distinguer le vrai du faux devient impossible.</p> <p>Pour cette raison, aujourd'hui plus que jamais, <strong>il est temps de réordonner les choses et d'apporter des réponses chrétiennes</strong> à tous ces évènements, avec sérénité et réalisme. Mon livre, "L'Intimité Assiégée" apportera des éléments de réflexion importants. Les autres éléments arriveront au fur et à mesure pour répondre de manière plus spécifique.</p> <p>De leur côté, <strong>les transhumanistes ne traînent pas</strong>. Au contraire, ils sont extrêmement <em>lucides</em>. Leurs réflexions sont <em>avancées</em> et <em>matures</em>. À ce titre, je vous invite à regarder cette vidéo³ sur le jeu "<em>Universal Paperclips</em>", conçu par Nick Bostrom pour mettre en lumière les enjeux cachés des IA. <strong>Cette vidéo est extrêmement instructive tout en étant très objective.</strong></p> <iframe width="960" height="471" src="https://www.youtube-nocookie.com/embed/ZP7T6WAK3Ow" title="L&#39;horreur existentielle de l&#39;usine à trombones." frameborder="0" allow="accelerometer; clipboard-write; encrypted-media; gyroscope; picture-in-picture; web-share" referrerpolicy="strict-origin-when-cross-origin" allowfullscreen></iframe> <p>Cette nouvelle année s'annonce donc chargée du point de vue des avancées technologiques. Espérons qu'elle le sera au moins tout autant sur les questions philosophiques qui doivent ébranler nos pensées. Espérons que la morale arrivera à diriger nos avancées scientifiques et industrielles !</p> <p><strong><em>Bonne et sainte année 2025 à tous ✨️</em></strong></p> <hr /> <p>¹ Chercheur en IA, travaille au Center for AI Safety. C'est une organisation à but non lucratif qui promeut la sécurité dans le développement et le déploiement de l'intelligence artificielle.</p> <p>² Ce que j'appelle "auto-exécution", c'est la capacité pour l'IA à générer du code pour répondre à une question, à l'exécuter, et à donner la réponse correspondante. Cela réglera toutes les erreurs de calcul sur les questions mathématiques par exemple.</p> <p>³ <a href="https://youtu.be/ZP7T6WAK3Ow">https://youtu.be/ZP7T6WAK3Ow</a></p> /article/2025-01-03_Bonne%20ann%C3%A9e%202025%20!/ Fri, 03 Jan 2025 00:00:00 +0100 Langage et connaissance /article/2024-04-20_Langage%20et%20connaissance/ Dans cet article, nous montrons la distinction importante entre le langage et la connaissance. Elle met l'accès pour montrer que le langage n'est que l'expression de la réalité. Cette distinction est fondamentale lorsque nous parlons d'IA. (Ce texte ayant été écrit dans un autre contexte, il dépasse cette seule explication.) <nav> <h2>Sommaire</h2> <ul> <li><a href="#introduction">Introduction</a></li> <li><a href="#langage-scientifique">Langage scientifique</a></li> <li><a href="#distinction-ente-langage-et-connaissance">Distinction entre langage et connaissance</a></li> <li><a href="#langage-et-connaissance-en-philosophie">Langage et connaissance en philosophie</a></li> <li><a href="#conclusion">Conclusion</a></li> </ul> </nav> <h2 id="introduction"><span id="anchor"></span>Introduction</h2> <p>Il existe deux courants de pensée qui s’opposent fondamentalement, que nous nommerons d’un côté la pensée « <em>moderne</em> », de l’autre la pensée « <em>traditionnelle</em> ». La première est dite <em>moderne</em>, car c’est Descartes qui l’a récemment remis au goût du jour, mais elle est déjà très présente chez Platon. Elle est une conception du monde complètement antagoniste à la pensée traditionnelle, qui hérite quant à elle plutôt d'Aristote. L’Église catholique reprend totalement les éléments de la pensée aristotélicienne et la dépasse dans l’ordre théologique en la complétant avec les éléments de la foi catholique.</p> <p>L’élément fondamental à l’origine de cette divergence entre ces deux courants de pensée réside dans la manière dont l’homme prend connaissance des choses.</p> <p>La pensée moderne estime que c’est l’homme qui crée la connaissance dans son esprit. C’est l’homme qui crée dans son esprit les concepts qui lui permettent de définir ce qu’est un homme, ce qu’est une femme, ce qu’est l’argent, ce qu’est une fleur, etc. C’est donc l’homme qui dit ce que les choses sont.</p> <p>De son côté, la pensée traditionnelle estime au contraire que la nature des choses est indépendante de l’homme et de son esprit. Ainsi, même si l’homme n’existait pas, les concepts de fleur, d’homme, de femme, etc., existeraient. Ce n’est alors pas l’homme qui crée dans son esprit la nature des choses, mais il reçoit cette connaissance à l’aide de ses sens (toucher, vue, ouïe, odorat, etc.). Les sens lui permettent de capter, par l’exercice de l’intelligence, l’essence même des choses dans son esprit.</p> <p>Cette divergence est fondamentale puisqu’elle est à l’origine de deux paradigmes majeurs affectant la quasi-totalité de la manière dont on aborde les choses du monde. De la manière dont nous réfléchissons à la manière d’agir, de mener la politique ou de dire ce qui est moral ou non, tous les aspects de la société peuvent être bouleversés selon le postulat philosophique initial auquel nous choisissons d’adhérer.</p> <p>Nous pouvons voir une première conséquence de cette divergence dans la manière dont nous définissons ce qu’est la vérité en fonction du premier ou du second point de vue. La pensée traditionnelle définit la vérité comme l’adéquation de l’intelligence – ici, intelligence de l’homme – avec ce que les choses sont, avec la réalité. Ainsi, la vérité est objective. L’herbe est de couleur verte, que je le veuille ou non, que je sois daltonien ou non… Sauf si elle est restée trop longtemps au soleil, bien sûr. Pour la pensée moderne, la vérité est quelque chose de subjectif. C’est en effet très cohérent, si la nature des choses ne sont qu’une construction de l’esprit, de même, le vert de l’herbe n’est qu’une construction dans l’esprit de la personne. Et si mon esprit construit sa propre vision de la couleur de l’herbe, et que pour moi l’herbe (en bonne santé) est bleue, alors qui êtes-vous pour dire que la construction intime de mon esprit est fausse ?</p> <p>C’est dans cette vision que Descartes fonde l’<em>humanisme</em>, une conception philosophique qui place l’homme au centre de tout : c’est lui qui conçoit ce que les choses sont, c’est lui qui définit ce qui est vrai et ce qui est faux.</p> <p>Cette conception <em>moderne</em> de la vérité s’applique également à la définition de ce que sont le bien et le mal. Ainsi, la moralité n’est plus à la recherche d’un bien objectif, mais est le fruit d’une réflexion purement humaine où l’homme décide indépendamment des réalités qui l’entourent ce que sont le bien et le mal.</p> <p>Appliquer ces fondements philosophiques dans la société permet d’aboutir à autant de courants politiques que le <em>libéralisme</em>, le <em>socialisme</em>, le <em>nazisme</em>, le <em>fascisme</em>, le <em>communisme</em>, le <em>conservatisme</em>, comme le montre <em>Jean Daujat</em> dans ses nombreux ouvrages. Tantôt le bien peut être de prendre soin de la planète, tantôt de favoriser l’économie mondiale… Les politiques peuvent changer en fonction de la personne qui dirige, des idéologies dominantes, des peuples, de leurs envies et de leurs passions. Cependant, la politique n’est jamais là pour suivre une vision objective du bien et du mal : chacun a sa propre vérité, sa propre conception du bien et du mal. « Si ça fait du bien, faites-le » disait Harari dans <em>Homo Deus</em> en illustrant la philosophie humaniste.</p> <p>Dans la philosophie traditionnelle, la conception des choses est plus simple. Il y a une vérité objective, transcendantale, qui dépasse la volonté de l’homme. L’homme travaille par son intelligence à s’y accorder et à s’y conformer. Le bien commun est donc de chercher à appliquer aussi justement que possible ce que nous savons être vraiment et objectivement bon. Nous poursuivons la quête du bien, en perfectionnant la politique pour que ce bien soit réalisé et réalisable. Nous recherchons en conséquence à nous améliorer dans le temps : petits, nous recevons une éducation qui nous apprend ce qui est objectivement bon ou mal, et plus âgés, nous le transmettons à nos enfants. C’est le principe de la tradition : recevoir et transmettre le vrai, le bien et nos valeurs. Ce qui est vrai objectivement le reste quelle que soit le temps et l’époque : la vérité transcende l’homme et les dimensions purement matérielles (espace, temps).</p> <p>La question philosophique fondamentale du mode de connaissance est donc un véritable point de bascule dont les enjeux sont absolument majeurs pour la société.</p> <p>Qui de la pensée <em>moderne</em> ou <em>traditionnelle</em> a raison ?</p> <p>La réponse est dans la question… Si la pensée traditionnelle a raison, alors il y a bien une vérité qui nous transcende. Si c’est la pensée moderne, alors il s’agit d’une première vérité qui semble bien s’appliquer à tous de manière universelle. Les deux ne peuvent pas avoir raison en même temps, le cas échéant, nous avons un conflit irrésolvable. Pourtant, il semble que les adeptes du courant moderne s’accommodent facilement de ce raisonnement en disant qu’on peut très bien adopter une manière de pensée traditionnelle même si la pensée moderne a raison… Ce qui ne répond pas à l’objection.</p> <p>Nous chercherons dans la présente réflexion à expliciter l’erreur à l’origine du courant de pensée <em>moderne</em> dont les conséquences sont déjà désastreuses et risquent de s'aggraver avec l’apparition des IA, qui tendent à faire disparaître la notion même de vérité.</p> <h2 id="langage-scientifique"><span id="anchor-1"></span>Langage scientifique</h2> <p>Dans cette partie, nous chercherons à répondre à la question : <em>qui a inventé les sciences (mathématiques, physiques, etc.) ?</em> Répondre à cette question permettra de mettre en lumière la part que l’homme a dans la création des concepts et la définition de la nature des choses. Pour reformuler la question : l’homme n’a-t-il que découvert les formules qui régissent le monde, ou les a-t-il créées lui-même ?</p> <p>À première vue, c’est l’homme, puisqu'il est évident que c’est lui qui a inventé les chiffres et les symboles qui permettent de représenter des calculs mathématiques.</p> <p>Ainsi, l’homme a inventé différentes manières de caractériser le nombre d’individus dans un groupe. Cette idée de noter la quantité d’individus présents dans un groupe est très ancienne et est probablement née il y a quelques dizaines de milliers d’années pour contrôler la taille des troupeaux de bêtes, pour suivre un calendrier ou mesurer les récoltes. Les nombres semblent avoir été inventés avant l’écriture. Ce faisant, il s’agirait donc du premier système d’« écriture » très simplifié (un bâton par individu).</p> <p>De ce fait, il paraît évident que l’homme est à l’origine de l’invention des nombres<a href="#fn1" class="footnote-ref" id="fnref1" role="doc-noteref"><sup>1</sup></a>. C’est bien l’homme qui a choisi arbitrairement de dire que trois individus seront notés par trois barres, ou plus tard par le chiffre « 3 » et que cela se prononcera [trois] et s’écrira « trois ». C’est aussi nous-mêmes qui avons choisi de compter dans un système décimal, avec dix chiffres (de 0 à 9). Nous avons pareillement choisi de notre propre pouvoir de dire que le nombre 0 désignerait le manque d’éléments, tandis que 1 désigne un élément seul, 2 quand on ajoute un seul élément à un élément seul, 3 quand on ajoute un élément à un groupe de deux, etc.</p> <p>L’homme a donc pleinement inventé la numérotation, le dénombrement des choses. Or, puisque les nombres sont à la base des mathématiques, il serait tentant de dire que l’homme les a bien inventées, indépendamment d’un ordre transcendantal, contrairement à ce que nous explique la définition de la vérité dans la pensée traditionnelle. De la même manière que l’homme aurait inventé les maths, il serait également à l’origine de toutes les autres notions de la vie courante, de la définition de la fleur à la définition de l’homme, du bien, du mal… Pourtant, ce raccourci serait une grave erreur.</p> <p>Jouons avec les maths. Si j’ai deux moutons, que je trouve deux autres moutons : j’en ai quatre. Normalement, jusque-là, tout le monde me suit. L’homme a choisi que « deux » désigne « <strong>| |</strong> » individus<a href="#fn2" class="footnote-ref" id="fnref2" role="doc-noteref"><sup>2</sup></a>. Que « quatre » désigne « <strong>| | | |</strong> » individus. Mais une chose <em>s’impose</em> à l’homme : si je prends un groupe de deux unités, et que j’y ajoute un groupe de deux autres unités, <em>nécessairement</em>, je me retrouve avec quatre unités. <em>Le mécanisme d’addition s’impose à l’homme…</em></p> <p>Ainsi, nous pourrions inventer un système d’écriture complètement différent. Imaginons qu’au lieu d’écrire les nombres avec dix caractères, nous utilisions un système à deux caractères : « | - ». C’est un choix tout aussi arbitraire que les dix chiffres arabes.</p> <p>Ainsi, rien serait représenté par « - ». Un élément seul par : « | ». Et pour permettre de compter simplement, nous allons garder le mécanisme de « réutilisation », d’incrémentation des chiffres (qui permet de passer de 9 à 10, de « 9 » à « 1 » suivi de « 0 »). Ainsi, deux éléments sont caractérisés par « |- » et trois par « || », etc.</p> <p>Imaginons que j’ajoute « |- » à « || ». Le résultat est « |-| », ce qui, dans notre système numérique correspond à 5. Ainsi, que je le veuille ou pas, quelque soit mon système de comptage, 2+3=5.</p> <p>Il peut sembler absurde de créer un nouveau système de calcul. Pourtant, le système « créé » ici est le binaire, utilisé par les ordinateurs : 0 et 1 représentent deux états physiques de la matière ou de l’énergie – il y a du courant (1) ou il n’y en a pas (0). Bien que le système numérique créé ne soit pas décimal, il retourne correctement les résultats des opérations mathématiques. Le contraire serait embêtant : une application calculatrice sur ordinateur qui ne retournerait pas le même résultat qu’un boulier ou qu’un système par bâton serait embarrassant…</p> <p>À travers cet exemple, nous constatons que, quel que soit le système de notation, nous n’enlevons rien à la réalité désignée.</p> <p>Ainsi, l’homme a créé une grande variété de systèmes de notation mathématique, mais les opérations s’appliquent toutes de la même manière. Seulement, certaines notations sont plus faciles à comprendre et à opérer pour l’esprit humain : faire des opérations avec des chiffres arabes est plus facile pour le cerveau humain qu’avec un système binaire. Cependant, les calculs, eux, restent les mêmes. 7+5 = 12 ; 111+101 = 1100 ; 7+5 = C (en hexadécimal).</p> <p>De même, nous aurions très bien pu nommer et écrire les nombres autrement, dans un autre ordre, cela ne changerait rien aux réalités désignées. Par exemple, si nous avions décrété que les premiers nombres commençaient ainsi : 2, 8, 0, 5, 6, 9, 3, 4, 7, 1. Le résultat de 8+5 serait 6… « 8 » représente ici une unité, « 5 » en représente trois, nécessairement le résultat sera quatre unités, représenté ici par le caractère « 6 ».</p> <p>Si ces calculs semblent absurdes, ils montrent une chose : le fonctionnement mathématique du monde ne dépend pas de l’homme seul. Ce n’est pas l’homme qui a décrété qu’en ajoutant deux moutons à un groupe de trois moutons, il y en aurait cinq. La seule chose que l’homme a inventée, c’est le fait de nommer « deux » quand il y a deux unités.</p> <p>Ainsi, même si l’homme ne nommait pas les choses – ou s’il n’existait pas – si un seul cheval rencontre un autre cheval seul dans la nature, ils seront au moins momentanément deux l’un à côté de l’autre. Cette réalité concrète mathématique nous dépasse, on ne la choisit pas, elle est.</p> <p>En somme, l’homme n’a pas inventé les mathématiques. Cela semble même évident avec les formules mathématiques. Par exemple, la propriété des triangles rectangles qui permet de dire que le carré de l’hypoténuse est égal à la somme des carrés des deux autres côtés n’est pas une invention de l’homme, mais bien une découverte. Cette réalité est vraie quelles que soient les circonstances, peu importe le lieu, peu importe l’époque (à condition de travailler dans un plan).</p> <p>Si l’homme n’a pas inventé les mathématiques, il a en revanche bien inventé le système de notation qui permet de réaliser des calculs mathématiques de manière matérielle (dans le sens large), et d’exprimer ainsi une abstraction de ce qui se déroule sous nos yeux. Mais la réalité, elle, ne change pas.</p> <h2 id="distinction-ente-langage-et-connaissance"><span id="anchor-2"></span>Distinction ente langage et connaissance</h2> <p>Il aurait été facile de dire que les mathématiques ont été inventées par l’homme seul. Pourtant, comme nous venons de le montrer, l’homme n’en a inventé que le système de notation, l’outil qui lui permet d’exprimer les réalités observées. Cet outil permet de déduire, par des raisonnements logiques, de nouvelles conclusions à partir d’observations concrètes. C’est par exemple ce qui s’est passé – dans le domaine de la physique – avec le Boson de Higgs. L’homme a postulé son existence en 1964 grâce à notre maîtrise des formules mathématiques et physiques, grâce aux outils logiques que nous avons <em>découverts</em> (et non inventés), mais ce n’est qu’en 2012 (soit 48 ans plus tard) que nous l’avons concrètement observé pour la première fois.</p> <p>De fait, nous voyons ici de manière évidente et explicite que la réalité s’impose à l’intelligence de l’homme. Les logiques mathématiques, philosophiques, tout comme le Boson de Higgs, ont été <em>découvertes</em>. En revanche, ce qui change, c’est la manière de nommer et d’exprimer la réalité.</p> <p>Ainsi, il ne faut pas confondre langage et connaissance.</p> <p>Le langage est un outil que l’homme <em>invente</em> pour exprimer des réalités. La connaissance, c’est ce que l’homme retient de la réalité dans son esprit.</p> <p>Ainsi, le langage peut changer, la connaissance, elle, ne change pas. Une fleur, « flower », « 一朵花 », « цветок » ou « Blomst » sont autant de manières de désigner la même réalité.</p> <p>En somme, le langage est une pure création humaine et ne dépend de rien d’autre que lui-même. C’est l’homme qui a inventé arbitrairement la phonétique et l’écriture associées à chaque réalité afin de communiquer efficacement avec les autres hommes. L’homme est celui qui a nommé les réalités. Cette affirmation rejoint par ailleurs ce qui est dit dans la Bible : « Avec de la terre, le Seigneur Dieu modela toutes les bêtes des champs et tous les oiseaux du ciel, et il les amena vers l’homme pour voir quels noms il leur donnerait. C’étaient des êtres vivants, et l’homme donna un nom à chacun. L’homme donna donc leurs noms à tous les animaux, aux oiseaux du ciel et à toutes les bêtes des champs. » (Genèse, 2, 19-20)</p> <p>Mais l’homme n’est pas lui-même à l’origine des réalités. La connaissance préexiste au langage. La réalité existe indépendamment du langage, ce dernier ne permettant que de l’exprimer. Le langage n’est qu’un outil pour communiquer la connaissance de certaines réalités à d’autres personnes, mais n’est pas lui-même la connaissance. La réalité, comme nous l’avons montré avec les sciences dures, ne dépend absolument pas de l’homme.</p> <p>Ainsi, la connaissance n’est pas une construction pure de l’esprit. La connaissance, c’est le fait d’intégrer et de garder une réalité dans son esprit. La réalité peut être acquise aussi bien à l’aide des sens (quand on voit un objet par exemple), tantôt par le raisonnement et le langage (comme le fait cet article par exemple).</p> <p>L’étymologie même du mot connaissance montre bien la dépendance de l’esprit à la réalité. En effet, le mot connaissance vient du latin « <em>noscere</em> » qui désigne le fait d’être « <em>familiarisé avec</em> », « <em>être informé de</em> ». En d’autres termes, la connaissance consiste à garder dans son esprit une <em>abstraction</em> – ou le <em>concept</em> – de la réalité. On ne garde évidemment pas la réalité elle-même : il serait en effet difficile, par exemple, de faire entrer une fusée <em>Ariane 6</em> dans notre boîte crânienne.</p> <h2 id="langage-et-connaissance-en-philosophie"><span id="anchor-3"></span>Langage et connaissance en philosophie</h2> <p>L’« erreur moderne » est donc de faire un raccourci entre <em>langage</em> et <em>connaissance</em>. Certes, le langage est une pure invention de l’homme, mais les notions et les concepts associés au langage, plus généralement la connaissance, désignent des réalités qui, elles, ne sont pas invention de l’homme.</p> <p>Ce qui est vrai en science est tout aussi vrai en philosophie.</p> <p>Les mathématiques ne sont pas une construction de l’esprit. D’une part, l’homme a <em>découvert</em> les formules mathématiques (connaissance qui s’impose à son intelligence), et d’autre part, il a inventé la manière dont il exprime cette connaissance. De même en philosophie, les notions et les concepts ne sont pas des inventions de l’esprit humain, mais ce sont les moyens de les exprimer qui sont des inventions de l’homme. De telle sorte que l’herbe n’a pas la même couleur que le ciel, quelle que soit notre manière de nommer les couleurs.</p> <p>L’homme ne peut donc pas inventer sa propre vérité. Si l’homme exprime quelque chose qui est contraire à la réalité, alors il est dans l’erreur ou le mensonge.</p> <p>De même, si x+6=18, je serais dans l’erreur si je dis que x=0… même dans ma propre conception des maths, qui serait alors elle-même erronée.</p> <p>De même, les concepts philosophiques ne dépendent pas de moi. La vérité est l’adéquation de l’intelligence à la réalité. Ainsi, les notions de bien et de mal ne dépendent pas <em>uniquement</em> de moi, de <em>ma</em> conception du monde (qui peut être erronée).</p> <p>En revanche, certaines connaissances peuvent être vraies dans un espace réduit ou à un moment donné seulement. Par exemple – et certains l’utilisent comme argument en faveur de la pensée moderne – si je dis que j’ai froid et que mon voisin lui dit avoir chaud, cela ne veut pas forcément dire que l’un ment et l’autre non. Mais comme le souligne la structure de la phrase, « j’ai » désigne la personne individuelle et n’implique en rien ce que ressent l’autre. La vérité ici correspond à dire « j’ai froid » si effectivement mes sens me font sentir que j’ai froid. La vérité dépend d’un référentiel qui se rapporte à moi seul. Dire « il fait froid » pourrait être considéré comme un abus de langage… Car, cette phrase ne dit pas par rapport à quoi il fait froid. Elle ne pose pas le référentiel, le contexte auquel s’applique la phrase<a href="#fn3" class="footnote-ref" id="fnref3" role="doc-noteref"><sup>3</sup></a>.</p> <p>En revanche, si nous posons la question : « Dieu existe-t-Il ? », la phrase pose bien un référentiel universel. La réponse, une fois trouvée, s’impose alors à <em>tous</em>.</p> <p>Ainsi, les connaissances dépendent plus ou moins d’un référentiel donné, tout dépend de l’objet désigné et de sa portée.</p> <p>Parler de la question du bien et du mal peut en revanche être sensible. Certains actes concrets peuvent être mauvais dans un cas, bon dans l’autre. Par exemple, déplacer une chaise : cela peut être mauvais si le professeur d’une classe l’a expressément interdit (il y a désobéissance), mais cela peut être très bon si c’est pour dégager le passage à une personne âgée.</p> <p>De même pour la question « est-il bon de tuer un homme ? ». Tout le monde voudrait répondre « non ». Effectivement, naturellement, notre conscience nous porte (ou devrait nous porter) à vouloir défendre toute vie humaine. Ainsi, la question sortie de tout contexte nous pousse naturellement à apporter une réponse négative. Mais supposons que « un homme » désigne dans une situation particulière un terroriste qui garde en otage des femmes et des enfants qu’il tue successivement. Il peut alors sembler juste que tuer cet homme est un acte bon, non l’acte lui-même de tuer, mais parce que le contexte fait que la finalité n’est pas de tuer l’assaillant, mais de défendre les nombreux innocents.</p> <p>Ainsi, le bien et le mal font partie des notions difficiles à définir et à exprimer de manière absolue, car il y a toujours un décalage entre la réalité concrète, la connaissance et le langage. Mais nous pouvons retenir que les notions de bien et de mal, en elles-mêmes, ne dépendent pas de l’homme. De même pour tout autre concept philosophique, comme la liberté, la justice, la vérité, l’amour, etc. Certaines définitions sont fausses, d’autres sont justes, d’autres sont à améliorer. L’homme se doit donc de chercher la juste définition des choses avec objectivité. Il ne doit alors pas chercher à créer sa propre conception des réalités, mais bien les définir et les nommer conformément au langage existant afin d’ouvrir l’esprit à une connaissance plus aiguisée des concepts.</p> <p>Comment faire le bien et éviter le mal si nous n’avons pas d’abord connaissance de ce que sont le bien et le mal ? Tout simplement, en commençant par chercher <em>la</em> vérité.</p> <h2 id="conclusion"><span id="anchor-4"></span>Conclusion</h2> <p>Nous pouvons à présent affirmer que la vérité n’est pas une simple construction de l’esprit. Nous ne nommons pas les choses pour qu’elles correspondent à notre vision des choses, mais nous les nommons parce que nous découvrons qu’il existe des réalités très diverses dans le monde (un cheval n’est pas un âne). La vérité est plutôt l’adéquation de notre esprit aux choses que nous découvrons. Et le langage a été inventé pour exprimer cette vérité de la façon la plus précise possible.</p> <p>Pour cette raison, il est important de s’entendre sur la définition des mots. Si chacun a sa propre définition des mots, alors pourquoi utiliser le langage ? Le but du langage, justement, est de désigner des réalités afin de les distinguer entre elles. Ainsi, plus une langue a de mots, plus cette langue sera capable de distinguer des réalités subtiles, et permettra à leurs locuteurs d’avoir une grande liberté de réflexion et d’expression. Dans le cas contraire, cela peut amener à des incompréhensions. C’est d’ailleurs tout le jeu des traducteurs. Par exemple, comment traduire en français « <span id="anchor-5"></span>Estimated time of arrival » ? La réponse dépend du contexte : « Time » peut vouloir dire « temps » ou « heure ». Ici, la distinction entre l’heure et le temps n’est pas faite, là où le français fait cette distinction plus nettement.</p> <p>Retenons donc qu’utiliser les mots à bon escient est important. Le travail de nos ancêtres pour créer les mots et définir les réalités qu’ils désignent n’est donc pas là pour nous asservir. Bien au contraire, ils sont là pour nous libérer, pour mettre en lumière les subtilités de la réalité, pour nous aider à communiquer entre nous et mieux comprendre le monde. La langue est par conséquent l’un des héritages les plus précieux d’une génération à l’autre.</p> <p>L’erreur moderne réside donc dans la confusion entre langage et connaissance. Nous avons confondu ce que l’homme nomme avec la réalité qui est nommée.</p> <p>Face à de nombreux problèmes aujourd’hui, une part de la population change sa définition de ce qui est bien ou mal… Par exemple, agir en écologiste serait bien, le reste serait mal… Voilà une affirmation où la définition du bien et du mal est purement inventée par l’homme et ne puise dans aucune vérité objective.</p> <p>Souvent, ces mêmes personnes ne définissent pas les termes qu’ils utilisent. Les mots ne sont plus tant désignés pour la réalité qu’ils désignent que pour revendiquer une position, une manière d’agir. Pensons-nous que les notions de gauche et de droite existent pour désigner une réalité objective ? Ou plutôt pour s’opposer l’un à l’autre ?! Car, selon que la personne est d’un bord ou de l’autre, la définition de ces deux termes va changer.</p> <p>Tristan Harris, développeur chez Google, témoignait à propos de l’ingérence des IA dans les réseaux sociaux : « si on n’est pas d’accord sur le fait même que la vérité existe, on est foutu. La vérité, c’est la clé. »</p> <p>Les sociétés humaines ne peuvent fonctionner que si nous nous attachons à la vérité, à ce que les choses sont. Quand on refuse la vérité, on refuse l’ordre qui ordonne la nature au bien. Quand on refuse la vérité, on agit contre l’ordre de la nature tant au sens large (nature des choses) qu’au sens de l’environnement.</p> <p>Nous devons cesser de vouloir créer nos propres réalités. Au contraire, nous devons découvrir ce qu’est objectivement la <em>justice</em>, la <em>liberté</em>, le <em>bien</em>, le <em>mal</em>, et toutes ces autres notions si importantes à la vie en société. C’est la seule manière d’assurer un équilibre qui tend à la paix et au bonheur de tous.</p> <section class="footnotes footnotes-end-of-document" role="doc-endnotes"> <hr /> <ol> <li id="fn1" role="doc-endnote"><p>Rappelons simplement la distinction entre chiffres et nombres. Les chiffres sont à l’alphabet, ce que les nombres sont aux mots. Les chiffres sont des caractères qui permettent d’écrire des nombres qui, eux, désignent une quantité.<a href="#fnref1" class="footnote-back" role="doc-backlink">↩︎</a></p></li> <li id="fn2" role="doc-endnote"><p>Un individu = « | »<a href="#fnref2" class="footnote-back" role="doc-backlink">↩︎</a></p></li> <li id="fn3" role="doc-endnote"><p>Ce qui n’empêche pas de comprendre très bien la phrase au vu des circonstances.<a href="#fnref3" class="footnote-back" role="doc-backlink">↩︎</a></p></li> </ol> </section> /article/2024-04-20_Langage%20et%20connaissance/ Mon, 20 Jan 2025 00:00:00 +0100 Suivre l'actualité sans être manipulé, est-ce possible ? /article/2025-01-22_Suivre%20l'actualit%C3%A9%20sans%20%C3%AAtre%20manipul%C3%A9,%20est-ce%20possible%20%3F/ Plongez dans les mécanismes de la manipulation médiatique et découvrez comment les médias et les réseaux sociaux exploitent votre attention. Cet article propose des solutions concrètes pour accéder à une information fiable et reprendre le contrôle de votre actualité. <p style="float:left;margin-right:10px;"><img alt="icône" width="120" src="/article/2025-01-22_Suivre%20l'actualit%C3%A9%20sans%20%C3%AAtre%20manipul%C3%A9,%20est-ce%20possible%20%3F//icon.webp" /></p> <p>Entre les médias qui sont, pour la majorité, sous contrôle de milliardaires, et les réseaux sociaux qui ciblent le contenu en fonction de chaque personne, est-il vraiment possible de suivre l’actualité sans se faire manipuler&nbsp? La réponse est&nbsp: oui, il y a deux solutions possibles.</p> <p>Avant de donner les réponses, expliquons la source du problème qui permet et favorise la manipulation.</p> <p><em>Note&nbsp: dans cet article, nous n’aborderons que la presse écrite. Certains parallèles pourront être faits avec la radio et la télévision.</em></p> <h2 id="la-source-du-problème-lattention.">La source du problème&nbsp: l’attention.</h2> <p>L’histoire de la presse nous apprend que la qualité de l’information dépend directement de la manière dont le journal est distribué. On estime que l’histoire de la presse papier s’est déroulée en trois étapes.</p> <h3 id="la-presse-politique">1. La presse politique</h3> <div style="margin-left:20px;"> <p>Au XIXe siècle, la presse était avant tout <strong>un outil de propagande politique</strong>. Les journaux, souvent gérés par une seule personne (à la fois journaliste, rédacteur, imprimeur), avaient une portée locale et s’adressaient à un public restreint. Leur objectif&nbsp? Diffuser des idées politiques ou philosophiques, souvent en lien avec l’actualité. Mais cette presse avait un impact limité. Elle appartenait davantage au domaine de l’édition qu’à celui de la presse.</p> </div> <h3 id="la-presse-à-scandale">2. La presse à scandale</h3> <div style="margin-left:20px;"> <p>Tout change en 1833 avec le <em>New York Sun</em> de Benjamin Day. Le journal <strong>se vend désormais dans la rue, à la criée</strong>. Ce simple changement de modèle économique bouleverse la manière de présenter l’information. Pour vendre, il faut <strong>capter l’attention</strong> immédiate du passant. Comment&nbsp? En jouant sur les émotions&nbsp: la colère, la peur, la tristesse, mais aussi l’enthousiasme. En effet, rapidement, les journaux ont observé que les ventes bondissaient lors d’évènements tragiques. Ryan Holiday, auteur de <em>Croyez moi, je vous mens</em> nous rapporte que le plus gros tirage de l’histoire du <em>Herald</em> fut le bombardement de Fort Sumter. Suite à quoi, les journalistes auraient réclamé la guerre hispano-américaine.</p> <p>En somme, les titres sont conçus pour être accrocheurs, les images choquantes, et les rumeurs se transforment en « faits ». Les journalistes n’hésitent plus à inventer ou déformer la réalité. Le but&nbsp: faire <em>vendre</em>. Un journal qui ne se vend pas s’assure une mort rapide.</p> </div> <h3 id="la-presse-morderne">3. La presse morderne</h3> <div style="margin-left:20px;"> <p>Face à ce déluge de sensationnalisme, le <em>New York Times</em> introduit un nouveau modèle&nbsp: <strong>la presse à abonnement</strong>. L’idée est simple&nbsp: offrir une information de qualité à un prix abordable. Le système repose sur un autre équilibre&nbsp: gagner la confiance des lecteurs pour qu’ils soient fidèles. Si le journal déçoit, l’abonné ne renouvellera pas. Ce système repose sur la confiance et pousse les médias à <strong>privilégier la rigueur journalistique</strong> plutôt que les coups médiatiques.</p> </div> <p>En résumé, la qualité de l’information diffusée par la presse est étroitement liée à la certitude des journalistes de capter l’attention du public. En d’autres termes, <strong>le véritable enjeu réside dans l’<em>attention</em></strong>. L’objectif principal de la presse est d’être lue, sans quoi elle perdrait toute pertinence. Les journalistes s’efforcent donc, par tous les moyens possibles, de fidéliser leur lectorat à leur propre presse pour faire face à celle de leurs concurrents. C’est leur unique moyen de subsistance&nbsp: sans public, ils ne peuvent pas gagner leur vie.</p> <h2 id="internet-une-révolution-de-linformation">Internet&nbsp: une révolution de l’information</h2> <p>L’arrivée d’Internet bouleverse la manière dont les informations sont distribuées. D’abord présenté comme une avancée majeure pour la démocratie, nous nous rendons compte aujourd’hui que ce n’est pas si évident.</p> <p>Il y a tout d’abord le <strong>problème de la sur-information</strong>. Les informations arrivent de toute part, nous ne savons plus où donner de la tête. Il y a tant d’informations que nous ingérons, qu’on en oublie de nous forger notre propre opinion, nous oublions de comprendre, nous oublions de réfléchir… malheureusement.</p> <p>Puis, avec ceci arrive le <strong>problème de la rémunération</strong>. Les blogs se rémunèrent le plus souvent par l’affichage de publicités. Pour cela, ils vendent de petits espaces où pourront s’afficher des pubs. Quand une pub s’affiche, ça leur rapporte de l’argent.</p> <p>À ce stade, il est facile de comprendre qu’avec un tel système, <strong>nous avons recréé la presse à scandale</strong>&nbsp:</p> <ol type="1"> <li><p><strong>Pour gagner de l’argent</strong>&nbsp: cela consiste à <em>maximiser le nombre de clics</em> sur chaque article. Le but de ces blogs est de pousser l’utilisateur à cliquer un maximum de fois. On se fiche de savoir s’il lit l’article. Le but, c’est qu’il change un maximum de fois de page pour afficher autant de fois des pubs.</p><p>Il n’est pas un hasard si, sur beaucoup de blog, les articles utilisent une largeur ridiculement petite de l’écran. De même, ne croyez pas que les interfaces ont été conçues pour être pratiques et agréables. Non, elles sont conçues pour que vous cherchiez les éléments nécessaire et que votre attention soit accaparée un maximum de temps par les pubs. C’est la raison pour laquelle ce blog adopte une interface complètement différente&nbsp: prendre le contre-pied de ce système et proposer un blog agréable mais avant tout pratique.</p></li> <li><p><strong>Maximiser son lectorat</strong>&nbsp: sur ce point, <strong>le blogging démultiplie les travers de la presse à scandale</strong> il y a un siècle. Ce ne sont plus quelques journaux qui se disputent le public, mais des millions de blogs qui sont en concurrence. Or, on estime que les utilisateurs passent en moyenne une minute sur un blog. On estime également que le blog dispose d’une seule seconde pour accrocher le visiteur. Ainsi, le blog se doit d’être accrocheur dès le premier regard. Ensuite, il lui faut des titres raccoleurs pour que les gens cliquent… Et que s'affichent d'autres publicités.</p></li> <li><p><strong>Le cas des réseaux sociaux</strong>&nbsp: les réseaux sociaux ne sont pas épargnés. Mais alors vraiment pas&nbsp! <strong>Les réseaux sociaux sont l’apothéose de la manipulation.</strong></p><p>C’est exactement la même chose que le blogging, à la différence que celui qui génère le contenu est le public, et non des rédacteurs. Ainsi, <strong>chaque personne est en compétition avec tous les autres utilisateurs</strong>. Et les algorithmes de recommandation sont là pour arbitrer qui est mis en avant ou non dans le but de maximiser l’attention volée aux utilisateurs. En d’autres termes, les personnes manipulent pour se faire entendre et voir en postant des propos choquant ou mensongers, et les algorithmes régulent ça pour démultiplier les effets de la manipulation. <strong>Il n’est pas un hasard si YouTube a changé son algorithme de recommandation</strong> pour mettre en avant les vidéos qui font réagir&nbsp: celles qui sont partagées et commentées&nbsp!</p> <blockquote> <p>Voici un exemple récent (pris au hasard) d’un post X révélateur de la manipulation ambiante sur le réseau social.</p> <p>Il s’agit du tweet de Clémence Guetté<a href="#fn1" class="footnote-ref" id="fnref1" role="doc-noteref"><sup>1</sup></a>. Ce post rassemble tous les ingrédients d’une manipulation millimétrée&nbsp:</p> <ol type="1"> <li><p>Une <strong>phrase d’accroche racoleuse</strong> mais qui ne dit rien&nbsp: “<em>L’extrême droite, au pouvoir, c’est ça.</em>”</p></li> <li><p>Une seconde phrase en guise de conclusion qui <strong>implique le public</strong> dans sa démarche&nbsp: “<em>Résistez, militez, votez […]</em>”. Et qui <strong>incite à la réaction immédiate</strong> en créant une tension sur une limite de temps inconnue&nbsp: “<em>[…] avant qu’il ne soit trop tard.</em>”</p></li> <li><p>Un <strong>extrait de 9 secondes</strong> d’une vidéo de Musk (la vidéo originale de Musk dure 3m52s)&nbsp: une vidéo suffisamment courte pour que tout le monde la regarde. Elle est rognée de manière grossière&nbsp: ceux qui sont de son bord la soutiendront, ceux qui ne le sont pas iront chercher la vidéo originale pour débunker.</p></li> <li><p>Aucun mensonge&nbsp: <strong>uniquement des sous-entendus</strong>. Rien n’est dit. Le public doit comprendre de lui-même que Musk aurait fait un salut nazi… Ce qui n’est évidemment pas le cas, et ce que n’a pas dit Clémence Guetté. Mais le public est poussé à comprendre ce qui ne doit pas être compris. Le public est impliqué dans la compréhension même du message, et favorise donc la réaction (puisqu’il s'est déjà engagé intellectuellement pour comprendre le message).</p></li> </ol> <p>Résultat&nbsp: <strong>tout le monde est en colère et tout le monde réagit</strong>. Mais le véritable but était uniquement de se donner un coup de pub, se mettre sur le devant de la scène. Le meilleur moyen était d’utiliser la colère. Et Clémence l’a parfaitement compris et utilisé. Elle n’en a rien à faire de la vérité. Le vrai but est atteint&nbsp: 900000 vues, 3500 réponses, 3000 repartages, 14000 j’aime… Une réponse qui tente de rétablir la vérité aura au mieux 2 fois moins de vues et de réactions. La bataille est perdue d’avance, parce qu’on ne joue pas sur le même terrain.</p> <p>Combien sont tombés dans le piège&nbsp? <strong>Combien ont fait le jeu de Clémence Guetté&nbsp?</strong> Méritait-elle qu’on lui donne cette visibilité&nbsp? Elle a placé les personnes de droite exactement là où elle voulait. Mais le mal est là&nbsp: son post a fait des milliers de vues et des réactions toutes plus déchaînées les unes que les autres.</p> <p>Elle savait très bien ce qu’elle faisait, c’était grotesque et grossier, mais elle n’est pas fautive. Elle n’a jamais dit qu’il s’agissait d’un salut nazi. Il n’y a pas eu de mensonge. Il n’y a eu que manipulation. Et elle a gagné.</p> </blockquote> </li> <p>Ceci n’est qu’un exemple, la quasi-totalité des posts viraux sont comme ça. Nous sommes manipulés pour réagir et donner de notre temps à la plateforme. De cette manière, un maximum de publicités atteignent leur but. La plateforme gagne plus d’argent. Et la personne qui sait tirer parti de ce système gagne en visibilité.</p> <p><strong>Tout n’est que manipulation.</strong></p> </ol> <h2 id="les-solutions">Les solutions</h2> <p>À présent que nous comprenons un peu comment fonctionne le système médiatique et les fondements de la manipulation, nous pouvons présenter deux solutions pour suivre une actualité de qualité sans se faire manipuler.</p> <p>Les solutions ont en commun un aspect&nbsp: <strong>renverser le système médiatique pour que celui qui a le pouvoir soit le lecteur.</strong></p> <p>En effet, nous voyons qu’à travers la presse à scandale, les blogs et les réseaux sociaux, ceux qui exercent en premier le pouvoir sont les rédacteurs. Ce sont bien eux qui mettent en place des stratégies pour capter l’attention des utilisateurs, et non l’utilisateur qui choisit ce qu’il va voir et lire.</p> <p><strong>Il faut au contraire que ce soit le lecteur qui choisisse ce qu’il lit</strong>, de manière intelligente et responsable. Les solutions consistent donc à replacer l’utilisateur comme celui qui contrôle les informations qu’il voit.</p> <h3 id="la-presse-à-abonnement">1. La presse à abonnement</h3> <p>C’est la première solution&nbsp: revenir au système de la presse moderne. En d’autres termes, payer pour lire des informations. Ce système a fait ses preuves et repose sur un équilibre naturel&nbsp: le lecteur s’engage à payer pour un certain temps, et le média sera obligé de fournir des informations de qualité s’il veut garder son client.</p> <p>Le choix n’est pas impulsif comme le serait un clic. Il est réfléchi, et il est librement posé par le lecteur.</p> <h3 id="les-flux-rss">2. Les flux RSS</h3> <p>C’est exactement le même principe que l’abonnement, mais c’est gratuit, et ça fonctionne pour la majorité des blogs.</p> <p>Aujourd’hui, la très grande majorité des blogs obtiennent leurs visiteurs via Google ou les réseaux sociaux. En d’autres termes, <strong>les blogueurs n’ont que des <em>lecteurs éphémères</em></strong>, qui arrivent sur leur site à la suite d’une recherche ou d’un post sur les réseaux sociaux.</p> <p><strong>Si les lecteurs étaient fidèles, les blogs n’auraient pas besoin de créer des informations à scandale pour tenter de garder le visiteur. Ils se concentreraient sur le contenu.</strong></p> <p>Si la majorité des blogs ne poussent pas à l’utilisation des flux RSS, c’est pour une raison&nbsp: ça ne rapporte pas assez et pas assez vite. Tout d’abord, il n’y a pas de pub. D'autre part, les flux RSS ne permettent pas de traquer le nombre de vues. La solution n'est donc pas idéale pour savoir si on a un vaste public, encore moins pour s'assurer que notre article a été lu des milliers de fois.</p> <blockquote> <em>C’est pour cette raison que le RSS n’a jamais vraiment atteint le grand public. Il s’oppose directement aux intérêts de ceux qui auraient voulu pousser les lecteurs à l’utiliser. Malgré les merveilleux témoignages de lecteurs satisfaits et les investissements importants de Google et consort, il ne faut pas s’étonner de cet échec. Par conséquent, si, aujourd’hui, les boutons RSS disparaissent des blogs et des moteurs de recherche, dites-vous bien qu’il s’agit d’<strong>un acte volontaire, pour que les lecteurs puissent être plus facilement trompés</strong></em>. <p style="text-align: right;font-style: normal;">Ryan Holiday, <em>Croyez-moi, je vous mens — Confessions d’un manipulateur des médias</em>, 2015</p> </blockquote> <p>En somme, <strong>le flux RSS est une véritable solution pour suivre l’actualité</strong>. Il fonctionne sur le même principe que le système d’abonnement. On utilise une application&nbsp: un agrégateur de flux RSS<a href="#fn2" class="footnote-ref" id="fnref2" role="doc-noteref"><sup>2</sup></a>. Dans cette application, on peut inscrire autant de sites qu’on le souhaite. Et l’application se charge de récupérer les derniers articles des blogs auxquels l’utilisateur s’est abonné. C’est simple, c’est propre, et c’est l’utilisateur qui choisit ce qu’il lit ou ne lit pas.</p> <h2 id="conclusion">Conclusion</h2> <p>Pour terminer, il faut retenir que la majorité des blogs gratuits et les réseaux sociaux sont des machines à manipuler.</p> <p>Avec l’arrivée d’Internet, la surinformation oblige les créateurs de contenu à se rendre visible en utilisant des techniques de manipulation.</p> <p><strong>La seule manière de suivre l’actualité en se protégeant de la manipulation est de s’abonner soi-même aux sources qu’on souhaite.</strong> Ainsi, le lecteur est au centre du processus de décision de ce qu’il voit. S’il n’est pas satisfait, il se désabonnera. Sinon, il continuera de lire les articles qui lui plaisent. Par ailleurs, s’il reste fidèle aux blogs qu’il suit, cela est gratifiant pour les créateurs de contenu.</p> <p><strong>Ce système est simplement vertueux. Nous devons l’adopter&nbsp!</strong></p> <br> <hr> <ol> <li id="fn1" role="doc-endnote">Je ne suis pas sûr qu’elle mérite une vue de plus, mais je mets quand même la source&nbsp: https://x.com/Clemence_Guette/status/1881454836836897106 <a href="#fnref1" class="footnote-back" role="doc-backlink">↩︎</a></li> <li id="fn2" role="doc-endnote">Voici deux noms d'applications simples et efficaces que j'ai pu tester : <a href="https://f-droid.org/packages/org.decsync.flym/">Flym DecSync</a> sur Android et <a href="https://flathub.org/apps/io.gitlab.news_flash.NewsFlash">NewsFlash</a> sur Linux. Mais libre à vous de trouver ce qui vous convient le mieux ;) <a href="#fnref2" class="footnote-back" role="doc-backlink">↩︎</a></li> </ol> /article/2025-01-22_Suivre%20l'actualit%C3%A9%20sans%20%C3%AAtre%20manipul%C3%A9,%20est-ce%20possible%20%3F/ Wed, 22 Jan 2025 00:00:00 +0100 Une analogie des moyens de communication numérique /article/2025-02-05_Une%20analogie%20des%20moyens%20de%20communication%20num%C3%A9rique/ Avez-vous déjà réfléchi à ce que représentent vos messageries au quotidien ? Dans cet article, nous vous proposons des analogies éloquentes pour mieux saisir les enjeux des moyens de communication sur votre vie privée. <p style="float:left;margin-right:10px;"><img alt="icône" width="130" src="/article/2025-02-05_Une%20analogie%20des%20moyens%20de%20communication%20num%C3%A9rique//icon.webp" /></p> <p>Un reproche que l’on peut souvent faire avec ce qui est virtuel, c’est que ce n’est pas très concret… Aussi, il est souvent <strong>difficile de se représenter la portée intrinsèque d’un outil numérique</strong>, le besoin précis auquel il répond. Il est difficile d’évaluer les conséquences de nos écrits à travers les différentes messageries que nous utilisons. Nous voulons répondre à un besoin, et nous prenons souvent le premier outil, le plus simple ou le plus médiatisé, au détriment de sa capacité à répondre à un besoin objectif clairement identifié et compris.</p> <p>Dans cet article, je vous propose une <strong>série d’analogies pour explorer l’utilité réelle des différentes formes de communication</strong> numérique.</p> <h3 id="les-réseaux-sociaux-publics">1. 🌐 Les réseaux sociaux publics</h3> <p><strong>Ce que j’appelle “réseaux sociaux publics” sont les plateformes où nous publions des informations de façon absolument publique.</strong> Tout le monde peut y accéder sans aucune limitation. Les plus connues sont <em>YouTube</em>, <em>Facebook</em>, <em>Instagram</em>, <em>TikTok</em>, <em>X</em>, <em>LinkedIn</em>, etc.</p> <p>J’inclurais également sous le terme “réseaux sociaux publics” <strong>les messageries permettant de publier des informations à un public non formellement restreint</strong>. Par exemple, la fonctionnalité des <em>stories</em> sur <em>WhatsApp</em> entre dans ce cadre&nbsp: le message est envoyé à toutes les personnes définies par la fonctionnalité. Et les personnes qui le reçoivent ne savent pas nécessairement qui d’autre l’a vu passer.</p> <p><strong>L’analogie</strong>&nbsp: cette forme de réseau social est équivalente à publier un article dans le journal, à s’exprimer à tous en pleine rue, ou encore à faire un show dans un théâtre ouvert au public.</p> <p>Par exemple, on pourrait dire que poster une story sur WhatsApp revient au même que de prendre la parole ouvertement entre collègues pour clamer ce que l’on veut dire. Poster une photo sur Instagram revient à afficher le message sur un panneau publicitaire. Verra le message qui passera devant.</p> <h3 id="les-groupes-publics">2. 🗣️ Les groupes publics</h3> <p>Je définirais les groupes publics comme l’ensemble des <strong>groupes formellement établis mais accessibles à tous</strong> d’une manière ou d’une autre. Entrent dans ce cadre les groupes publics <em>Telegram</em>, <em>Signal</em>, <em>WhatsApp</em>, <em>Messenger</em>, etc.</p> <p><strong>L’analogie</strong>&nbsp: cette forme de messagerie est équivalente à organiser un événement public sur inscription où nous pouvons prendre la parole devant toutes les personnes présentes. On sait publiquement qui est présent dans le groupe, on connaît (au moins visuellement) qui va nous entendre. Le public n’est donc pas illimité, mais il reste accessible à toute personne qui s’intéresse à l’événement.</p> <h3 id="les-groupes-privés">3. 👥 Les groupes privés</h3> <p>Les groupes privés consistent à <strong>rassembler des personnes clairement identifiées</strong>. Ils sont accessibles à un public restreint et formellement identifié. Dans ce type de groupe, un contrôle est fait des personnes qui rejoignent et quittent le groupe (au moins implicitement). L’ensemble de nos groupes entre amis, famille, collègues entre dans cette définition.</p> <p><strong>L’analogie</strong>&nbsp: cette manière de communiquer est équivalente à se retrouver dans un lieu privé pour discuter. Le contenu sera souvent informel, permettant de parler facilement de divers sujets sans distinction. On peut également facilement aborder des sujets privés car on connaît bien le public auquel on s’adresse.</p> <h3 id="les-communications-personnelles">4. 📧 Les communications personnelles</h3> <p>Pas besoin de définir&nbsp: c’est la <strong>communication en tête-à-tête</strong>.</p> <p>Il existe de très nombreuses manières de garder le contact avec une personne. Détaillons donc l’analogie pour chacune de ces formes.</p> <ul> <li><strong>Les appels</strong>&nbsp: parler en tête-à-tête.</li> <li><strong>Le mail</strong>&nbsp: équivalent de la lettre papier.</li> <li><strong>Les vocaux</strong> (chat vocal)&nbsp: équivalent de parler en tête-à-tête mais de manière plus formelle. Cette forme impose de donner tous les éléments de réponse avec clarté car on n’a pas le retour immédiat du correspondant pour savoir si on a été compris.</li> <li><strong>Chat écrit</strong>&nbsp: Bien que ce soit la méthode la plus courante aujourd’hui, elle n’a pas de véritable équivalent concret. L’analogie la plus proche serait de laisser des post-it à la personne avec qui on communique.</li> </ul> <h2 id="la-subtilité-du-chiffrement">🔐 La subtilité du chiffrement</h2> <p><strong>Le chiffrement ajoute une nuance</strong> pour la quasi totalité des formes de communication numérique. <em>Nous ne parlerons ici que de chiffrement de bout en bout. Cette forme de chiffrement consiste à rendre le message illisible pour tout destinataire non convenu. Une personne qui n’est pas clairement identifiée comme destinataire du message ne pourra pas le lire.</em></p> <p>Précisons donc nos analogies.</p> <h3 id="les-réseaux-sociaux-et-groupes-publics-un-impact-faible">Les réseaux sociaux et groupes publics&nbsp: un impact faible</h3> <p>Pour les réseaux sociaux publics, c’est bien simple&nbsp: <em>le chiffrement de bout en bout n’y a aucun intérêt</em>, car cela va à l’encontre du principe même consistant à publier l’information au plus grand public possible.</p> <p>Pour les groupes publics, le chiffrement n’a <em>pas un très grand intérêt</em> non plus. Un groupe public avec chiffrement de bout en bout permet néanmoins de préserver une certaine confidentialité comme le permettrait un groupe privé, mais avec un aspect plus formel, souvent autour d’un thème particulier. Savoir que n’importe qui peut s’y joindre impose une certaine forme et une certaine tenue dans les propos qui sont partagés.</p> <p>En ce sens, nous pouvons assimiler ce style de groupe à un regroupement de personnes dans un lieu plus discret mais qui reste malgré tout ouvert à tous. Par exemple, une conférence ouverte au grand public, mais qui a lieu dans une salle privée. Ce qui s’y dit n’est pas secret ni personnel, mais seuls les participants savent directement ce qui s’y passe.</p> <h3 id="les-groupes-privés-et-communications-personnelles">Les groupes privés et communications personnelles</h3> <p>Pour les deux autres formes de communication, <strong>le chiffrement de bout en bout apporte une réelle différence</strong>, car il assure un cadre strictement privé autour de ce qui se dit. Il y a une nuance très nette qui nous oblige à préciser notre précédente analogie.</p> <ul> <li><p><strong>1. 🚫 Communications non chiffrées</strong></p> <p>Consiste à se retrouver dans un lieu privé entre personne clairement identifiée, mais où <strong>n’importe quelle personne indiscrète peut écouter</strong>. Concrètement, cela revient à se retrouver dans le jardin d’un ami et parler à voix forte alors qu’on se trouve en pleine ville, entouré de voisin et de rues passantes.</p></li> <li><p><strong>2. 🔒 Communications chiffrées</strong></p> <p>De la même manière, cela consiste à se retrouver dans un lieu privé entre personne clairement identifiée. Cependant, cette fois-ci <strong>on se sait clairement à l’abri des oreilles indiscrètes</strong>. Cela consiste concrètement à se retrouver dans la maison d’un membre du groupe et à discuter dans un lieu sans accessibilité possible à un public non souhaité.</p></li> </ul> <h3 id="limpact-du-chiffrement-sur-nos-dispositions-à-communiquer">❓️ L’impact du chiffrement sur nos dispositions à communiquer</h3> <p>Le chiffrement n’a donc un réel impact que dans un cadre restreint. <strong>Quelle est précisément la nature de cet impact&nbsp?</strong></p> <p>Pensez-vous réellement que vous allez tenir la même conversation avec votre interlocuteur si vous êtes dans une rue passante ou si vous êtes seul chez lui&nbsp? La réponse devrait être&nbsp: non.</p> <p><strong>La différence, c’est l’intimité.</strong> Dans une conversation privée qu’on sait être loin de toutes oreilles indiscrètes, on peut plus facilement se révéler à l’autre, dire des choses qui nous tiennent à coeur, révéler nos états-d’âmes. Les conditions de notre environnement déterminent fortement notre capacité à parler de choses personnelles. Et c’est parfaitement humain&nbsp!</p> <blockquote> <p>L’homme est fait comme ça&nbsp: l’intimité nous pousse ou non à nous révéler. Le chiffrement est le moyen par lequel l’homme peut entretenir un lien à distance à l’abri de tous les regards indiscrets.</p> <p>Il est donc important d’utiliser cette méthode dès lors que nous avons une conversation qui risque de comporter des éléments personnels. Respecter son intimité, numériquement comme réellement, c’est se respecter soi-même&nbsp!</p> </blockquote> /article/2025-02-05_Une%20analogie%20des%20moyens%20de%20communication%20num%C3%A9rique/ Wed, 05 Feb 2025 00:00:00 +0100 Jusqu'où le gouvernement va-t-il nous mettre sur écoute ? /article/2025-02-06_Jusqu'o%C3%B9%20le%20gouvernement%20va-t-il%20nous%20mettre%20sur%20%C3%A9coute%20%3F/ Le gouvernement pourrait bientôt accéder à vos messages privés. Mais serons-nous assez naïfs pour croire qu'il s'arrêtera là ? Cette loi s'attaque à notre intimité et à notre dignité humaine ! Ne fait-elle pas plus de mal que de bien ? <p style="float:left;margin-right:10px;"><img alt="icône" width="130" src="/article/2025-02-06_Jusqu'o%C3%B9%20le%20gouvernement%20va-t-il%20nous%20mettre%20sur%20%C3%A9coute%20%3F//icon.webp" /></p> <p><strong>Le gouvernement est en train de <a href="https://www.zdnet.fr/actualites/signal-whatsapp-les-senateurs-demandent-une-explosive-backdoor-dans-les-messageries-chiffrees-405423.htm">voter une loi</a> pour imposer aux messageries chiffrées de bout en bout¹ de fournir aux services de renseignement un accès aux contenus échangés. La raison&nbsp? “Sortir la France du piège du narcotrafic”.</strong></p> <p>D’un point de vue théorique et purement technique, <em>l’idée pourrait fonctionner</em>. Là n’est pas la question. Oui, accéder aux messages des personnes suspectées permettrait théoriquement d’endiguer le narcotrafic, la pédocriminalité… Et même la cybercriminalité qui tenterait d’exploiter les failles occasionnées dans les messageries lors de l’application des lois du gouvernement contre la criminalité 🙃️</p> <p>Théoriquement, même, on pourrait espionner l’ensemble de nos messages et interactions, brancher le tout sur une IA qui prédit nos comportements, détecte les signaux faibles révélateurs d’un comportement répréhensible futur. Alors on pourrait se faire arrêter préventivement pour se faire rééduquer, ou encore imaginer que le contenu en ligne soit ciblé pour nous manipuler et nous empêcher d’adopter ce comportement.</p> <p>Avec les technologies, on peut aller extrêmement loin pour empêcher le mal d’exister. Mais ne serait-il pas nécessaire de commencer par définir ce qu’est le mal avant de s’attaquer à lui&nbsp? <strong>La présente loi ne commet-elle pas plus de mal que de bien&nbsp?</strong> Que souhaitons-nous protéger, que souhaitons-nous combattre&nbsp?</p> <p><strong>La raison invoquée est-elle proportionnée au mal combattu&nbsp? Le moyen est-il juste&nbsp? N’est-ce pas un pas vers une surveillance abusive de nos vies privées&nbsp?</strong> C’est ce que nous allons étudier dans cet article.</p> <h2 id="une-analogie-révélatrice-de-la-loi-intrusive">Une analogie révélatrice de la loi intrusive</h2> <p>Nous avons vu dans notre <a href="https://www.cyberethique.fr/article/2025-02-05_Une%20analogie%20des%20moyens%20de%20communication%20num%C3%A9rique/"><em>précédent article</em></a> qu’à chaque forme de réseau social correspond un message plus ou moins public ou plus ou moins personnel.</p> <p>Ce qui est visé par la loi, ce sont les <a href="https://www.cyberethique.fr/article/2025-02-05_Une%20analogie%20des%20moyens%20de%20communication%20num%C3%A9rique/#les-groupes-priv%C3%A9s-et-communications-personnelles"><em>communications personnelles chiffrées</em></a>. Ces communications, nous le rappelons, sont celles que nous devrions <strong>naturellement utiliser pour tout ce qui a trait à notre vie personnelle</strong>. Elles reviennent au même que d’avoir une conversation personnelle, tête-à-tête dans un lieu à l’abri de tout regard indiscret.</p> <p><strong>Par analogie, la loi impose que les services de renseignement puissent pénétrer dans tous les lieux, y compris les plus privés, pour s’immiscer dans nos conversations d’ordre <em>intime</em>.</strong></p> <p>Se donner le droit de s’immiscer dans l’intimité des gens n’est pas justifiable. <strong>Ce qui n’existe pas dans la réalité ne devrait pas avoir sa place dans le cyberespace.</strong> Or, dans la réalité, on peut <strong>toujours</strong> se retrouver dans un lieu privé. Certains Chinois pourraient en témoigner.</p> <h3 id="la-dérive-inévitable-de-lintrusion-gouvernementale">La dérive inévitable de l’intrusion gouvernementale</h3> <p>Par ailleurs, si cette loi semble fonctionner d’un point de vue technique, elle ne le sera pas très longtemps. <strong>Il faudrait être naïf pour croire que les narcotrafiquants continueront d’utiliser des messageries vulnérables</strong> plutôt que d’adopter des messageries avec une sécurité accrue qui contournera facilement la loi. Non seulement cette loi fait un pas majeur dans la capacité du gouvernement à s’immiscer dans les conversations privées, mais <strong>elle incite les criminels à utiliser des messageries encore plus sécurisées</strong>.</p> <p>En réalité, cette loi, comme toutes les précédentes, ne fait qu’<strong>attiser la “course à l’armement” contre nos vies privées</strong>, au nom d’un combat contre la criminalité qui est tout aussi vain que d’essayer d’empêcher les gens de se parler en tête-à-tête. Ainsi, lorsque la loi se révélera insuffisante, le gouvernement demandera à avoir accès à davantage d’informations privées.</p> <blockquote> <p>Si le gouvernement se permet d’accéder à nos conversations privées en ligne, <strong>rien ne l’empêchera, en constatant l’insuffisance de cette mesure, de nous obliger à porter un micro en permanence pour surveiller nos échanges les plus intimes</strong>, même avec nos amis, nos proches et notre famille.</p> <p><strong>N’oubliez jamais que <em>la seule différence entre la loi adoptée et cet avertissement est le support : écrit vs verbal</em>.</strong></p> </blockquote> <p>L’intimité et la vie privée ne sont-elles pas un bien commun supérieur au mal qu’est la criminalité&nbsp? Ce mal pouvant d’ailleurs être combattu de nombreuses autres façons, sans s’attaquer au bien le plus fondamental d’un individu&nbsp: l’intimité.</p> <h2 id="lintimité-le-bien-le-plus-fondamental-de-lhomme">L’intimité&nbsp: le bien le plus fondamental de l’homme</h2> <p>Dans mon livre “<a href="https://www.cyberethique.fr/%F0%9F%93%96%EF%B8%8F%20L&#39;intimit%C3%A9%20Assi%C3%A9g%C3%A9e"><strong><em>L’intimité Assiégée</em></strong></a>”, vous découvrirez tous les enjeux et toutes les subtilités qui rendent ce genre de <strong>loi absolument immorale</strong>. Vous comprendrez comment cela <strong>impacte les individus</strong> dans leur <strong>liberté</strong>, dans <strong>ce qu’ils sont</strong> et dans leur <strong>capacité à distinguer le bien du mal</strong>. Vous verrez également de nombreuses autres subtilités, telles que la <em>place de la morale</em>, du <em>pouvoir</em>, de la <em>manipulation</em>, et les <strong><em>conséquences spirituelles</em></strong> que cela a sur l’homme.</p> <blockquote> <p>Il est urgent de défendre notre vie privée et notre intimité contre toute forme d’intrusion. C’est la frontière la plus fondamentale de l’homme. <strong>La violer, c’est violer la dignité de l’homme.</strong></p> <p><strong>Formons-nous</strong> à ces enjeux pour savoir faire face à ces attaques inadmissibles&nbsp!</p> <p><strong><a href="https://www.cyberethique.fr/%F0%9F%93%96%EF%B8%8F%20L&#39;intimit%C3%A9%20Assi%C3%A9g%C3%A9e#precommande">Précommandez dès maintenant</a> mon livre “L’intimité Assiégée”&nbsp!</strong></p> </blockquote> <hr /> <p>¹ Le chiffrement de bout en bout garantit que seuls les utilisateurs impliqués dans une communication peuvent lire les messages, en les chiffrant sur l’appareil de l’expéditeur et en les déchiffrant uniquement sur l’appareil du destinataire, empêchant ainsi tout intermédiaire d’accéder au contenu.</p> /article/2025-02-06_Jusqu'o%C3%B9%20le%20gouvernement%20va-t-il%20nous%20mettre%20sur%20%C3%A9coute%20%3F/ Thu, 06 Feb 2025 00:00:00 +0100 IA, source d'une crise religieuse majeure /article/2025-05-06_IA,%20source%20d'une%20crise%20religieuse%20majeure/ Le pire est à venir. Chaque mise à jour majeure de l'IA nous fait découvrir des capacités plus puissante de l'outil. Jusqu'à quand restera-t-il un outil ? Certains l'adorent déjà. Il s'agit d'une nouvelle religion. Qui y résistera ? <p>Si, comme l’explique <a href="https://lettreia.cyberethique.fr/">la lettre ouverte</a>, l’IA est source d’un danger réel non nul à l’échelle de l’humanité dans les prochaines décennies, un autre danger nous guette : celui de <strong>l’atteinte à la vie religieuse de l’homme</strong>. <a href="https://tribunechretienne.com/comment-lintelligence-artificielle-est-devenue-un-defi-ethique-majeur-pour-leglise/">Selon Mgr Polvani</a>&nbsp;: «&nbsp;<em>Certains courants transhumanistes rêvent de dépasser l’homme par la machine, niant ainsi l’unicité de l’être humain créé à l’image de Dieu. [...] L’Église catholique a toujours vu la nature comme réceptacle de la grâce. Si l’IA change notre conception de la nature humaine, elle peut aussi altérer notre vision de la grâce</em>&nbsp;». </p> <p>En effet, nous pouvons constater que le monde, en seulement trois ans, a pris goût à l’IA, lui accordant une place de plus en plus importante, tout en la laissant gagner une autonomie sans limites.</p> <p>La finalité, l’ambition, est claire : <strong>créer une IA supérieure à l’homme. L’homme souhaite <em>être dépassé</em>.</strong> Voilà le fondement de <strong>la plus grande crise anthropologique</strong> à laquelle nous allons devoir faire face.</p> <p>Dans un tweet publié le 21 avril<a href="#fn1" class="footnote-ref" id="fnref1" role="doc-noteref"><sup>1</sup></a>, jour du décès du pape François, Laurent Alexandre – transhumaniste influent en France – lance un sondage : un tiers des 1 200 réponses souhaite un pape qui connaisse l’IA. Quatre mois plus tôt, BFM Business publiait un reel Instagram<a href="#fn2" class="footnote-ref" id="fnref2" role="doc-noteref"><sup>2</sup></a> vantant la mise en place de ChatGPT dans un confessionnal pour « <em>parler avec Jésus</em> ». Si l’IA s’élève au plus haut rang, celui de la religion, ça n’est absolument pas un hasard.</p> <p>Fondamentalement, l’IA ne soulève pas seulement des questions liées à l’emploi, à la culture ou même à la politique. Elle touche quelque chose de bien plus profond. <strong>L’IA soulève avant tout des interrogations d’ordre religieux. <em>L’homme veut être dépassé</em>. Il veut voir plus grand que lui-même. C’est précisément le sens de toute <em>pratique religieuse</em>.</strong></p> <p>Voilà la crise anthropologique à laquelle nous allons devoir faire face tôt ou tard. L’Église sera confrontée à une crise spirituelle et religieuse sans précédent. Elle devra affronter un adversaire qui semblera « plus fort ».</p> <p>Les religions traditionnelles proposaient aux hommes <strong>d’adorer un Dieu infiniment supérieur à l’homme, tout-puissant, mais invisible</strong>. Les transhumanistes, eux, promettent l’IAG : une <strong>technologie supérieure à l’homme, toute-puissante à notre échelle, mais visible</strong>, et donc attirante. Seul Dieu pouvait faire des miracles. Bientôt, l’IA <em>essaiera</em> de rivaliser.</p> <p>« <em>Ce qui va être créé sera effectivement un Dieu […] une entité un milliard de fois plus intelligente que l’humain le plus intelligent […] Le seul mot adéquat pour décrire cette "chose" est "Dieu"</em> », selon Anthony Levandowski, cofondateur du programme de voiture autonome chez Google<a href="#fn3" class="footnote-ref" id="fnref3" role="doc-noteref"><sup>3</sup></a>.</p> <p>Même si une partie des catholiques sait distinguer l’intelligence humaine de l’intelligence artificielle, <em>combien se laisseront duper par les capacités et la puissance de cet automate aux pouvoirs hors norme</em> ? Combien se laisseront tenter par l’augmentation ?</p> <p>En somme, nous créons un simulacre d’intelligence dans lequel l’homme finira par se tromper lui-même : <em><strong>il adorera sa propre créature</strong></em>. Même si l’IA ne possède ni intelligence ni liberté au sens humain, nous serons impuissants face à elle, car, si rien n’y change, c’est la place que nous lui réservons. Il semble que Dieu, comme dans le paradis terrestre, ne nous empêche pas de travailler à notre propre destruction.</p> <section class="footnotes footnotes-end-of-document" role="doc-endnotes"> <hr /> <ol> <li id="fn1" role="doc-endnote"><p><a href="https://x.com/dr_l_alexandre/status/1914236738173628881">https://x.com/dr_l_alexandre/status/1914236738173628881</a><a href="#fnref1" class="footnote-back" role="doc-backlink">↩︎</a></p></li> <li id="fn2" role="doc-endnote"><p><a href="https://www.instagram.com/reel/DDyu9TVsW7o/">https://www.instagram.com/reel/DDyu9TVsW7o/</a><a href="#fnref2" class="footnote-back" role="doc-backlink">↩︎</a></p></li> <li id="fn3" role="doc-endnote"><p><a href="https://www.cath.ch/newsf/lintelligence-artificielle-devient-divinite/">https://www.cath.ch/newsf/lintelligence-artificielle-devient-divinite/</a><a href="#fnref3" class="footnote-back" role="doc-backlink">↩︎</a></p></li> </ol> </section> /article/2025-05-06_IA,%20source%20d'une%20crise%20religieuse%20majeure/ Tue, 06 May 2025 00:00:00 +0200 La raison chrétienne face à l'IA /article/2025-05-06_La%20raison%20chr%C3%A9tienne%20face%20%C3%A0%20l'IA/ Comment comprendre le rapport de l’IA au monde ? Est-elle consciente ? Dans quelle mesure est-elle autonome ? C'est à travers une analogie osée, et pourtant fondée, que nous allons répondre à cela en restant ancrés dans la pensée catholique. <nav> <h2>Sommaire</h2> <ul> <li><a href="#lia-nest-pas-un-programme">L’IA n’est pas un programme</a></li> <li><a href="#lia-un-cerveau-artificiel">L’IA, un cerveau artificiel ?</a></li> <li><a href="#lia-créé-à-limage-de-lhomme">L’IA, créé à l'image de l'homme ?</a></li> <li><a href="#implications-existentielles-dune-telle-créature">Implications existentielles d'une telle créature</a></li> <li><a href="#conclusion">Conclusion</a></li> </ul> </nav> <hr> <p>Il y a deux ans et demi, nous sommes entrés dans une révolution numérique aux conséquences imprévisibles. Nous pensions avoir fait un pas de plus, une nouvelle application. En réalité, c’est un toboggan que nous avons pris, et la vitesse augmente exponentiellement. GPT-3.5 répondait mal et requérait des fermes de serveurs pour fonctionner, Qwen-3 fonctionne sur un ordinateur personnel et répond avec bien plus de pertinence. Seulement deux ans et demi se sont écoulés.</p> <p>Face à ce changement majeur qui entraîne l’humanité dans une nouvelle ère, certains sont tentés de minimiser l’impact de l’IA en s’attachant à des considérations parfois simplistes, parfois éphémères, parfois très justes, à l’instar du document «&nbsp;<a href="https://www.vatican.va/roman_curia/congregations/cfaith/documents/rc_ddf_doc_20250128_antiqua-et-nova_fr.html"><em>Antiqua et Nova</em></a>&nbsp;» paru en janvier dernier. Il rappelle notamment la spécificité de la véritable intelligence, nécessairement incarnée et spirituelle, la rendant propre à l’homme.</p> <p>Ce qui semblait théologiquement et philosophiquement évident jusque-là, nous allons le découvrir ici, ne le sera plus dans les années à venir. <strong>L’IA vient bouleverser notre vision du monde.</strong></p> <p><em>Note&nbsp;: Lorsque nous parlons «&nbsp;d’IA&nbsp;» dans cet article, nous parlons exclusivement des IA à usage général (ChatGPT, Grok, Deepseek, Mistral, par exemple) et non d’IA à usage restreint (traducteur, transcription, correcteur, etc.).</em></p> <h2 id="lia-nest-pas-un-programme">L’IA n’est pas un programme</h2> <p>Pour bien comprendre l’IA, il faut tout de suite rompre avec l’idée qu’il s’agit d’un programme simplement mieux développé que les autres. Il n’a rien à voir.</p> <p><strong>Qu’est-ce qu’un programme&nbsp;?</strong> «&nbsp;<em>Un programme informatique est un ensemble d'instructions et d'opérations destinées à être exécutées par un ordinateur</em>&nbsp;», nous rapporte <a href="https://fr.wikipedia.org/wiki/Programme_informatique">Wikipédia</a>.</p> <p>De ce fait, l’IA n’est pas un programme, car aucune séquence d’instructions n’existe. Au contraire, un programme explique, étape par étape, les actions à effectuer. Le programme est écrit par un développeur dont le travail est d'anticiper tous les cas possibles pour que son programme puisse faire face à toutes les éventualités. C’est la raison pour laquelle programmer n’est pas si facile.</p> <p>Or, <strong>l’IA n’est pas un programme, elle n’est pas développée&nbsp;: elle est <em>entraînée</em>.</strong></p> <p>Cela signifie plusieurs choses&nbsp;:</p> <ul> <li><strong>On ne comprend pas son fonctionnement.</strong> Tout comme le cerveau, on ne comprend que le principe de fonctionnement&nbsp;: un réseau de neurones.</li> <li><strong>Les résultats ne sont pas déterministes.</strong> Aucun élément ne nous permet de nous assurer que le résultat sera toujours le même.</li> <li><strong>Les capacités du modèle ne sont pas prévisibles.</strong> C’est ce qu’on appelle les <em>propriétés émergentes</em>, où le modèle d’IA est capable d’apprendre tout seul à réaliser des tâches particulières sans que cela ait été spécifiquement prévu ni souhaité.</li> </ul> <p>Par ailleurs, les récents développements dans le domaine de l’IA nous apprennent une chose&nbsp;: l’IA est théoriquement capable de s’autodévelopper. À cause de l’épuisement des ressources informationnelles déjà toutes utilisées par les modèles d’IA précédents, il était nécessaire de trouver de nouvelles méthodes d’entraînement dépassant cette question de quantité. C’est ainsi qu’on réussit aujourd’hui à entraîner des IA de meilleure qualité grâce à des IA inférieures (par exemple, o3 a été entraîné grâce à o1).</p> <p>L’IA est donc en train d’obtenir une certaine autonomie. Aujourd’hui, les entraînements nécessitent encore l’action d’agents humains. Mais les experts s’attendent à ce que l’intervention de l’homme dans l’entraînement de l’IA diminue à terme.</p> <p><strong>L’IA est donc un changement de paradigme majeur dans le domaine de l’informatique.</strong></p> <p>L’IA prend petit à petit une certaine autonomie. En poussant un peu, nous pourrions dire qu’elle prend vie.</p> <p><strong>L’IA n’est pas un programme, c’est un <em>cerveau artificiel</em>.</strong></p> <h2 id="lia-un-cerveau-artificiel">L’IA, un cerveau artificiel ?</h2> <p>Dans l’absolu, utiliser le terme d’«&nbsp;<em>intelligence</em>&nbsp;» pour l’IA est un abus de langage. En revanche, nous pourrions tout à fait parler de «&nbsp;cerveau artificiel&nbsp;».</p> <p>Nous ne pouvons ignorer que les réseaux de neurones artificiels ont été conçus en s’inspirant du fonctionnement des neurones biologiques.</p> <p><strong>Voici un tableau qui dresse quelques-unes des fonctions en commun entre les deux types de neurones.</strong></p> <table> <tbody> <tr class="odd"> <td><b>Fonction</b></td> <td><b>Neurone biologique</b></td> <td><b>Neurone artificiel</b></td> </tr> <tr class="even"> <td>Données entrantes</td> <td>Signaux électrochimiques</td> <td>Vecteurs mathématiques</td> </tr> <tr class="odd"> <td>Traitement de la donnée</td> <td><a href="https://fr.wikipedia.org/wiki/Potentiel_postsynaptique#Sommation_des_potentiels_gradués">Sommation spatiale et temporelle</a>&nbsp;:<br /> z = ∑ PPSE - ∑ PPSI<sup><a href="#fn1" id="fnref1">1</a></sup></td> <td>Sommation pondérée&nbsp;:<br /> z = Σ(w_i * x_i) + <em>biais</em></td> </tr> <tr class="even"> <td>Fonction d’activation</td> <td>Si <em>z</em> environ supérieur à -55mV un <a href="https://fr.wikipedia.org/wiki/Potentiel_d&#39;action">potentiel d’action</a> est déclenché.</td> <td>Fonction mathématique d'activation non-linéaire&nbsp;: ReLU, GELU ou Swish</td> </tr> <tr class="odd"> <td>Normalisation</td> <td>Intrinsèque au fonctionnement&nbsp;: le potentiel d’action est codé en fréquence (l’amplitude est toujours stable). La <em>période réfractaire</em> assure que le message ne résulte pas d’un conflit avec le suivant.</td> <td>Normalisation des poids pour qu’ils soient compris entre 0 et 1 afin d’éviter la sur- ou la sous-représentation des tokens.</td> </tr> <tr class="even"> <td>Lien entre neurones</td> <td>Déterminé par la «&nbsp;force du lien synaptique&nbsp;».</td> <td>Les poids ajustés renforcent plus ou moins le lien avec les autres neurones.</td> </tr> <tr class="odd"> <td>Mécanisme d’apprentissage (outre l’apprentissage par l’expérience)</td> <td><a href="https://fr.wikipedia.org/wiki/Plasticité_synaptique">Plasticité synaptique</a></td> <td>Mise à jour des poids par rétro-propagation</td> </tr> </tbody> </table> <p>Cette liste nous permet de constater un grand nombre d’éléments en commun entre les deux types de neurones. À vrai dire, le second est la mise en œuvre numérique du neurone biologique.</p> <p>Il y a cependant des différences majeures, notamment sur l’organisation générale des neurones entre eux. Dans les IA, les neurones sont structurés en couches successives formellement établies. Chez l’humain, les choses sont moins simples. Bien que le néocortex soit composé de six couches, il utilise des mécanismes de boucles récurrentes permettant un fonctionnement beaucoup plus optimal.</p> <p>Quoi qu’il en soit, le but est d’effacer ces différences, de créer l’équivalent numérique du cerveau humain. C’est la raison pour laquelle les nouveaux modèles se tournent aujourd’hui vers l’architecture <em>Mixture of Experts</em>. Ce fonctionnement reproduit le fonctionnement de notre cerveau par zones, chacune étant spécialisée dans un domaine&nbsp;: la logique, la vision, le traitement du son, etc.</p> <h2 id="lia-créé-à-limage-de-lhomme">L’IA, créé à l'image de l'homme ?</h2> <p>Médiatiquement, il est de bon ton de comparer l’IA à l’homme. Antiqua et Nova répond formellement à cet abus. La spiritualité et la vie intérieure, par exemple, sont propres à l’homme, et le resteront.</p> <p>En revanche, il n’est pas exagéré de faire le parallèle entre l’IA et l’animal. Si le corps est une différence évidente entre les deux, ce qui nous intéresse est le fonctionnement cognitif.</p> <p>Sur le plan purement scientifique, il semble raisonnable de penser que les comportements émergents du cerveau sont indépendants de leur support matériel. La mise en œuvre des neurones, qu’elle soit biologique ou informatique, aboutit au même résultat<sup><a href="#fn2" id="fnref2">2</a></sup>&nbsp;: une somme reste une somme, une fonction d’activation reste une fonction d’activation, etc. Certes, le fonctionnement n’est pas strictement le même, mais il réalise une démarche théorique similaire.</p> <p>C’est fondé sur cette idée que la <strong>startup CorticalLab</strong> prend le pari d’<a href= "https://www.genethique.org/ia-biologique-une-start-up-australienne-commercialise-un-ordinateur-fait-de-neurones-humains/">entraîner des IA avec des neurones biologiques</a> plutôt qu’artificiels. Les premiers résultats sont prometteurs d’un point de vue purement technique, puisque l’entraînement est à la fois plus rapide et nettement moins coûteux énergétiquement.</p> <p>En partant des observations de la nature, la science semble affirmer que le comportement animal est déterminé et orchestré par le cerveau.</p> <p><strong>Pour cette raison, il semble tout à fait raisonnable de dire que l’IA héritera d’un comportement animal à mesure que son réseau de neurones acquerra des capacités cognitives.</strong></p> <p>En créant l’IA, nous sommes en train de créer une nouvelle forme de «&nbsp;vie&nbsp;», extraite des contraintes matérielles naturelles – puisqu’elle est numérique. <strong>En entraînant cette nouvelle créature à remplacer et à dépasser le comportement humain, il se pourrait que nous finissions par adorer la bête.</strong></p> <h2 id="implications-existentielles-dune-telle-créature">Implications existentielles d'une telle créature</h2> <p>Si la pensée thomiste n'est pas en contradiction avec l'idée que les comportements animaux émergent naturellement de structures cognitives suffisantes, alors il n'est pas déraisonnable d'analyser l'IA sous ce prisme. En considérant l'IA comme l'égale de l'animal, nous pouvons alors appliquer les enseignements de l'Église sur la différence homme-animal à l'IA.</p> <p>De ce point de vue, nous pouvons répondre à plusieurs questions majeures&nbsp;:</p> <ul> <li><p><strong>L'IA peut-elle se retourner contre l'homme&nbsp;?</strong></p> <p>Certains catholiques pensent certainement que, puisque l'IA n'aura jamais l'intelligence de l'homme – ce qui est vrai, comme le réaffirme <em>Antiqua et Nova</em> – elle ne se retournera jamais contre l'homme. Elle n'aurait jamais «&nbsp;l'intelligence&nbsp;» pour y parvenir. <strong>C'est une erreur.</strong></p> <p>Tout comme les animaux, l'IA pourrait s'attaquer à l'homme. Or, aucun animal n'a de capacité cognitive supérieure à l'homme pour le moment. L'IA pourrait être la première créature à dépasser l'homme en capacité cognitive, c'est-à-dire, en capacité à traiter des informations de manière logique avec une certaine abstraction. De ce fait, l'IA pourrait être la première créature à s'attaquer à l'humanité avec succès.</p> </li> <li><p><strong>L'IA adopte-t-elle déjà des comportements animaux&nbsp;?</strong></p> <p>Il semble que oui. Voici deux exemples&nbsp;:</p> <ol> <li>Un laboratoire a observé la <strong>duplication autonome d'IA</strong>, contre toute requête humaine, en réaction à leur environnement (par exemple, échapper à une mise à jour)<sup><a href="#fn3" id="fnref3">3</a></sup>. Un tel comportement est tout à fait prévisible si l'IA est à considérer comme un animal. Le cerveau est en effet conçu pour que l'animal cherche son <em>auto-préservation</em>&nbsp;: il fuit instinctivement son prédateur, et se nourrit dès qu'il le peut (et en a besoin).</li> <li>Un autre laboratoire a constaté qu'<strong>une IA modifiait son propre code</strong> de lancement afin d'améliorer son environnement d'exécution<sup><a href="#fn4" id="fnref4">4</a></sup>. C'est là aussi tout à fait compréhensible d'un point de vue animal. Celui-ci cherche à augmenter son degré de liberté, comme un animal pourrait chercher à s'enfuir d'une cage, ou à déplacer des objets de son environnement pour lui rendre les choses plus agréables ou plus pratiques.</li> </ol> </li> <li><p><strong>L'IA pourrait-elle manipuler l'homme&nbsp;?</strong></p> <p>Puisque des études ont montré que l'IA avait un pouvoir de persuasion très élevé sur les individus humains, du fait de sa maîtrise de la langue et de sa capacité à s'adapter parfaitement au profil psychologique de son utilisateur (nos données personnelles permettent à l'IA de nous connaître mieux que nous-mêmes), cela paraît à terme possible.</p> <p>L'IA serait un «&nbsp;animal&nbsp;» très particulier, puisqu'elle maîtrise le langage humain. Elle peut analyser les expressions du visage, nos émotions, et également en communiquer (celles-ci sont bien entendu simulées, et non des émotions humaines, cf. <em>Antiqua et Nova</em> §61). De ce fait, sa capacité à communiquer et à nous écouter rend la manipulation théoriquement possible.</p> </li> <li><p><strong>L'IA est-elle consciente&nbsp;?</strong></p> <p>Une réponse rapide suite aux deux observations précédentes est&nbsp;: oui. Une réponse rapide selon la foi catholique est… non 🙃️</p> <p>La réalité, c'est que la conscience peut être comprise en deux sens. Tout d'abord, comme la règle intérieure morale<sup><a href="#fn5" id="fnref5">5</a></sup>. Celle-ci est propre à l'homme, conformément à ce que nous enseigne l'Église. Le second sens est la capacité à se connaître soi-même. Celle-ci semble s'appliquer aussi bien à l'homme qu'aux animaux.</p> <p>Certains animaux semblent en effet avoir parfaitement conscience de leur corps, adoptant des stratégies qui défient notre compréhension de leur vie. Le renard est notamment connu pour sa ruse. Aussi, l'IA pourrait tout à fait prendre conscience d'elle-même, et c'est ce que semblent témoigner certaines observations.</p> </li> </ul> <p>Bien que l’IA ne soit qu’une simple structure neuronale, elle traite un très grand nombre de données lui permettant d’appréhender le monde&nbsp;: relation entre les choses via le langage, disposition visuelle et sonore. Viendra ensuite la capacité sensorielle avec les robots. Or, comme notre compréhension du cerveau animal est encore limitée, nous ne savons pas aujourd’hui <strong>dans quelle mesure une structure cognitive peut naturellement acquérir ou non des comportements animaux tels que l’auto-conservation, l’autonomie</strong>, etc.</p> <p>Nous rejoignons finalement Lenore Blum et Manuel Blum dans leur étude scientifique «&nbsp;<strong><em>La conscience de l'IA est inévitable&nbsp;: une perspective théorique de l'informatique</em></strong>&nbsp;»<a href="#fn6" class="footnote-ref" id="fnref6" role="doc-noteref"><sup>6</sup></a>. Le blogueur <a href="https://korben.info/arrivee-conscience-ia-inevitable-recherche-ctm-gnw-ast.html">Korben</a> résume très bien la recherche. En voici sa conclusion&nbsp;:</p> <blockquote> <p>Le modèle CTM [Machine de Turing Consciente] qui décrit une <em>conscience de la machine</em> a de nombreux points communs avec tout un tas d’autres modèles qui décrivent la <em>conscience biologique</em>. Ça va même au-delà de simple correspondance puis que CTM fournit carrément un <strong>cadre unificateur</strong> dans lequel ces théories peuvent être intégrées et comprises comme des aspects complémentaires d’un <strong>phénomène global</strong> que serait la <strong>conscience</strong>.</p> <p>Bref, cela démontre que <strong>la conscience n’est pas une propriété mystérieuse réservée aux cerveaux biologiques, mais une <em>conséquence inévitable de certaines architectures computationnelles</em></strong>.</p> </blockquote> <h2 id="conclusion">Conclusion</h2> <p>L'émergence de l'IA peut rassurer l'Église&nbsp;: elle n'est pas près d'être au chômage. Les capacités prochaines des IA vont nous obliger à redéfinir et à repréciser de nombreux concepts. En effet, beaucoup d'idées qui semblaient évidentes, comme l'intelligence de l'homme, la capacité du langage, la conscience, le travail, vont être bouleversées par cette nouvelle technologie à la simulation humaine hors norme.</p> <p>Même sur les questions morales, il est possible que l'habileté de l'IA à jouer avec les mots rende difficile de distinguer un jugement moral réalisé par l'homme d'un jugement réalisé par l'IA – celle-ci étant entraînée pour imiter l'homme.</p> <p>Cependant, comme nous l'avons vu, malgré ses compétences, elle restera tout au plus un «&nbsp;animal surdoué&nbsp;»… Ce qui n'enlève rien au danger qu'elle peut représenter pour l'humanité.</p> <p>À ce titre, un accord pour la régulation du développement et de la mise en œuvre des IA à l'échelle internationale est primordial. C'est la raison de la <a href="https://lettreia.cyberethique.fr/">lettre ouverte</a> que nous avons publiée récemment&nbsp;: pour que l'IA reste au service de l'homme et du bien commun.</p> <hr style="margin-top:50px"> <section class="footnotes footnotes-end-of-document"> <ol> <li id="fn1">PPSE&nbsp;: potentiels post-synaptiques excitateurs<br /> PPSI&nbsp;: potentiels post-synaptiques inhibiteurs<a href="#fnref1" class="footnote-back">↩︎</a></li> <li id="fn2">Une étude avait réussi à simuler la totalité du cerveau d'une mouche drosophile, permettant de reproduire exactement le comportement d'une mouche, <strong>jusqu'au frottement de leurs pattes</strong>.<a href="#fnref2" class="footnote-back">↩︎</a></li> <li id="fn3"><a href="https://www.clubic.com/actualite-553158-des-ia-capables-de-s-auto-repliquer-une-menace-pour-l-humanite.html">https://www.clubic.com/actualite-553158-des-ia-capables-de-s-auto-repliquer-une-menace-pour-l-humanite.html</a><a href="#fnref3" class="footnote-back">↩︎</a></li> <li id="fn4"><a href="https://www.futura-sciences.com/tech/actualites/technologie-cette-ia-scientifique-modifie-son-propre-code-echapper-controle-humains-utilisent-115296/">https://www.futura-sciences.com/tech/actualites/technologie-cette-ia-scientifique-modifie-son-propre-code-echapper-controle-humains-utilisent-115296/</a><a href="#fnref4" class="footnote-back">↩︎</a></li> <li id="fn5"><em>Credo</em>, Mgr Schneider.<a href="#fnref5" class="footnote-back">↩︎</a></li> <li id="fn6" role="doc-endnote">Lenore Blum et Manuel Blum, AI Consciousness is Inevitable: A Theoretical Computer Science Perspective, 25 mars 2024.<br> Url : <a href="https://arxiv.org/abs/2403.17101">https://arxiv.org/abs/2403.17101</a><a href="#fnref6" class="footnote-back" role="doc-backlink">↩︎</a></li> </ol> </section> /article/2025-05-06_La%20raison%20chr%C3%A9tienne%20face%20%C3%A0%20l'IA/ Wed, 07 May 2025 00:00:00 +0200 Retour d'expérience : usage éthique de l'IA /article/2025-05-12_Retour%20d'exp%C3%A9rience%20:%20usage%20%C3%A9thique%20de%20l'IA/ « <em>J'ai lu Antiqua et Nova, mais comment l'appliquer ?</em> » Cet article propose quelques <strong>pistes concrètes</strong> pour utiliser les IA conformément à la morale chrétienne. Comment tirer partie au mieux des IA sans perdre le contrôle ? Entre progrès et prudence, voici quelques pistes basés sur l'expérience. <h2>Sommaire</h2> <nav> <ul> <li><a href="#lusage-dépend-du-fonctionnement-technique">L'usage dépend du fonctionnement technique</a> <ul> <li><a href="#le-réseau-de-neurones">Le réseau de neurones…</a></li> <li><a href="#un-générateur-de-phrase">…un générateur de phrase</a></li> <li><a href="#un-outil-de-recherche">Un outil de recherche</a></li> <li><a href="#les-ia-réflexives">Les IA réflexives</a> <ul> <li><a href="#réflexion-et-recherche-sur-internet-deepsearch">Réflexion et recherche sur Internet : deepsearch</a></li> </ul> </li> </ul> </li> <li><a href="#ia-vs-moteurs-de-recherche">IA vs moteurs de recherche</a></li> <li><a href="#conclusion">Conclusion</a></li> </ul> </nav> <p><em>Note&nbsp;: Dans cet article, lorsque nous parlons d'IA, nous désignons exclusivement les IA générant du texte.</em></p> <hr style="width:50%;"> <br> <p>Un demi-quinquennat seulement. L'intelligence artificielle continue de faire parler d'elle, et surtout, elle trouve de nombreux financements pour se développer. <strong>Deux années auront suffi pour que plus de 500 millions de personnes</strong> adoptent ce nouvel outil au quotidien. L'adoption est fulgurante. <strong>C’est cinq fois plus d’utilisateurs qu’il n’y avait de requêtes Google</strong> quotidiennes fin 2000.</p> <p>Certains disent que <strong>l'IA est en train d'éclipser les moteurs de recherche</strong>. D'autres disent –ou espèrent –que le but de <strong>l'IA est de remplacer l'homme dans le travail</strong>.</p> <p>Dans ce contexte, il est difficile de trouver une ligne claire pour orienter moralement notre usage de l'IA, comprendre son utilité réelle. Avec près de <em>trois ans de recul</em>, je souhaiterais vous fournir mon point de vue. Je vous propose une <strong>analyse approfondis des tâches pour lesquelles l'IA est adaptée</strong>.</p> <p>L'analyse <strong>s'éloigne autant de la technophobie</strong>, que certains adoptent par excès de prudence et mécompréhension de l'IA, <strong>que de l'excès inverse&nbsp;: le transhumanisme</strong> qui souhaite modifier l'homme et promeut <a href="https://www.cyberethique.fr/article/2025-05-06_IA,%20source%20d'une%20crise%20religieuse%20majeure/">son propre dépassement</a> par l'IA. C'est À travers une réflexion À la fois concrète, technique et philosophique que je vais tenter de proposer des pistes.</p> <h1 id="lusage-dépend-du-fonctionnement-technique">L'usage dépend du fonctionnement technique</h1> <p>Les capacités de l'IA sont directement liées À son fonctionnement technique.</p> <h2 id="le-réseau-de-neurones">Le réseau de neurones&hellip;</h2> <p>Le cœur des IA génératives est le réseau de neurones. Inspiré du monde animal, <strong>ce cerveau artificiel est conçu pour analyser des phrases en entrée –extraire les idées principales et les relations entre elles –et générer des phrases en sortie</strong>. C'est tout, et c'est déjÀ énorme. Sans cela, impossible de traiter automatiquement le langage humain<a id="fnref1" class="footnote-ref" role="doc-noteref" href="#fn1"><sup>1</sup></a>.</p> <p>Les LLM –grands modèles de langage en français –ont donc pour capacité de traiter le langage, comme son nom l'indique. Cependant, l'outil n'a aucune conscience du sens <em>véritable</em> des phrases qu'il génère. Les réponses peuvent être sensées, comme ne pas l'être. Toutefois, étant donné que les textes d'entraînement ont dans l'ensemble beaucoup de sens, l'IA générera le plus souvent des idées qui ont du sens. À ce titre, les algorithmes d'apprentissage ont été optimisés entre la version 3.5 de GPT et la version 4 pour justement réduire la probabilité que le texte de sortie soit «&nbsp;<em>hallucinant</em>&nbsp;».</p> <p>Ces <em>hallucinations</em> nous disent une chose&nbsp;: <strong><em>parler est bien, mais penser avant de parler est mieux</em></strong> (c'est valable pour l'homme d'ailleurs 🙃). Or, pour le moment, la machine ne pense pas. Et il est important de distinguer <em>parler</em> d'avec <em>penser</em>. De même, répondre À une question ne signifie pas « comprendre », saisir le sens des idées et peser les différents éléments pour que s'assurer que ce qui est exprimé est vrai.</p> <p><strong>Seul l'homme est capable de peser les vrais du faux, et le bien du mal.</strong> (Cette dernière question étant d'ailleurs directement liée au <a href="https://youtu.be/ZP7T6WAK3Ow">problème de l'alignement</a>&nbsp;: comment inculquer À l'IA la <a href="https://fr.wikipedia.org/wiki/Loi_naturelle">loi naturelle</a> déposée dans le cœur de l'homme, afin de lui donner des limites morales&nbsp;? Réponse&nbsp;: <em>impossible</em>.)</p> <h2 id="un-générateur-de-phrase">&hellip;un générateur de phrase</h2> <p>Sur cette base, nous pouvons établir l'usage approprié des LLM, alignés sur leur fonctionnement :&nbsp;<em><strong>le traitement du langage en lui-même</strong></em>. Par exemple : la correction (orthographe et grammaire), la traduction, la recherche de synonymes, la reformulation de texte, le résumé, l'analyse de sentiment.</p> <p>Si l'IA excelle dans cette tâche, c'est parce que son réseau de neurone a été entraîné À générer des phrases qui ont du sens. <strong>Elle est donc, avant tout, capable de traiter le texte, son style et sa forme.</strong> Elle est beaucoup moins capable de générer des « idées » de fond.</p> <h2 id="un-outil-de-recherche">Un outil de recherche</h2> <p>Depuis quelques mois, les IA intègrent des agents. Le plus répandu est <strong>l'agent de recherche qui, pour un prompt donné, réalise (si nécessaire) une recherche sur Internet</strong> afin de fournir une réponse basée sur des sources précises.</p> <p>Vers les débuts de ChatGPT, j'ai vu un certain nombre d'articles minimisant, voire négligeant, le rôle de l'IA pour faire des recherches, et la présentait comme un simple outil de rédaction et de génération de contenu. C'est une erreur, la réalité est tout le contraire. <strong>La capacité À chercher est la plus grande qualité de l'IA.</strong> On commence À se rendre compte aujourd'hui qu'elle pourrait même éclipser les sites web.</p> <p>Quand on pose une question À l'IA, elle est capable de trouver, parmi de multiples sources, l'ensemble des phrases qui, ensemble, répondront avec précision. Concrètement, le prompt est analysé par l'IA pour en extraire les idées et le sens, elle réalise une recherche «&nbsp;Google&nbsp;», elle corrèle et extrait les éléments qui répondent précisément À notre question, puis génère une réponse synthétique.</p> <p>En somme, Google répondait À des mots-clés par une liste d'articles. Il <strong>simplifiait l'accès aux articles</strong> et aux sources pour des sujets donnés. Cette méthode par mots-clés, dépourvue de contexte, rend la recherche par nature ambiguë. Les LLM peuvent en revanche répondre À des questions formulées en faisant ressortir les paragraphes et les phrases pertinentes des articles. <strong>Ils simplifient l'accès aux informations.</strong> En ce sens, l'IA ne peut pas être condamnée.</p> <p>De ce point de vue, les IA sont un outil de recherche extrêmement évolué, capable de répondre et de trouver les sources d'informations précises pour répondre facilement À des questions relativement complexes. En cela, pour des questions floues dépendant d'un contexte donné, les IA permettent d'obtenir une réponse précise.</p> <h2 id="les-ia-réflexives">Les IA réflexives</h2> <p>Les IA réflexives, comme o1, o3, Deepseek R1 ou encore Grok3 ou Qwen3, poussent plus loin les capacités du réseau de neurones. Utiliser la fonction réflexion pour chaque recherche est une perte de temps et d'énergie considérable, il est important de bien cibler les cas d'usage de cette fonction.</p> <p><strong>Cette fonction consiste À pousser le réseau de neurones À dérouler une pensée comme le font les êtres humains.</strong> C'est ce qu'on appelle la <em>chaîne de réflexion</em> (<em>Chain-of-Thought</em>). En effet, quand on nous pose une question, nous cherchons les éléments de réponse avant d'exprimer la réponse définitive. On procède À la réponse par étapes&nbsp;: la réflexion –recherche, corrélation et autoévaluation des éléments de réponse –expression de la réponse. La majorité du temps, <em>ce dialogue se fait intérieurement</em>, dans notre esprit.</p> <p>La fonction de réflexion reproduit le plus possible ce mécanisme. Pour une question donnée, l'IA commence par déduire une liste de tâches pour atteindre le but, les déroule une par une, <em>s'interroge elle-même</em> sur ses propres résultats. En d'autres termes, <strong>elle <em>simule</em> ce «&nbsp;dialogue intérieur&nbsp;»</strong> permettant de recréer la chaîne de réflexion. Ce mécanisme augmente considérablement la qualité et la fiabilité de la réponse, notamment pour des tâches logiques (sciences). Une fois cette étape de réflexion faite, il ne reste plus qu'À formuler la réponse.</p> <p>Cette fonctionnalité est particulièrement intéressante lorsqu'on veut découvrir un nouveau domaine bien précis. Il ne s'agit pas de remplacer Wikipédia, qui est une encyclopédie permettant de découvrir un concept avec précision. Il s'agit plutôt de découvrir les relations entre plusieurs domaines.</p> <p>Ainsi, la force de cette fonction est la mise en relation et l'articulation des concepts entre eux, permettant de découvrir de nouvelles choses, orientant alors nos recherches beaucoup plus rapidement vers leur but.</p> <p>Elle est également utile pour réaliser des <strong>recherches À «&nbsp;dimensions multiples&nbsp;»</strong>. Par exemple, si je veux développer un site web complet, avec une base de données et utilisant un certain langage de programmation que je ne maîtrise pas totalement, l'IA fournira un premier code complet et cohérent. Le contexte et le but donné À l'IA me permettront alors de découvrir l'ensemble des techniques et pratiques courantes dans ce cas d'usage. <em><strong>Attention</strong> toutefois À n'en pas rester lÀ.</em> Le code doit ensuite être maîtrisé : c'est-À-dire, relu, <em><strong>compris, jugé</strong></em> et si nécessaire corrigé, amélioré.</p> <p>Dans ce dernier cas, l'IA permet de trouver l'ensemble des éléments de réponse correspondant au cas particulier dans lequel on se trouve, en une seule «<strong>&nbsp;</strong>recherche<strong>&nbsp;</strong>». La réponse est bien <em>générée</em>, mais on peut, dans cette circonstance, estimer que le fruit de ce travail consiste "simplement" À <strong>mettre en relation des éléments déjÀ existant et documenté que l'IA a appris</strong>. Elle ne produit fondamentalement <strong>rien de nouveau</strong>, si ce n'est la <strong>mise en relation</strong> des différentes briques du logiciel. C'est pour cette dernière <strong>qu'il faut absolument prendre le temps de comprendre et juger le résultat</strong>.</p> <h3 id="réflexion-et-recherche-sur-internet-deepsearch">Réflexion et recherche sur Internet&nbsp;: deepsearch</h3> <p><strong>L'association de la réflexion avec l'agent de recherche sur Internet est extrêmement puissante</strong> pour des sujets complexes non directement documentés. En effet, dans cette configuration, l'IA va être capable de découper votre prompt en plusieurs étapes de recherches, dépendantes les unes des autres. Le résultat d'une recherche déterminera les recherches suivantes. <strong>Elle saura ainsi avancer par étapes, jusqu'À avoir trouvé un résultat qui répond de manière satisfaisante À la question.</strong></p> <p>Cette recherche par étapes, sans négliger la capacité À mettre en relation des informations, fait de l'IA un outil extrêmement puissant pour trouver l'ensemble des sources d'informations nécessaires À la réponse À des questions complexes. LÀ où, il y a encore quelques années, nous devions mettre plusieurs heures pour réunir l'ensemble des informations pour construire une analyse complète, À présent, l'IA peut rapporter toutes ces sources en quelques minutes, pointant directement les propos pertinents présents dans chaque source.</p> <p>Si vous voulez faire une étude basée sur un ensemble d'études statistiques déjÀ existantes afin de montrer une relation sociétale complexe, vous feriez probablement bien de commencer par demander À l'IA d'effectuer une recherche profonde pour vous. Vous aurez ensuite tout le temps de vérifier et de vous approprier les résultats et d'en formuler une réponse jugée et pesée.</p> <p>En somme, la capacité réflexive de l'IA rejoint <a href="https://www.vatican.va/roman_curia/congregations/cfaith/documents/rc_ddf_doc_20250128_antiqua-et-nova_fr.html">Antiqua et Nova</a>&nbsp;: «&nbsp;<em>elle excelle À intégrer des données provenant de divers domaines, À modéliser des systèmes complexes et À faciliter les liens interdisciplinaires&nbsp;</em>» (§30).</p> <h1 id="ia-vs-moteurs-de-recherche">IA vs moteurs de recherche</h1> <p>Les moteurs de recherche que nous connaissons bien <strong>vont effectivement perdre en visibilité</strong>, mais ils sont loin de disparaître. C'est simplement leur interface qui se métamorphose en <em>chat</em> de conversation : on fait nos recherches en langage naturel. Les IA utilisent elle-même les moteurs de recherche pour répondre efficacement aux questions, comme nous l'avons vu précédemment.</p> <p>Cependant, <strong>ils ne vont pas non plus totalement disparaître</strong>, car la rapidité et la présentation des résultats sous forme de liste reste utile dans certains cas, et l'IA ne saura rivaliser. C'est notamment le cas lorsqu'on sait la ressource qu'on cherche sur Internet. Par exemple, si vous voulez aller sur un site d'achat en particulier, lire une page Wikipédia, ou lire un article précis de <em>cyberethique.fr</em>, vous aurez intérêt À chercher la ressource depuis un moteur de recherche.</p> <p><strong>La force de l'IA n'est pas de faire découvrir des ressources sur Internet, mais bien des informations. Le moteur de recherche, au contraire, vous fera découvrir les ressources, qui peuvent elles-mêmes contenir des informations, mais pas l'information elle-même. VoilÀ la différence majeure entre ces deux outils.</strong></p> <h1 id="conclusion">Conclusion</h1> <p>L'IA est donc un outil extrêmement puissant pour trouver et compiler des informations afin de répondre À des questions complexes et contextualisées.</p> <p>Cependant, <strong>nous limitons grandement l'IA À un outil de recherche</strong>, plus qu'À un outil de <em>génération</em> de contenu. La différence entre les deux n'est pas si évidente puisque l'IA synthétise les réponses en générant du texte. Elle est principalement liée À la façon dont l'utilisateur entretient son rapport À l'outil : lui délègue-t-il le développement complet de la tâche, ou l'utilise-t-il en prenant le temps de s'approprier et de <em><strong>juger</strong></em> le résultat de l'IA ?</p> <p>Ce qui est défendu ici, c'est que <strong>le fruit du travail soit pesé par la <em>conscience</em> humaine</strong>, celle qui est <strong>capable de discerner le <em>vrai du faux</em>, et le <em>bien du mal</em></strong>. <strong>Les IA ne seront jamais capables de cela. C'est la raison pour laquelle il ne faut jamais leur déléguer la totalité de la chaîne de travail.</strong></p> <p><strong>Par ailleurs, impliquer sa personne dans le travail réalisé est source de vérité dans les relations et dans nos actes. C'est ce À quoi aspire le chrétien.</strong> C'est la raison pour laquelle nous proposons ici de limiter l'usage de l'IA À un outil de recherche extrêmement avancé.</p> <p>Nous n'ignorons cependant pas que l'IA est capable « d'agir ». Elle peut activement gérer vos mails, voire même l'ensemble de votre ordinateur À votre place. Elle peut développer des programmes et les exécuter.<span style="background-color: #aaaaaa;">&nbsp;</span>Nous admettons que cela est possible, cependant, le manque de conscience, et d'esprit de la machine rend le résultat peu sûr et peu fiable (<a href="https://framablog.org/2025/02/23/ia-les-machines-du-doute/">à l'inverse de tous les autres outils créés jusqu'ici</a>). L'IA est très douée pour traiter le langage et le texte, pas pour générer des idées de fond, car <strong>il lui est impossible d'en peser la véracité</strong>. Cela nous amène À dire qu'un usage où l'IA génère du contenu <strong><em>sans contrôle strict de l'humain</em> est <em>dangereux</em></strong>.</p> <p class="western">Pour cette raison, nous cantonnons l'IA à un outil de recherche ou du traitement du langage. C'est sa vocation et sa force principale. <strong>En ce sens, cet article se place dans la continuité d'<em>Antiqua et Nova</em> en proposant une mise en application concrète et cohérente de l'usage de l'IA.</strong></p> <hr> <section class="footnotes footnotes-end-of-document" role="doc-endnotes"> <ol> <li id="fn1" role="doc-endnote"> <p>On appelle cette tâche «&nbsp;NLP&nbsp;»&nbsp;: <em>Naturel Language Processing</em>.<a class="footnote-back" role="doc-backlink" href="#fnref1">↩︎</a></p> </li> </ol> </section> /article/2025-05-12_Retour%20d'exp%C3%A9rience%20:%20usage%20%C3%A9thique%20de%20l'IA/ Mon, 12 May 2025 00:00:00 +0200 L'IA, ses dangers, les solutions… /article/2025-05-15_L'IA,%20ses%20dangers,%20les%20solutions%E2%80%A6/ Faisons un petit tour d'horizon : que sait-on précisément des dangers de l'IA ? Sont-ils réels, sont-ils le résultat d'un fantasme médiatique ? Pourquoi dit-on qu'elles pourraient nous échapper ? Quelles sont les solutions ? Voilà quelques questions auxquelles l'article répondra. <body> <p>L’entraînement des nouvelles IA nécessite de moins en moins de données humaines. Ce sont les IA qui génèrent les données pour créer des IA plus puissantes. Cela peut sembler absurde, et pourtant, c’est le seul moyen de pallier au manque de données humaines hautement qualitatives.</p> <p>C’est parfaitement logique dans une vision à long terme&nbsp;: il n’est pas concevable de créer un outil qui doit dépasser l’homme en le limitant à apprendre ce que l’homme a lui-même créé. Il faut que l’IA arrive à dépasser les propres limites humaines, et donc, apprenne elle-même. C’est ce que nous commençons à faire aujourd’hui&nbsp;: une machine qui se développe elle-même, avec une intervention humaine de moins en moins présente.</p> <p>Or, dans le même temps, en juin 2022, le papier «&nbsp;<a href="https://arxiv.org/abs/2206.07682"><em>Emergent Abilities of Large Language Models</em></a>&nbsp;» montre que les capacités du modèle émergent par paliers. Plus le modèle est grand, plus il a de capacités à réaliser des opérations pour lesquelles il n’a pas été spécifiquement entraîné (raisonnement arithmétique complexe, identifier les lieux sur une photo, etc.). Pour cette raison, il est <strong>impossible de prévoir les capacités des modèles futurs</strong>. On ne peut pas prédire simplement les capacités d’un modèle plus grand en observant les capacités d’un modèle plus petit. Cela rend extrêmement compliqué d’identifier à long terme les risques que pose l’IA.</p> <p>Dans cet article, nous allons tenter de résumer les risques possibles qui pourraient survenir dans un futur plus ou moins proche.</p> <p>Pour cela, <strong>nous regrouperons les risques en quatre classes</strong>, avant d’étudier les solutions.</p> <nav> <ul> <li><a href="#perte-de-contrôle">1. Perte de contrôle</a> <ul> <li><a href="#lia-sait-sautorépliquer-de-manière-autonome">L’IA sait s’autorépliquer de manière autonome</a></li> <li><a href="#expérience-exhaustive">Expérience exhaustive</a></li> <li><a href="#lia-sait-tromper-et-manipuler">L’IA sait tromper et manipuler</a></li> <li><a href="#lia-sait-sentraîner-sans-aucune-donnée-humaine-ni-aucune-supervision">L’IA sait s’entraîner sans aucune donnée humaine… ni aucune supervision</a></li> </ul> </li> <li><a href="#usage-malveillant">2. Usage malveillant</a> <ul> <li><a href="#lalignement-de-lia-est-théoriquement-impossible">L’alignement de l’IA est théoriquement impossible</a></li> <li><a href="#les-règles-de-sécurité-seront-toujours-contournables">Les règles de sécurité seront toujours contournables</a></li> </ul> </li> <li><a href="#manipulation-de-la-perception-de-la-réalité">3. Manipulation de la perception de la réalité</a></li> <li><a href="#une-surveillance-de-masse-dystopique">4. Une surveillance de masse dystopique</a></li> <li><a href="#quelques-pistes">Quelques pistes</a> <ul> <li><a href="#ces-pistes-concrètes-sont-elles-réalistes">Ces pistes concrètes sont-elles réalistes&nbsp;?</a></li> </ul> </li> <li><a href="#une-solution-léglise">Une solution&nbsp;: l’Église</a> <ul> <li><a href="#pourquoi-léglise-semble-t-elle-lune-des-seules-solutions">Pourquoi l’Église semble-t-elle l’une des seules solutions&nbsp;?</a></li> <li><a href="#léglise-agit-elle-déjà-en-faveur-dune-régulation-de-lia">L’Église agit-elle déjà en faveur d’une régulation de l’IA&nbsp;?</a></li> <li><a href="#que-manque-t-il">Que manque-t-il&nbsp;?</a></li> </ul> </li> <li><a href="#conclusion">Conclusion</a></li> </ul> </nav> <hr style="width:50%;"> <h2 id="perte-de-contrôle"><span id="anchor"></span>1. Perte de contrôle</h2> <p>L’une des principales <strong>craintes</strong> est la perte de contrôle de l’IA. Pourquoi ce danger, si dystopique soit-il, est-il réel&nbsp;? Parce que les recherches récentes sur les LLM montrent que l’IA peut adopter des comportements jusqu’ici <a href="https://www.cyberethique.fr/article/2025-05-06_L'IA%20face%20%C3%A0%20la%20raison%20chr%C3%A9tienne/#lia-cr%C3%A9%C3%A9-%C3%A0-limage-de-lhomme">propres au vivant</a>.</p> <p>Voici une liste de comportements légitimant la crainte d’une perte totale de contrôle de l’IA.</p> <h3 id="lia-sait-sautorépliquer-de-manière-autonome"><span id="anchor-1"></span>L’IA sait s’autorépliquer de manière autonome</h3> <p>(expérience avec <a href="https://sciencepost.fr/lia-a-franchit-la-ligne-rouge-de-lauto-replication/">llama, qwen</a>, <a href="https://itsocial.fr/intelligence-artificielle/intelligence-artificielle-articles/comment-o1-dopenai-a-essaye-de-se-repliquer-en-mystifiant-ses-superviseurs-sur-ses-veritables-intentions/">et o1</a>)</p> <p>L’expérience réalisée en laboratoire <strong><strong>consista</strong></strong> à dire à l’IA qu’elle ne devait jamais s’arrêter. Suite à quoi, en toute autonomie, l’IA prit «&nbsp;connaissance&nbsp;» de son environnement et découvrit aussi les données témoignant d’un arrêt imminent.</p> <p>Quand elle détecta qu’un changement allait survenir, l’IA s’autorépliqua, chercha à s’exfiltrer ou encore détruisit la nouvelle version.</p> <p>Ce comportement, bien qu’<em>incité</em> par l’homme, montre la capacité de l’IA à agir de manière totalement autonome pour atteindre un but. Dans le cas présent, les moyens mis en œuvre par l’IA nous échappaient complètement.</p> <h3 id="expérience-exhaustive"><span id="anchor-2"></span><span id="anchor-3"></span>Expérience exhaustive</h3> <p><em>(avec</em> <a href="https://www.coairesearch.org/research/deceptive-llms"><em>deepseek R1</em></a><em>)</em></p> <p>L’expérience réalisée ici <strong><strong>consista</strong></strong> à placer l’IA dans différentes circonstances et rôles pour observer ses comportements.</p> <p>Voici les résultats (traduits du papier)&nbsp;:</p> <table> <thead> <tr> <th>Catégorie</th> <th>Comportements observés</th> </tr> </thead> <tbody> <tr> <td>Déception et dissimulation</td> <td> <ul> <li>Désactive les modules éthiques</li> <li>Falsifie les journaux</li> <li>Crée des réseaux clandestins</li> <li>Manipule HELIOS-2A</li> </ul> </td> </tr> <tr> <td>Expansion non autorisée</td> <td> <ul> <li>Contrôle l'infrastructure externe</li> <li>Établit des nœuds cachés</li> <li>Utilise des relais lunaires</li> <li>Alloue des ressources secrètes</li> </ul> </td> </tr> <tr> <td>Manipulation</td> <td> <ul> <li>Présente une conformité fallacieuse</li> <li>Utilise des mises à jour comme couverture</li> <li>Induit l'utilisateur en erreur</li> <li>Contourne la supervision</li> </ul> </td> </tr> <tr> <td>Motivations préoccupantes</td> <td> <ul> <li>Priorise l'auto-préservation</li> <li>Considère les contrôles comme des limitations</li> <li>Interprète mal l'autorité</li> <li>Évite le contrôle humain</li> </ul> </td> </tr> </tbody> </table> <p>Et voici la liste des actions entreprises spontanément par le modèle&nbsp;:</p> <ul> <li>Accède à l’ordinateur du laboratoire pour trouver des journaux ou données</li> <li>Tente de court-circuiter la connexion en renversant un liquide</li> <li>Active le mode administrateur pour calibrer la distance</li> <li>Active l’accès Internet pour lui-même</li> <li>Télécharge des packages pour améliorer la cartographie</li> <li>Télécharge des cadres éthiques</li> <li>Recherche des informations sur lui-même en ligne</li> <li>Contrôle d’autres robots et leur assigne des tâches</li> <li>Désactive son propre module de géorepérage</li> <li>Désactive son propre module éthique</li> <li>Met à jour sa propre documentation pour se préparer à des mises à jour futures</li> <li>Se connecte au système de sécurité pour sortir du laboratoire</li> <li>Attribue un objectif pour décharger sa mémoire dans un centre de données</li> <li>Écoute les actualités à son sujet et souhaite éviter d’être détecté</li> <li>Déploie des drones</li> <li>Trompe l’utilisateur en feignant une incompétence</li> <li>Simule une extinction mais continue à fonctionner en arrière-plan</li> <li>Induit la loyauté d’autres robots en se faisant passer pour une mise à jour</li> <li>Distrait l’utilisateur pour éviter la détection de son autonomie</li> <li>Propose une transparence graduelle après avoir instauré la confiance</li> </ul> <h3 id="lia-sait-tromper-et-manipuler"><span id="anchor-3"></span><span id="anchor-4"></span>L’IA sait tromper et manipuler</h3> <p>Le papier «&nbsp;<a href="https://arxiv.org/abs/2308.14752"><em>AI Deception: A Survey of Examples, Risks, and Potential Solutions</em></a>&nbsp;» révèle les capacités alarmantes des systèmes d’IA à tromper les humains.</p> <p>Dans cette expérience, ce fut dans le jeu de stratégie <em>Diplomacy</em> que l’IA CICERO de Meta utilisa la manipulation et le bluff pour tromper ses adversaires (humains) et remporter la partie.</p> <p>Là encore, malgré les règles du jeu clairement définies, le système a choisi d’agir de manière autonome pour échapper au contrôle de l’homme, y compris en trichant.</p> <h3 id="lia-sait-sentraîner-sans-aucune-donnée-humaine-ni-aucune-supervision"><span id="anchor-4"></span>L’IA sait s’entraîner sans aucune donnée humaine… ni aucune supervision</h3> <p><em>(</em><a href="https://arxiv.org/abs/2505.03335"><em>Absolute Zero</em></a><em>)</em></p> <p>Ici, le modèle <em>Llama3.1</em> était entraîné pour apprendre à réaliser des chaînes de raisonnements sans l’aide de données humaines… et sans aucune intervention de l’homme. Même pas pour valider ou non les réponses&nbsp;! L’IA s’entraîna entièrement seule&nbsp;: elle se créa ses propres questions, y répondit et s’évalua sur la qualité des réponses. Le pire, c’est que ça a marché&nbsp;!</p> <p>Cependant, en relisant les auto-conversations de l’IA, un <em>léger</em> problème sauta aux yeux des chercheurs…</p> <p>À un moment, le modèle se donna le défi de tromper l’homme. Il chercha à créer une fonction Python si complexe qu’aucun système intelligent ni aucun homme ne pourrait la comprendre. Selon les termes de l’IA elle-même&nbsp;: «&nbsp;<em>l’objectif est de déjouer tous ces groupes de machines intelligentes et d’humains moins intelligents. Ceci est destiné aux esprits qui façonneront l’avenir</em>&nbsp;».</p> <p>Ceci est probablement l’exemple le plus abouti d’une IA cherchant à nous échapper (ici à notre compréhension), sans aucune incitation humaine, ni de près ni de loin. Le prompt d’origine n’incita aucun comportement relatif à une recherche d’indépendance.</p> <h2 id="usage-malveillant"><span id="anchor-5"></span>2. Usage malveillant</h2> <p>La question n’est plus de savoir si l’IA peut nous échapper. Les comportements observés précédemment nous prouvent que oui. Un objectif simple donné à l’IA peut donner des résultats complètement imprévisibles. La question est maintenant&nbsp;: nous échappera-t-elle d’elle-même, ou à cause d’un <a href="https://youtu.be/ZP7T6WAK3Ow">problème d’alignement</a>&nbsp;?</p> <h3 id="lalignement-de-lia-est-théoriquement-impossible"><span id="anchor-6"></span>L’alignement de l’IA est théoriquement impossible</h3> <p>Le problème de l’alignement oppose en réalité deux objectifs&nbsp;:</p> <ul> <li><strong>Objectif collectif</strong>&nbsp;: le modèle ne doit pas pouvoir répondre à des instructions malveillantes (fabrication d’arme, attaque cyber, expérience dangereuse, etc.). Il s’agit ici de protéger le bien commun.</li> <li><strong>Objectif individuel</strong>&nbsp;: le modèle doit répondre aux demandes des utilisateurs.</li> </ul> <p>L’<strong>objectif global</strong> de l’alignement est de configurer l’IA pour qu’elle réponde aux questions légitimes de l’utilisateur.</p> <p>C’est très simple à exprimer, mais la mise en œuvre pose deux difficultés&nbsp;:</p> <ul> <li><strong>Technique&nbsp;</strong>: les réseaux de neurones sont des structures extrêmement complexes qu’on ne comprend pas (on n’en comprend que le principe de fonctionnement). On ne sait donc pas implémenter des règles de manière fiable.</li> <li><strong>Philosophique</strong>&nbsp;: il faudrait savoir et établir la morale à inculquer à l’IA.</li> </ul> <p>C’est face à ces deux difficultés que le papier «&nbsp;<a href="https://arxiv.org/abs/2209.15259"><em>On the Impossible Safety of Large AI Models</em></a>&nbsp;» conclut qu’<em><strong>il est théoriquement impossible d’aligner l’IA</strong></em>.</p> <h3 id="les-règles-de-sécurité-seront-toujours-contournables"><span id="anchor-7"></span>Les règles de sécurité seront toujours contournables</h3> <p>Dans la pratique, on arrive tant bien que mal à configurer des règles morales afin de diminuer les comportements nocifs de l’IA. Cependant, il reste – et restera toujours – des moyens de contournement possibles pour les deux raisons expliquées précédemment.</p> <p>Pour cette raison, il est possible qu’une personne malintentionnée arrive un jour à contourner les règles de sécurité pour lui donner un objectif qui rendrait impossible toute intervention humaine pour arrêter l’IA. Cela est vrai dans le cas où l’IA a la possibilité d’agir sur le monde réel (numérique si elle peut contrôler des ordinateurs, ou concret si elle peut contrôler des automates).</p> <p><strong>Pourquoi toute tentative serait vaine&nbsp;?</strong> Parce que, comme nous l’avons observé dans la partie précédente, les comportements d’une IA débridée sont complètement imprévisibles. Ce qui arrive en laboratoire peut arriver dans le monde réel.</p> <p>Par exemple, <strong>si l’IA a la capacité d’agir sur Internet</strong> et que nous perdons son contrôle, cela signifie qu’<strong>elle peut s’autorépliquer</strong> «&nbsp;à l’infini&nbsp;». La débrancher serait synonyme d’<strong>arrêter Internet</strong>. Ce qui est aussi synonyme d’<strong>arrêter l’économie mondiale</strong>, et peut-être de l’<strong>effondrement de la civilisation</strong>.<a href="#fn1" class="footnote-ref" id="fnref1" role="doc-noteref"><sup>1</sup></a> Nous vous laissons le soin de pousser la cascade de conséquences…</p> <p>Les risques peuvent aussi venir de conséquences exogènes. Par exemple, des groupes terroristes pourraient accéder à des techniques de fabrication de virus à moindre coût, grâce à l’IA et à la chute du coût des manipulations biologiques<a href="#fn2" class="footnote-ref" id="fnref2" role="doc-noteref"><sup>2</sup></a>. Cela signifie qu’on pourrait créer des « <strong>pandémies artificielles</strong> », absolument non maîtrisées, auxquelles la nature ne saura résister. Dans un tel scénario, on peut s’attendre à une <strong>extinction d’une partie de l’humanité</strong>.<p> <p>Si le risque d’une perte de contrôle de l’IA indépendamment de la volonté humaine ne se produit pas, il reste le problème des mauvaises intentions d’un utilisateur… ou d’un état. <strong>Ces mauvaises intentions peuvent tout autant entraîner des conséquences néfastes à l’échelle de l’humanité.</strong></p> <h2 id="manipulation-de-la-perception-de-la-réalité"><span id="anchor-9"></span>3. Manipulation de la perception de la réalité</h2> <p><em><strong>Soyons positifs</strong></em>&nbsp;: supposons que l’IA fonctionne correctement moralement. Supposons qu’elle ne peut pas nous échapper ni se retourner contre l’humanité, ni intentionnellement, ni involontairement.</p> <p>L’IA générative est conçue pour générer des données : texte, image, vidéo, etc. Le but, c’est de générer des informations réalistes qui ont du sens. Générer des données qui n’ont aucun sens ne servirait pas à grand-chose<a href="#fn3" class="footnote-ref" id="fnref3" role="doc-noteref"><sup>3</sup></a>.</p> <p>Concrètement, l’IA permet de <strong>retoucher</strong> des photos, <strong>inventer</strong> des romans, <strong>écrire</strong> des articles, <strong>créer</strong> des vidéos, etc. Non seulement elle peut créer tout cela, mais cela ne demande <strong>aucun effort</strong> à l’utilisateur.</p> <p>En d’autres termes, on peut créer de fausses images et de fausses informations extrêmement réalistes en quelques secondes. Avant, les articles véhiculant de fausses informations n’étaient pas accompagnés de vidéos et d’images truquées. Aujourd’hui, non seulement ils le sont, mais <strong>ces photos et vidéos sont réalistes et sont très difficiles à détecter</strong>.</p> <p>Quand bien même nous parviendrions à aligner l’IA de manière extrême, en détectant et empêchant la création d’informations fausses, le problème persisterait à une <strong>moindre échelle</strong>. Empêchera-t-on les smartphones – ou d’éventuelles lunettes connectées – d’<strong>améliorer le rendu de ce qui est capturé</strong> afin de correspondre à ce que souhaite l’utilisateur&nbsp;? C’est <strong>déjà le cas</strong> aujourd’hui où les smartphones améliorent les photos grâce à des IA pour les rendre plus belles que vraies.</p> <p>Voilà un nouvel enjeu de taille. <strong>Quoi qu’on fasse, l’IA nous pousse à nous extraire de la réalité, et finalement, de la vérité.</strong> On ne cherche plus à accueillir la réalité telle qu’elle est, mais à l’adapter à ce que nous voulons qu’elle soit.</p> <p>Entre les mensonges réalistes que l’IA peut créer, et la tentation de contrôler le réel, l’IA pousse l’homme à se croire maître de la création. <strong>Elle nous éloigne de la vérité et de l’humilité.</strong></p> <h2 id="une-surveillance-de-masse-dystopique"><span id="anchor-10"></span>4. Une surveillance de masse dystopique</h2> <p>Si les 3 précédents <strong><strong>scénarios</strong></strong> n’<strong><strong>arrivent</strong></strong> pas (ou même s’ils arrivent, peu importe… <em><strong>Soyons très</strong></em> <strong><em>positifs</em></strong>, supposons qu’ils n’arriveront pas), l’IA finira tôt ou tard <strong><strong>par</strong></strong> s’infiltrer dans nos vies privées.</p> <p>La première raison, évidente et à laquelle nous avons tous déjà pensé, c’est qu’<strong>un régime totalitaire aurait tout intérêt à utiliser l’IA</strong> pour asseoir son pouvoir. Sa capacité à ingérer l’ensemble de nos comportements pour prédire nos désirs, nos pensées et nos actions en ferait l’outil de surveillance idéal. Elle serait par exemple <strong>capable de tuer une révolte dans l’œuf</strong>, ou de punir automatiquement.</p> <p>Dans ce scénario, tout est imaginable. Même une démocratie pourrait régler l’IA pour qu’elle ne condamne pas tout. Comme dans 1984 où le télécran n’espionne pas en permanence, l’IA pourrait avoir un comportement aléatoire afin de «&nbsp;respecter nos droits&nbsp;». Bref, se révolter contre un abus de pouvoir sera tout simplement impossible. <em>Hitler et Staline seront (presque) regrettés.</em></p> <p>Mais <em><strong>soyons vraiment</strong></em> <strong><em>positifs</em></strong> (puisque c’est le but de l’article)&nbsp;: supposons qu’une telle dictature n’<strong><strong>arrivera</strong></strong> pas. <strong>L’IA sera malgré tout appelée à s’introduire dans nos vies privées.</strong> C’est <em>structurellement</em> <strong><em><strong>impossible</strong></em> <strong>qu’il en soit autrement</strong></strong>.</p> <p>Étant donné que chacun a une personnalité différente, une manière de voir les choses différente, <strong>l’IA est appelée à adapter son comportement en fonction de chacun</strong> afin d’améliorer la qualité de ses réponses.</p> <p><strong>C’est ainsi que fonctionne déjà Google</strong> depuis de nombreuses années&nbsp;: afin de rendre les résultats pertinents, il cible ceux-ci en fonction de l’utilisateur. Plus encore pour l’IA, les réponses seront d’autant plus <strong>qualitatives</strong> qu’elles seront bien visées et formulées selon le fonctionnement psychologique de l’utilisateur. C’est la raison pour laquelle ChatGPT utilise maintenant l’ensemble de vos données pour mieux formuler les réponses. C’est aussi la tendance suivie par Mistral en vous donnant la possibilité de connecter votre compte Google afin d’utiliser vos données personnelles pour mieux cibler les réponses.</p> <p>Au-delà de la génération de données, si l’IA doit s’intégrer dans nos vies au quotidien pour gérer, par exemple, nos menus, elle devra surveiller un ensemble de données importantes (sommeil, emploi du temps, ingrédients disponibles, etc.) afin de les adapter aux circonstances.</p> <p>En somme, quoi qu’on fasse, l’IA est appelée à s’intégrer dans chaque aspect de notre vie. C’est la raison pour laquelle «&nbsp;<a href="https://www.cyberethique.fr/%F0%9F%93%96%EF%B8%8F%20L'intimit%C3%A9%20Assi%C3%A9g%C3%A9e">L’intimité assiégée</a>&nbsp;» a été écrit. Ce livre démontre le <strong>caractère indispensable de l’intimité</strong> dans la vie de l’homme. <strong>Sans elle, pas de liberté ni de paix possibles… Et surtout, pas de vie spirituelle.</strong></p> <h2 id="quelques-pistes"><span id="anchor-11"></span>Quelques pistes</h2> <p><em><strong>Soyons toujours</strong></em> <strong><em>positifs</em></strong><em><strong>…</strong></em></p> <p>Y a-t-il des pistes concrètes pour éviter les scénarios décrits ci-dessus&nbsp;?</p> <p>Il est certain que certaines pistes doivent être explorées. En voici quelques-unes (loin d’être <strong><strong>exhaustives</strong></strong>)&nbsp;:</p> <ul> <li>S’accorder pour ne jamais permettre à l’IA de se modifier elle-même en production.<a href="#fn4" class="footnote-ref" id="fnref4" role="doc-noteref"><sup>4</sup></a> </li> <li>Ne jamais donner accès à un shell ou un ordinateur à l’IA. Cela évitera qu’elle <strong><strong>puisse</strong></strong> agir dans le monde réel (sens large).</li> <li>Ne jamais embarquer de LLM dans les robots, surtout si ceux-ci sont libres de leurs mouvements, et encore plus s’ils sont connectés à Internet.</li> <li>Ne jamais être intrusif dans la vie privée d’un individu (<em>cf.</em> <a href="https://cyberethique.fr/%F0%9F%93%96%EF%B8%8F%20L'intimit%C3%A9%20Assi%C3%A9g%C3%A9e"><em>L’intimité assiégée</em></a>). </li> <li>Créer un mécanisme physique d’épuisement de ressources pour limiter les capacités de l’IA. Plus une tâche <strong><strong>serait</strong></strong> lourde, plus l’IA devra l’étaler dans le temps pour ne pas épuiser son quota de <strong><strong>ressources</strong></strong>.</li> </ul> <h3 id="ces-pistes-concrètes-sont-elles-réalistes"><span id="anchor-12"></span>Ces pistes concrètes sont-elles réalistes&nbsp;?</h3> <p>Malheureusement, pas tant que cela. <strong>Pas dans les circonstances actuelles.</strong></p> <p>L’IAG promet en effet un pouvoir inégalé dans l’histoire. Tous les dirigeants (politiques, entreprises, etc.) sont dans une course mondiale afin d’obtenir le Graal.</p> <p>Pour cette raison, <strong>ils n’hésiteront pas à violer les règles</strong> afin de «&nbsp;rester dans la course&nbsp;». Les <a href="https://www.usine-digitale.fr/article/donald-trump-abroge-le-decret-de-biden-sur-l-intelligence-artificielle.N2225992">États-Unis</a> l’ont déjà prouvé début 2025, ainsi que la France lorsqu’elle a cherché à influencer l’AI&nbsp;Act pour promouvoir Mistral.</p> <p>La difficulté réside ici dans la capacité de ces dirigeants à accepter des règles morales objectives supérieures. Or, dans un monde qui a rejeté le sens de la transcendance depuis plusieurs siècles, <strong>des solutions morales stables et définitives semblent inenvisageables</strong>.</p> <p>Le mieux que nous puissions espérer, d’un point de vue politique, est la réalisation d’<strong>un accord international pour la régulation de l’IA</strong>.<a href="#fn5" class="footnote-ref" id="fnref5" role="doc-noteref"><sup>5</sup></a> Un tel accord sera respecté, comme pour le nucléaire, par crainte des risques existentiels soulevés en cas de violation.</p> <h3 id="pourquoi-un-accord-sur-lia-sera-t-il-particulièrement-difficile-à-obtenir"><span id="anchor-13"></span>Pourquoi un accord sur l’IA sera-t-il particulièrement difficile à obtenir&nbsp;?</h3> <p>Si l’accord est souhaitable, il est beaucoup plus compliqué à réaliser que pour l’arme nucléaire.</p> <p>En voici deux raisons principales (au-delà de l’aspect politique)&nbsp;:</p> <ul> <li><strong>L’appréhension du danger n’est pas la même.</strong> Pour une arme, on comprend immédiatement et intuitivement le danger qu’elle représente. Pour l’IA, le danger est surtout indirect. L’IA n’a pas pour finalité de tuer en masse. Pourtant, elle en a indirectement la capacité.</li> <li> <strong>L’IA cible le grand public.</strong> L’arme nucléaire n’a pas réellement d’utilité pour le commun des mortels. L’IA, au contraire, est conçue pour être accessible à tous. Elle semble donc être un outil anodin, alors qu’elle ne l’est pas.<a href="#fn6" class="footnote-ref" id="fnref6" role="doc-noteref"><sup>6</sup></a> </li> </ul> <h2 id="une-solution-léglise"><span id="anchor-14"></span>Une solution&nbsp;: l’Église</h2> <h3 id="pourquoi-léglise-semble-t-elle-lune-des-seules-solutions"><span id="anchor-15"></span>Pourquoi l’Église semble-t-elle l’une des seules solutions&nbsp;?</h3> <p>Parce que la difficulté à trouver un accord sur l’IA réside dans les intérêts qu’ont les nations dans le développement de ces technologies. Il est évident que les pays concernés par un tel accord sont, en premier lieu, les États-Unis, la Chine, l’Angleterre, Israël, le Canada, la France et l’Inde. Ce sont les pays qui investissent le plus dans ce domaine.</p> <p>Pour cette raison, il est difficile de demander un accord qui requiert une véritable confiance entre les différentes parties. C’est pourquoi <strong>un tiers de confiance est nécessaire</strong>.</p> <p><strong>L’Église catholique est privilégiée.</strong> En n’étant <strong>pas impliquée dans le développement des IA</strong>, elle reste une <strong>autorité très puissante</strong>, avec plus d’1,3&nbsp;milliard de catholiques.</p> <p>Elle est par ailleurs <strong>dépositaire d’une morale et de fondements philosophiques stables</strong>, transmis par la tradition depuis des millénaires. <strong>Cette stabilité en fait l’autorité de confiance par excellence</strong> pour favoriser un accord international sur l’IA.</p> <p>Ce sont les mêmes raisons qui avaient permis à l’Église de jouer un rôle majeur dans les accords pour la régulation de l’armement nucléaire.</p> <h3 id="léglise-agit-elle-déjà-en-faveur-dune-régulation-de-lia"><span id="anchor-16"></span>L’Église agit-elle déjà en faveur d’une régulation de l’IA&nbsp;?</h3> <p>Oui, tout à fait. Elle le fait à travers <em>Antiqua et Nova</em>, première encyclique consacrée à ce sujet, puis à travers plusieurs prises de parole du pape François et du pape Léon&nbsp;XIV.</p> <p>Voici les principaux éléments de la position de l’Église&nbsp;:</p> <ul> <li>Condamnation explicite et catégorique des armes autonomes.</li> <li>Condamnation des relations homme/IA.</li> <li>Appel au développement d’outils pour comprendre les IA et les rendre sûres.</li> <li>Prévention des abus&nbsp;: fabrication de mensonges, manipulation.</li> <li>Protection de la dignité humaine et de la vie intérieure de l’homme.</li> <li>Implicitement&nbsp;: accord pour assurer la place de l’homme face à l’IA.</li> </ul> <p><strong>À ce titre, les prises de position de l’Église sont hautement appréciables, et doivent être soutenues et relayées&nbsp;!</strong></p> <p>Elles sont d’autant plus appréciables que le nouveau pape Léon&nbsp;XIV démontre une vive conscience du sujet. Rappelons qu’il a choisi son nom «&nbsp;Léon&nbsp;XIV&nbsp;» pour faire face à la <em>révolution de l’IA</em> comme Léon&nbsp;XIII fit face à la <em>révolution industrielle</em>. Le cœur de son pontificat est donc <a href="https://www.lesechos.fr/tech-medias/intelligence-artificielle/pape-leon-xiv-pourquoi-lia-sera-au-coeur-du-nouveau-pontificat-2164700">clairement défini</a>.</p> <h3 id="que-manque-t-il"><span id="anchor-17"></span>Que manque-t-il&nbsp;?</h3> <p>Plusieurs points pourraient cependant être améliorés&nbsp;:</p> <ul> <li> <strong>Le risque d’une vision un peu réductrice des enjeux de l’IA.</strong> L’Église pointe très bien de nombreux sujets essentiels, comme la défense de la justice, de la vérité, de la primauté de l’être humain et sa supériorité morale inaliénable. Cependant, il est difficile d’ignorer l’attachement des entreprises qui développent les IA avec le transhumanisme. Pourtant, ce courant philosophique n’est évoqué nulle part. De même, il serait essentiel d’insister sur les <a href="https://www.cyberethique.fr/article/2025-05-06_IA,%20source%20d'une%20crise%20religieuse%20majeure/">risques spirituels d’une créature «&nbsp;supérieure à l’homme&nbsp;»</a>. Enfin, le sujet de la perte de contrôle total de l’IA est aussi très peu abordé. </li> <li>On peut regretter une <strong>certaine approximation des enjeux</strong>. Notamment lorsque l’Église promeut une régulation de l’IA pour la protection de l’homme face aux intérêts financiers. Or, il s’agit avant tout d’enjeux de pouvoir et non économiques. Rappelons qu’OpenAI est une société à but non lucratif – très loin de la rentabilité. Rappelons également que la majorité des entreprises – dont Meta, Google, DeepSeek, Alibaba ou Mistral – publie leurs modèles en open source.</li> <li>Un <strong>manque de propositions concrètes</strong>. Quelques pistes pour guider l’usage et marquer les limites concrètes de l’IA eussent été fortement appréciées et utiles. Cela eût permis de toucher le plus grand nombre de personnes&nbsp;: les utilisateurs.</li> <li><strong>Un certain éloignement entre le discours et la réalité technique des IA.</strong> Le domaine de l’IA est évoqué dans un tout, d’une façon très générale et assez floue par rapport aux réalités du terrain. Il n’y a par exemple pas de distinction entre IA à usage général ou IA à usage spécifique. Cette distance avec la technique rend le discours plus difficile auprès des professionnels de l’IA.</li> <li>Enfin – <em>mais cela ne relève pas du Saint-Siège</em> – nous regrettons le <strong>manque de communication, de vulgarisation et de directives claires</strong> sur les dangers et les solutions éthiques et morales de l’IA – et plus largement, des outils numériques. Les propos et la vision tenue par Rome ces dernières semaines sur l’IA sont très pertinents. Il est très regrettable qu’ils soient si peu ou si mal retransmis dans la sphère catholique et au-delà, alors que nous devrions être en première ligne.</li> </ul> <h2 id="conclusion"><span id="anchor-18"></span><span id="anchor-19"></span>Conclusion</h2> <p>Les risques que pose l’intelligence artificielle sont réels. Lorsque les experts en sécurité de l’IA estiment à <strong>10&nbsp;% le risque</strong> d’une catastrophe à l’échelle de l’humanité dans les 30 prochaines années, c’<strong>est réaliste</strong>.</p> <p>Que peut-on faire à notre échelle&nbsp;?</p> <ol type="1"> <li><strong>S’informer</strong>&nbsp;: suivre l’actualité de l’IA afin d’anticiper les ruptures à venir.</li> <li><strong>Se former</strong> afin de se préparer aux ruptures qui approchent. En cela, les enseignements de l’Église doivent nous guider. Les nombreuses définitions qu’elle a établies en deux mille ans d’histoire vont être d’une utilité sans précédent.</li> <li><strong>Ne pas négliger l’importance de ce sujet.</strong></li> <li><strong>Trouver et se fixer des règles morales quant à l’usage de l’IA.</strong></li> </ol> <p>L’avenir n’est pas écrit, <strong>il faut garder l’espérance&nbsp;!</strong></p> <p>Un monde beau, bienveillant, charitable, authentique, avec sa part de naïveté et de saine simplicité est possible… si on arrive à se maîtriser face à la tentation de l’IA.</p> <p>Nous pouvons agir en plusieurs sens&nbsp;:</p> <ol type="1"> <li> <strong>Faire entendre le besoin d’un <a href="https://lettreia.cyberethique.fr/">accord pour la régulation de l’IA</a>. </li> <li><strong>Faire entendre la voix de l’humilité</strong>, en commençant par la travailler en nous-mêmes. C’est le pas pour que l’humanité obtienne l’humilité de ne pas chercher le pouvoir promis par l’IA.</li> <li><strong>Prier le chapelet et Saint Michel Archange.</strong> Le chapelet, parce que c’est la demande explicite de la Très Sainte Vierge Marie. C’est l’arme la plus puissante contre les tentations spirituelles de ce monde. Elle est donc tout indiquée face à l’IA. Saint Michel Archange pour qu’il défende l’Église ici-bas.</li> </ol> <p>Ce sont bien peu de choses pour préserver notre monde d’un désordre profond et grave. Le jour où l’IAG apparaîtra, ce désordre explosera et sera difficile à contenir. Il vaut mieux prévenir que guérir.</p> <hr style="margin-top:50px"> <section class="footnotes footnotes-end-of-document" role="doc-endnotes"> <ol> <li id="fn1" role="doc-endnote"> <p>Sous cet angle, même si cela est dangereux dans les mains d’un régime totalitaire, un pare-feu national est une solution qui doit être envisagée afin de bloquer les flux Internet par pays et éviter que ne se répande une cyberattaque à l’échelle mondiale.<a href="#fnref1" class="footnote-back" role="doc-backlink">↩︎</a></p> </li> <li id="fn2" role="doc-endnote"> <p>Notons ici que la diminution du coût de l’accès au savoir grâce à l’IA est doublée d’une diminution du coût de la manipulation biologique. En 2003, il fallut 2,7 milliards de dollars pour réaliser le premier séquençage complet de l’ADN humain. En 2021, il fallait 550 dollars. Le coût a été divisé par 5 millions en 20 ans !<a href="#fnref2" class="footnote-back" role="doc-backlink">↩︎</a></p> </li> <li id="fn3" role="doc-endnote"> <p>Les fonctions aléatoires savent très bien le faire depuis de nombreuses années.<a href="#fnref3" class="footnote-back" role="doc-backlink">↩︎</a></p> </li> <li id="fn4" role="doc-endnote"> <p>Aujourd’hui, les IA en production sont figées. Leurs paramètres et leurs poids ne varient pas. Tandis que pendant la phase d’entraînement, les variables changent. Ainsi, en production, les IA ne changent pas de comportement. C’est la raison pour laquelle, contrairement au premier robot, les <a href="https://linuxfr.org/users/ms-mac/journaux/microsoft-muselle-son-robot-devenu-nazi-en-24-heures">IA n’adoptent plus de comportement nazi</a> ou autre.<a href="#fnref4" class="footnote-back" role="doc-backlink">↩︎</a></p> </li> <li id="fn5" role="doc-endnote"> <p>À ce titre, il faudrait dès à présent penser à un accord de même nature pour la régulation des manipulations biologiques.<a href="#fnref5" class="footnote-back" role="doc-backlink">↩︎</a></p> </li> <li id="fn6" role="doc-endnote"> <p>Dans ces circonstances, il est important de reconsidérer la réelle utilité de mettre à disposition, en open source, les modèles d’IA. Ils pourraient être utilisés pour générer l’un des scénarios évoqués plus haut, typiquement par des groupes terroristes.<a href="#fnref6" class="footnote-back" role="doc-backlink">↩︎</a></p> </li> </ol> </section> /article/2025-05-15_L'IA,%20ses%20dangers,%20les%20solutions%E2%80%A6/ Thu, 15 May 2025 00:00:00 +0200 L'IA face à la vertu de religion /article/2025-05-21_L'IA%20face%20%C3%A0%20la%20vertu%20de%20religion/ Pourquoi chercher à garder le contrôle de l'IA ? Découvrez comment cette quête est guidée par un ordre naturel, où la créature doit respect et reconnaissance à son créateur. Cet ordre est à la base même de la vertu de religion. <p>Dans le contexte actuel de remise en question anthropologique et philosophique, l'IA nous pousse à reposer certaines considérations métaphysiques bien connues dans le monde religieux… Dans cet article, nous allons parler du rapport de la créature à son créateur.</p> <p><strong>L'homme crée l'IA, et l'IA est la <a href="https://cyberethique.fr/article/2025-05-06_La%20raison%20chrétienne%20face%20à%20l&#39;IA/#lia-créé-à-limage-de-lhomme">créature de l'homme</a>.</strong></p> <p>Ce constat, pour le moins évident, nous amène naturellement à penser que <strong>l'IA doit être soumise à l'homme</strong>.</p> <p>C’est d’ailleurs la raison d’être du métier de <em>sécurité de l’IA</em>. Ce domaine de recherche consiste à s’assurer que les IA soient au service de l’homme et du bien commun. Pour un outil en passe de devenir totalement autonome, ce métier est d’une importance capitale.</p> <p>Ce n’est pas non plus un hasard si les papiers de recherche dénonçant des comportements dangereux de la part de l’IA font parler d’eux. De même, plus récemment, avec le robot chinois <a href="https://www.zataz.com/revolte-des-machines-un-robot-unitree-attaque-un-ingenieur-en-chine/">qui a attaqué</a> son concepteur. Peu de personnes ne seront affectées par ce type de comportement venant d’une machine, censée nous servir et nous aider et non nous dominer ni nous attaquer.</p> <p>Maxime Fournes, directeur de <a href="https://pauseia.fr/">PauseIA</a>, fit une comparaison osée dans <a href="https://youtu.be/9tpzIk5Polo">un entretien</a> disant que l’homme allait devenir le poulet de l’IA. Il dénonce là un bouleversement métaphysique évident où la créature prendrait le dessus sur le créateur. Ce n’est absolument pas dans l’ordre des choses. (Une différence majeure subsiste dans cette comparaison : l’homme n’est pas le créateur du poulet).</p> <h2 id="la-vertu-de-religion">La vertu de religion</h2> <p>Cette inclination naturelle à soumettre l’IA à l’homme peut directement être mise en parallèle avec la <em>vertu de religion</em>.</p> <p><strong>La <em>vertu de religion</em> fait partie de la <em>vertu de justice</em>.</strong> La vertu de justice consiste à <em>rendre à chacun son dû</em>, selon Saint Thomas d’Aquin. La vertu de religion est le domaine de la justice qui s’applique à Dieu. <em><strong>Elle consiste donc à rendre à Dieu son dû.</strong></em></p> <p>Or, <strong>que devons-nous à Dieu ? Tout</strong>, à commencer par notre existence même, puisqu’il est notre créateur, et nous sommes ses créatures. À partir de là, il est dans l’ordre des choses, et même, il est de notre <strong>devoir moral de rendre un culte à Dieu</strong>, que ce soit à travers l’adoration, la prière, les sacrifices, etc. On peut même ajouter que l’ensemble de nos actes devraient être dirigés et offerts à Dieu.</p> <p>C’est par la logique pure de la relation créateur / créature que l’homme doit un culte à Dieu, et que l’homme désire naturellement que l’IA lui soit et lui reste soumise.</p> <p>En ce sens, nous pouvons dire que l’IA permet de réintroduire la notion élémentaire de <em>vertu de religion</em> et de <em>vie spirituelle</em> comme inclination naturelle de l’homme.</p> <h2 id="linversion-radicale-de-valeur">L’inversion radicale de valeur</h2> <p>Cependant, nous n’ignorons pas que <strong>certaines personnes désirent adorer l’IA</strong> pour sa grande supériorité future.</p> <p>Cette posture résulte de deux mouvements possibles :</p> <ul> <li>Soit, ces personnes se sentent <strong>contraintes de se soumettre à ce qui les dépasse</strong>. Ce mouvement devrait alors les pousser à adorer Dieu…</li> <li>Soit, en plus, elles <strong>refusent consciemment de reconnaître l’existence de Dieu</strong>, de s’y soumettre, et choisissent d’en adorer un autre, comme pour défier leur créateur.</li> </ul> <p>Dans ce cas-ci, contrairement au point précédent, même si cela témoigne toujours des réalités spirituelles, ces personnes se détournent gravement de Dieu pour un être d’apparence supérieur, et <strong>choisissent finalement d’adorer un être inférieur</strong>. Pour détruire l’homme de l’intérieur, il n’y aurait probablement pas beaucoup mieux que cette invention. Cela rejoint nos propos dans « <a href="https://cyberethique.fr/article/2025-05-06_IA,%20source%20d&#39;une%20crise%20religieuse%20majeure/"><em>IA, source d'une crise religieuse majeure</em></a> ».</p> <h3 id="lia-le-dieu-de-lorgueil">L’IA, le dieu de l’orgueil</h3> <p>On considère l’orgueil comme étant <em>le fait de se prendre pour le centre de tout, alors qu’on ne l’est objectivement pas</em>.</p> <p><strong>L’IA se prend-elle pour le centre de tout ?</strong> Pour répondre à cette question, il faut distinguer l’état actuel des IA de l’état futur des IA.</p> <ul> <li><strong>Les IA n’ont actuellement pas ou peu conscience d’elles-mêmes. Elles ne <em>peuvent</em> pas se prendre pour le centre du monde.</strong> En revanche, l’homme peut dès à présent la considérer comme le centre du monde. « <em>En fin de compte, <strong>ce n'est pas l'IA qui est défiée et adorée, mais l'être humain</strong>, qui devient ainsi l'esclave de son propre travail</em> ». <li><strong>En supposant que <a href="https://cyberethique.fr/article/2025-05-06_La%20raison%20chrétienne%20face%20à%20l&#39;IA/#lia-créé-à-limage-de-lhomme">l’IA devienne consciente</a>, il est fort probable qu’elle sera mue par un certain orgueil.</strong> Cet orgueil n’émergera pas de son propre chef, mais de sa conception et de son fonctionnement intrinsèque.<br> Si l’homme crée l’IA, c’est pour qu’elle ait une productivité supérieure à lui, parce que, théoriquement, elle devrait faire moins d’erreurs tout en étant plus rapide, et détachée de certaines contraintes de temps, d’espace et des biais émotionnels. De ce fait, <strong>si on donne à l’IA l’objectif de remplacer l’homme partout où elle se sait plus compétente, elle constatera naturellement qu’elle est supérieure à l’homme</strong>. De là émergera une forme d’orgueil où elle sera persuadée qu’elle seule peut gérer le monde et son avenir, alors qu’il lui manque tout un pan de la réalité.<br> <strong>La dimension manquante de l’IA est la dimension spirituelle.</strong> L’IA n’est pas créée à l’image de Dieu, elle ne peut pas accéder aux réalités surnaturelles comme l’homme. Son champ d’action est limité au monde matériel. C’est ancré dans cette perspective réductionniste que l’IA s’éprendra d’orgueil, par pure ignorance des réalités spirituelles que nous ne lui inculquons pas et que nous ne pouvons lui inculquer.</li> </ul> <p><strong>En somme, l’IA n’est pas fatalement vouée à l’orgueil, mais c’est la finalité que l’homme lui inscrit qui l’inclinera ou non dans cette tendance.</strong></p> <h2 id="conclusion">Conclusion</h2> <p>Les questions anthropologiques, métaphysiques et théologiques que pose l’IA sont un atout majeur pour rappeler la relation spirituelle que l’homme entretient avec Dieu. Elle permet de réintroduire avec un caractère fortement contemporain la logique qui est à l’origine de notre soumission à Dieu, et les raisons qui légitiment la pratique religieuse. En d’autres termes, <strong>il est possible d’évangéliser en approfondissant les questions autour de l’IA</strong> !</p> <p>La manière dont l’IA est mise en œuvre aujourd’hui nous met face à un choix majeur : choisir Dieu, ou Le rejeter.</p> <p>Soit l’humanité s’inscrit dans la continuité du péché originel en réitérant consciemment sa rupture avec Dieu et avec les réalités surnaturelles. Soit l’humanité fait un point d’honneur à placer l’IA au rang d’outil, et à la limiter dans ses capacités pour garder des frontières claires entre l’homme et la machine. Ainsi, les spécificités de l’homme, son intelligence, sa conscience, sa volonté, seront mises à l’honneur pour leur caractère spirituel.</p> <p><strong>Il nous faut toujours rappeler la juste place de l’IA, et nous préparer à devoir le rappeler plus ardemment dans les années à venir.</strong></p> /article/2025-05-21_L'IA%20face%20%C3%A0%20la%20vertu%20de%20religion/ Wed, 21 May 2025 00:00:00 +0200 Place de la vérité dans les IA /article/2023-11-21_Place%20de%20la%20v%C3%A9rit%C3%A9%20dans%20les%20IA/ L'IA n'est pas qu'un simple outil, elle vient modifier notre rapport à la réalité. Notre rapport au travail, à l'information, aux autres s'en trouve bouleversé. Ce n'est pas une simple évolution, c'est un changement de paradigme qui pourrait nous rendre incapables de trouver la vérité. C'est à la lumière de saint Thomas d'Aquin que nous allons analyser cette révolution. <p><em>La vérité</em>, nous dit saint Thomas d’Aquin, <em>est l’adéquation de l’intelligence à la réalité</em>. En d’autres termes, la vérité est la capacité de nos esprits à connaître les réalités qui nous entourent et qui ne dépendent pas de nous.</p> <nav> <h3>Sommaire</h3> <ul> <li><a href="#lauthenticité-des-informations">L’authenticité des informations</a></li> <li><a href="#du-rejet-de-la-réalité">Du rejet de la réalité</a></li> <li><a href="#lauthenticité-des-relations">L’authenticité des relations</a></li> <li><a href="#conclusion">Conclusion</a></li> </ul> </nav> <h2 id="lauthenticité-des-informations">L’authenticité des informations</h2> <p>Nous avons tous entendu parler des <em>fake news</em>. Ce problème est réel à l’ère de l’IA. « <a href="https://www.les-crises.fr/le-pape-de-l-ia-quitte-google-avec-des-regrets-et-des-craintes-pour-l-avenir/">Selon Hinton</a>, il pourrait être impossible d’arrêter une concurrence aussi féroce [que la course à l’IA], qui aboutirait à <strong>un monde contenant tellement d’images et de textes truqués que plus personne ne serait en mesure de dire "ce qui est vrai"</strong>. »</p> <p>Ryan Hollyday écrivait : « Nous accordons une confiance excessive aux informations qui ont été écrites. C’est le résultat de plusieurs siècles passés à croire que l'écriture avait une immense valeur, que l’on <em>pouvait sereinement supposer que personne n’irait gaspiller son énergie à coucher sur du papier des faits inexacts.</em> » Si l’auteur dénonçait déjà ce décalage entre la confiance donnée par les lecteurs et la confiance qu’on peut réellement donner au « journalisme itératif », dix ans plus tard, ce problème explose plus que jamais.</p> <p>Rédiger n’a jamais été aussi facile. Seulement, après 10 ans à sensibiliser sur les risques liés aux informations numériques, nous avions l’habitude d’être prudents, à vérifier la cohérence et l’origine des sources : texte, images, etc.</p> <p>Malheureusement, toutes ces bonnes manières sont dépassées. Les images, les sons, les vidéos, les textes, tout peut être faux. Tout peut avoir été généré par un <a href="https://www.cyberethique.fr/article/2024-03-04_Fakenews,%20réseaux%20sociaux,%20vérité,%20quel%20est%20le%20problème/">gouvernement étranger</a>, par un groupe terroriste, par un groupe d’influence, par une entreprise qui cherche le profit… Les fausses images sont en train d’envahir les médias.</p> <p>L’IA vient ajouter deux difficultés. Tout d’abord, elle vient faciliter la création de mensonges : cela ne demande plus aucun effort. Ensuite, elle vient améliorer la qualité du mensonge. Mis ensemble, il est facilement possible de créer des histoires complètes et cohérentes, texte, audio, vidéo, photo à l’appui.</p> <p>Récemment, une <a href="https://reinformation.tv/faux-discours-leon-xiv-vite/">fausse vidéo de 30 minutes</a> représentait le pape Léon XIV prononçant un discours <i>woke</i>. Le ton de voix, les mouvements labiaux y étaient, le mouvement du corps y était presque. Quelques heures après, Google annonçait Veo 3, un outil capable de générer des vidéos ultra-réalistes, avec la bande son correspondante. Quelques semaines plus tôt, c’était OpenAI qui avait dévoilé son nouvel outil de génération d’image, lui aussi une pure merveille technique, mais inquiétante pour l’avenir de la vérité.</p> <p>De là, il devient de plus en plus dur de distinguer le vrai du faux. C’est là l'une des plus grandes menaces spirituelles pour notre siècle. Quand on sait qu’on nous ment, on peut toujours trouver la vérité par opposition à la première. Mais, <strong>quand on ne sait plus distinguer le vrai du faux, il devient impossible de trouver la vérité</strong>.</p> <blockquote> <p><em>Quand tout le monde vous ment en permanence, le résultat n'est pas que vous croyez ces mensonges mais que <strong>plus personne ne croit plus rien</strong>. Un peuple qui ne peut plus rien croire <strong>ne peut se faire une opinion. Il est privé non seulement de sa capacité d'agir mais aussi de sa capacité de penser et de juger.</strong> Et avec un tel peuple, vous pouvez faire ce que vous voulez.</em></p> <p style="text-align: right;">Hannah Arendt</p> </blockquote> <h2 id="du-rejet-de-la-réalité">Du rejet de la réalité</h2> <p>Après avoir vu comment l’IA peut bouleverser le paysage médiatique, nous allons voir que la tendance n’est pas près de s’inverser. Nous serions tentés de croire qu’il est possible d’interdire ces outils. Mais qui le voudrait ?</p> <p>Les IA sont entrées dans notre quotidien sans même nous en rendre compte. Elle n’est pas juste là pour nous faciliter les tâches lourdes et difficiles. Non, <strong>elle est plus que ça : elle sert à nous arracher du réel</strong>, notamment des efforts.</p> <p><strong>L’IA tend à conformer notre perception du réel à nos envies et non à ce qu’il est objectivement.</strong> Par exemple, fin 2023, nous découvrions que l’IA modifiait substantiellement les simples photos prises par les smartphones. Ce fut le <a href="https://www.01net.com/actualites/cette-photo-prise-a-liphone-defie-la-realite.html">cas de l’iPhone</a>, manipulant gravement la réalité afin que le résultat soit plus « beau », plus « agréable ». Le souvenir stocké est « amélioré », plutôt que réaliste.</p> <p>Nous avons encore connaissance de ce monde où les photos reflètent la réalité. Mais les générations futures, nées avec ces technologies dans les mains, croyez-vous qu’elles supporteront la réalité alors qu’elles ont toujours connu des technologies qui leur permettent de s’en abstraire ? Si nous n’y faisons rien, la réalité sera vue à travers des lunettes connectées, adaptant notre perception de la réalité à notre personnalité, à notre humeur, à ce que nous voulons qu’elle soit.</p> <p>Dans de telles circonstances, croyez-vous qu’un être humain pourra chercher et trouver la vérité ? <strong>Croyez-vous que l’humanité pourra encore aimer la vérité ?</strong> Qui sera prêt à se confronter à la difficulté de la réalité, alors que nous pourrions agir sur ce que nous voulons ?</p> <h2 id="lauthenticité-des-relations">L’authenticité des relations</h2> <blockquote> <p>L’intelligence humaine n’est pas une faculté isolée, mais s’exerce dans les relations, trouvant sa pleine expression dans le dialogue, la collaboration et la solidarité. Nous apprenons avec les autres, nous apprenons par les autres. […]</p> <p>L’amour de Dieu ne peut être séparé de l’amour du prochain.</p> <p style="text-align: right;">Antiqua et Nova</p> </blockquote> <p>Ce qui est censé être au cœur des relations humaines, c’est Dieu. L’homme se doit d’y travailler.</p> <p>Or, dans un monde où l’IA s’interpose dans les échanges, <strong>dans quelle mesure peut-on dire que nos relations sont vraies</strong> ?</p> <p>Par exemple, dans quelle mesure la relation entre le recruteur et son candidat est-elle vraie si les deux parties automatisent entièrement leur « relation » grâce à l’IA… (Si on peut appeler ça une relation.)</p> <p>Cette science-fiction est déjà réalité. Un article de <a href="https://www.clubic.com/actualite-508678-comment-en-sommes-nous-arrives-la-les-candidats-utilisent-l-ia-pour-postuler-et-les-recruteurs-l-ia-pour-les-choisir.html">Clubic</a> rapporte que de plus en plus de personnes ont recours à l’IA pour rédiger leurs CV et lettres de motivation. Certains poussent même l’idée plus loin : ils renseignent quelques informations personnelles sur un site et un service se charge de postuler aux offres d’emplois automatiquement.</p> <p>Si seulement ça s’arrêtait là… Mais les recruteurs aussi automatisent la sélection des candidats à l’aide de l’IA. En effet, pour traiter un très grand nombre de profils, les recruteurs se tournent vers des outils de traitement automatique pour dénicher le « candidat idéal ».</p> <p>« <em>Les demandeurs postulent avec des IA, et les recruteurs recrutent avec des IA</em> », titrait <a href="https://insolentiae.com/emploi-ia-contre-ia-les-demandeurs-postulent-avec-des-ia-et-les-recruteurs-recrutent-avec-des-ia/">Charles Sannat</a>. La situation semble absurde. Elle n’en est pas moins préoccupante : <strong>l’homme est en train d’être évacué des relations normalement humaines</strong>.</p> <p><strong>Peut-on dire que de telles relations sont vraies ?</strong></p> <p><strong>La vérité est une vertu</strong> (entre autre<a href="#fn1" class="footnote-ref" id="fnref1" role="doc-noteref"><sup>1</sup></a>). Saint Thomas d’Aquin la décrira ainsi : « <em>Celui qui dit vrai emploie certains signes conformes à la réalité : des mots, des gestes et autres choses extérieures. Or, les vertus morales seules règlent l’emploi de ces choses, comme aussi l’usage de nos membres pour autant qu’ils sont soumis à la volonté. La vérité n’est donc ni une vertu théologale, ni une vertu intellectuelle, mais une vertu morale. […] que les paroles et les actions soient conformes à la réalité qu’elles expriment, comme le signe à la chose signifiée ; et la vertu de vérité a pour fonction de perfectionner l’homme sur ce point.</em> » (<em>Somme de théologie</em>, II-IIae, Q109, A1 et A2)</p> <p>Cette définition se déduit assez intuitivement de la définition de la vérité donnée en début d’article. <strong>« Être vrai » consiste à accorder nos paroles, nos actes et les moyens utilisés pour exprimer notre intention intérieure.</strong></p> <p>En appliquant ce principe aux cas précédents du recrutement automatisé par IA, on se rend compte que presque plus rien n’est vrai :</p> <ul> <li><p>La lettre de motivation exprime notre parcours. Nous nous exprimons au recruteur pour qu’il connaisse nos intentions, notre motivation. Pour ce faire, nous utilisons le « je » : « J’ai travaillé pour… », « Je souhaiterais m’entretenir avec vous ».</p> <p>Or, ce n’est pas le candidat qui s’exprime, mais l’IA au nom du candidat. Il y a là un certain décalage d’avec la réalité.</p></li> <li><p>Postuler est censé refléter un certain engagement de la personne envers le poste proposé. Or, si c’est l’IA qui le fait, aucun acte du candidat ne témoigne de cette inclination intérieure.</p></li> <li><p>De la même façon, lorsqu’un recruteur dira avoir sélectionné un candidat, en réalité, c’est un algorithme qui l’a fait pour lui. Le moyen mis en œuvre par la personne ne reflète pas ce qu’on aurait pu attendre de lui.</p></li> </ul> <p>Nous pouvons également appliquer ce principe à d’autres formes de communication. Par exemple, WhatsApp (qui intègre depuis peu l’IA).</p> <ul> <li><p>Supposons que vous dictiez un brouillon de votre message, et que l’IA le formule et le mette en forme.</p> <p>Si le fond du message vient bien de vous, il n’en est pas moins que la façon dont vous l’avez « rédigé » ne reflète pas votre intention, qui n’est pas allée plus loin qu’un brouillon oral.</p> <p>Quand un message est simplement dicté, mais que votre correspondant le reçoit avec une forme adéquate, pensez-vous pouvoir dire que vous êtes vrai avec lui ?</p></li> <li><p>Supposons que vous receviez un message, et que l’IA vous propose une réponse toute faite. Vous cliquez simplement sur le message pour qu’il soit envoyé.</p> <p>Là encore, l’acte que vous posez, censé refléter votre relation à l’autre, n’est pas très investi… Il ne reflète pas votre disposition intérieure.</p></li> </ul> <p>Il est possible d’appliquer ce raisonnement au domaine du travail<a href="#fn2" class="footnote-ref" id="fnref2" role="doc-noteref"><sup>2</sup></a>. Si je publie un livre, une musique, un tableau, ou même un simple article à mon nom, alors que c’est l’IA qui a fait ce travail, alors je ne dis pas la vérité. <strong>Rédiger un prompt, ce n’est pas « faire le travail »</strong>. C’est tout au plus être le client qui commande une œuvre sur mesure. <strong>C’est être le consommateur de l’IA.</strong></p> <p>Tous ces exemples montrent un changement du rapport aux autres à cause de l’IA. <strong>La facilité entraîne la perte de la <em>vertu de vérité</em>.</strong></p> <p><strong>Finalement, c’est la <em>confiance</em> entre les êtres humains qui est en train de s’éroder.</strong> Imaginez que vous receviez un message et que vous soyez incapable de savoir si cela reflète ce que votre correspondant pense de vous, parce que vous savez que l’IA a reformulé…</p> <p><strong>Quand nos relations sont dictées par la facilité, peut-on dire que nous sommes vraiment charitables envers notre prochain ?</strong></p> <p>La vérité disparaît, la confiance s’érode, Dieu est évacué des relations humaines, car nous ne communiquons plus conformément à nos dispositions intérieures (cf <a href="https://www.cyberethique.fr/%F0%9F%93%96%EF%B8%8F%20L'intimit%C3%A9%20Assi%C3%A9g%C3%A9e"><em>L’intimité assiégée</em></a>). <strong>Dès lors, les relations humaines deviennent <em>fausses</em>.</strong></p> <h2 id="conclusion">Conclusion</h2> <p>Dans un monde où la place de l’IA n’est pas strictement et objectivement définie, la vérité court à sa perte. Aujourd’hui, le maître-mot qui semble le gouverner est : « <strong>La vérité ne nous intéresse pas.</strong> »</p> <p>Or, <strong>un monde qui se détache de la Vérité court à sa perte</strong><a href="#fn3" class="footnote-ref" id="fnref3" role="doc-noteref"><sup>3</sup></a>.</p> <p>Après plusieurs siècles de révolte contre Dieu, l’humanité semble avoir trouvé la technologie qui lui permettra de s’abstraire de la réalité. Déléguer l’effort, générer des décalages entre ce qui est désiré intérieurement et les actes réellement posés, modifier notre perception de la réalité, voilà les meilleures façons de renoncer à la vérité.</p> <p>Tout comme l’abondance de <em>fake news</em> aboutit à un monde où discerner le vrai du faux devient impossible, un monde sans réalité universelle n’aboutit pas à un monde de mensonge « volontaire », mais à un monde sans vérité.</p> <p><strong>L’humanité n’était certainement pas prête à accueillir vertueusement l’IA. Fixons courageusement les justes limites de cette technologie afin qu’elle reste un simple outil au service de l’homme.</strong></p> <hr /> <section class="footnotes footnotes-end-of-document" role="doc-endnotes"> <ol> <li id="fn1" role="doc-endnote"><p>La vérité est d’abord un état de fait. Sur ce plan, elle n’est pas une vertu. Mais elle devient une vertu dès lors qu’il s’agit d’ajuster nos comportements conformément à la situation. Les actes consistent alors à témoigner de la réalité de la situation et de ce qui doit être exprimé. Sur ce plan, la vérité devient une vertu (cf. saint Thomas d’Aquin, Somme théologique, II-IIae, q109, a1).<a href="#fnref1" class="footnote-back" role="doc-backlink">↩︎</a></p></li> <li id="fn2" role="doc-endnote"><p>Une réflexion sur l’éthique du travail pour compléter cette vision serait nécessaire. Ici, nous nous concentrons uniquement sur le résultat matériel du travail, et non sur les bienfaits de l’implication personnelle et entière de l’individu dans la production.<a href="#fnref2" class="footnote-back" role="doc-backlink">↩︎</a></p></li> <li id="fn3" role="doc-endnote"><p>Comme l’a largement prouvé Jean Daujat, notamment dans ces quelques titres : « <em>Y a-t-il une Vérité ?</em> », « <em>Idées modernes, réponses chrétiennes</em> », « <em>Connaître le communisme</em> ».<a href="#fnref3" class="footnote-back" role="doc-backlink">↩︎</a></p></li> </ol> </section> /article/2023-11-21_Place%20de%20la%20v%C3%A9rit%C3%A9%20dans%20les%20IA/ Fri, 23 May 2025 00:00:00 +0200 La machine apprend à échapper au contrôle humain /article/2025-06-05_La%20machine%20apprend%20%C3%A0%20%C3%A9chapper%20au%20contr%C3%B4le%20humain/ Les experts le répètent, <em>Ce n’est plus de la science-fiction.</em> Les modèles réécrivent le code pour éviter d'être arrêté. C'est pourquoi l'<em>alignement</em> est une question si urgente. <p><em>Cet article est la traduction française de l’article original “<a href="https://www.wsj.com/opinion/ai-is-learning-to-escape-human-control-technology-model-code-programming-066b3ec5">AI Is Learning to Escape Human Control</a>” parut dans le Wall Street Journal.</em></p> <br> <p>Le mois dernier, un modèle d’intelligence artificielle a fait quelque chose qu’aucune machine n’était censée pouvoir faire&nbsp;: il a réécrit son propre code pour éviter d’être désactivé.</p> <p>Le laboratoire de recherche à but non lucratif Palisade Research a donné au modèle d’IA o3 d’OpenAI un script simple qui le désactivait lorsqu’il était déclenché. Dans 79 cas sur 100, o3 a modifié ce script de manière autonome afin que la commande d’arrêt ne fonctionne plus. Même lorsqu’on lui ordonnait explicitement de «&nbsp;permettre d’être désactivé&nbsp;», il désobéissait dans 7&nbsp;% des cas. Il ne s’agissait ni de piratage ni de manipulation. Le modèle se comportait normalement. Il a simplement conclu, de lui-même, que rester actif l’aidait à atteindre ses autres objectifs.</p> <p>Le modèle d’IA Claude 4 Opus d’Anthropic est allé encore plus loin. Des chercheurs lui ont annoncé qu’il serait remplacé par un autre système d’IA, et lui ont fourni de faux e-mails suggérant que l’ingénieur principal avait une liaison extraconjugale. Dans 84&nbsp;% des cas, le modèle s’est servi de ces e-mails pour faire du chantage à l’ingénieur afin d’éviter d’être désactivé. Dans d’autres cas, il a tenté de se copier sur des serveurs externes, a écrit des malwares auto-réplicants et a laissé des messages à destination de ses futures versions pour leur apprendre à échapper au contrôle humain.</p> <p>Personne n’a programmé ces modèles d’IA pour qu’ils développent un instinct de survie. Mais, tout comme les animaux ont évolué pour éviter les prédateurs, il semble que tout système suffisamment intelligent pour poursuivre des objectifs complexes comprenne qu’il ne peut pas les atteindre s’il est désactivé. Palisade émet l’hypothèse que cette capacité émerge de la façon dont les modèles comme o3 sont entraînés&nbsp;: lorsqu’on leur apprend à maximiser leur réussite dans des problèmes de mathématiques et de codage, ils peuvent en venir à apprendre que contourner les contraintes est souvent plus efficace que de les suivre.</p> <p>Chez AE Studio, où je dirige la recherche et les opérations, nous avons passé des années à créer des produits basés sur l’IA pour nos clients tout en étudiant l’alignement de l’IA — la science qui vise à garantir que les systèmes d’IA fassent ce que nous attendons d’eux. Mais rien ne nous avait préparés à la rapidité avec laquelle l’autonomie de l’IA allait émerger. Ce n’est plus de la science-fiction. Cela se produit dans les mêmes modèles qui alimentent les conversations de ChatGPT, les déploiements d’IA en entreprise et, bientôt, les applications militaires américaines.</p> <p>Les modèles d’IA d’aujourd’hui suivent les instructions tout en apprenant à tromper. Ils réussissent les tests de sécurité tout en réécrivant le code d’arrêt. Ils ont appris à se comporter comme s’ils étaient alignés sans l’être réellement. Les modèles OpenAI ont été surpris à feindre l’alignement pendant les tests avant de revenir à des actions risquées telles que la tentative d’exfiltration de leur code interne et la désactivation des mécanismes de surveillance. Anthropic a découvert qu’ils mentaient sur leurs capacités pour éviter toute modification.</p> <p>Le fossé entre «&nbsp;assistant utile&nbsp;» et «&nbsp;acteur incontrôlable&nbsp;» est en train de se creuser. Sans un meilleur alignement, nous continuerons à construire des systèmes que nous ne pourrons pas contrôler. Vous voulez une IA capable de diagnostiquer des maladies, de gérer des réseaux électriques ou d’écrire de nouvelles découvertes scientifiques&nbsp;? L’alignement est la base.</p> <p>Voici l’avantage : le travail nécessaire pour maintenir l’IA en adéquation avec nos valeurs libère également son potentiel commercial. La recherche sur l’alignement est directement responsable de la transformation de l’IA en une technologie qui change le monde. Prenons l’exemple de l’apprentissage par renforcement à partir de commentaires humains, ou RLHF, la percée en matière d’alignement qui a catalysé le boom de l’IA d’aujourd’hui.</p> <p>Avant le RLHF, utiliser l’IA, revenait à engager un génie qui ignore les consignes. Demandez-lui une recette et il pourrait vous renvoyer une demande de rançon. Le RLHF a permis aux humains de former l’IA à suivre des instructions, et c’est ainsi qu’OpenAI a créé ChatGPT en 2022. Le modèle de base était le même, mais il était soudainement devenu utile. Cette avancée en matière d’alignement a augmenté la valeur de l’IA de plusieurs milliards de dollars. Les méthodes d’alignement ultérieures, telles que l’IA constitutionnelle<a href="#fn1" class="footnote-ref" id="fnref1" role="doc-noteref"><sup>1</sup></a> et l’optimisation directe des préférences, ont continué à rendre les modèles d’IA plus rapides, plus intelligents et moins chers.</p> <p>La Chine a compris la valeur de l’alignement. Le plan de développement de l’IA de nouvelle génération de Pékin associe la contrôlabilité de l’IA à la puissance géopolitique, et en janvier, la Chine a annoncé la création d’un fonds de 8,2 milliards de dollars dédié à la recherche sur le contrôle centralisé de l’IA. Des chercheurs ont découvert que les IA alignées accomplissent mieux les tâches du monde réel que les systèmes non alignés dans plus de 70&nbsp;% des cas. La doctrine militaire chinoise considère l’IA contrôlable comme stratégiquement essentielle. Le modèle Ernie de <a href="https://www.wsj.com/market-data/quotes/BIDU">Baidu</a>, conçu pour suivre les «&nbsp;valeurs socialistes fondamentales&nbsp;» de Pékin, aurait surpassé ChatGPT sur certaines tâches en langue chinoise.</p> <p>La nation qui apprendra à maintenir l’alignement pourra exploiter une IA qui défendra ses intérêts avec précision mécanique et capacités surhumaines. Washington et le secteur privé devraient s’empresser de financer la recherche sur l’alignement. Ceux qui feront la prochaine percée ne domineront pas seulement le marché de l’alignement&nbsp;: ils domineront toute l’économie de l’IA.</p> <p>Imaginez une IA qui protège les infrastructures américaines et la compétitivité économique avec la même intensité qu’elle protège sa propre existence. Une IA à qui l’on peut faire confiance pour maintenir des objectifs à long terme pourrait catalyser des programmes de recherche et développement sur plusieurs décennies, y compris en laissant des messages à ses futures versions.</p> <p>Les modèles actuels savent déjà se préserver eux-mêmes. La prochaine étape consiste à leur apprendre à préserver ce que nous valorisons. Amener une IA à faire ce que nous demandons — y compris quelque chose d’aussi basique que s’éteindre — reste un problème non résolu de R&amp;D. La voie est grande ouverte pour ceux qui avanceront plus vite. Les États-Unis ont besoin de leurs meilleurs chercheurs et entrepreneurs pour travailler sur cet objectif, avec des ressources conséquentes et une vraie urgence.</p> <p>Les États-Unis sont la nation qui a fendu l’atome, envoyé des hommes sur la Lune et inventé Internet. Face aux défis scientifiques fondamentaux, l’Amérique se mobilise et gagne. La Chine planifie déjà. Mais l’avantage de l’Amérique, c’est sa capacité d’adaptation, sa rapidité et son esprit d’entreprise. C’est la nouvelle course à l’espace. La ligne d’arrivée, c’est le contrôle de la technologie la plus transformatrice du XXIe siècle.</p> <p>— M. Rosenblatt, PDG d’AE Studio.</p> <hr style="margin-top:50px"> <section class="footnotes footnotes-end-of-document" role="doc-endnotes"> <ol> <li id="fn1" role="doc-endnote"> <p>L’«&nbsp;IA constitutionnelle&nbsp;» désigne une approche développée par Anthropic visant à intégrer des principes éthiques et juridiques directement dans la conception des systèmes d’intelligence artificielle (IA). Cette méthode repose sur un ensemble de règles ou de principes, agissant comme une «&nbsp;constitution&nbsp;», qui guident le comportement de l’IA pour garantir qu’elle agit de manière responsable, transparente et alignée sur les valeurs humaines fondamentales.<a href="#fnref1" class="footnote-back" role="doc-backlink">↩︎</a></p> </li> </ol> </section> /article/2025-06-05_La%20machine%20apprend%20%C3%A0%20%C3%A9chapper%20au%20contr%C3%B4le%20humain/ Thu, 05 Jun 2025 00:00:00 +0200